Article de presse: Juscelino Kubitschek, le père de Brasilia
Publié le 22/02/2012
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21 avril 1960 - Juscelino Kubitschek, le père de Brasilia, était un Mineiro-Gerais, un homme du Minas, cette Auvergne du Brésil. Il était né le 12 décembre 1902 à Diamantina, dans une famille modeste. Sa mère était une solide femme aux yeux clairs ayant conservé de ses aïeux moraves une énergie peu ordinaire. Son père, de Oliveira, était un petit fonctionnaire qui mourut jeune. Juscelino fut élevé par sa mère, qui exerçait la profession d'institutrice à Diamantina. La cité avait connu au dix-neuvième siècle la ruée des prospecteurs de diamants. Puis elle s'était assoupie après le " boom " de la mineracao.
L'éducation maternelle fut rude mais efficace. " Je dois tout à ma mère ", disait Juscelino. Il décide, ses études secondaires terminées, d'étudier la médecine à la faculté de Belo-Horizonte. Mais il lui faut gagner sa vie. Juscelino prend le chemin de fer à voie étroite et chauffant au bois qui reliait alors Diamantina à Belo-Horizonte.
Télégraphiste le jour ou gardien la nuit, il entreprend sa médecine, passe l'internat. Chirurgien, il obtient une bourse pour un stage de perfectionnement à Paris. Il est affecté à l'hôpital Cochin et découvre ce qu'il appelle " les richesses de la tradition, le sens de la culture, l'équilibre, la gaieté ". Il profite de cette escale européenne pour se rendre en Tchécoslovaquie, sur la terre de ses ancêtres.
Gouverneur du Minas de 1950 à 1955 puis président de la république de 1955 à 1961, il met en pratique un plan qui lui permettra plus tard d'affirmer qu'il avait fait progresser le Brésil " de cinquante ans en cinq ans ". Les routes, les barrages, les centrales, les usines : tels sont alors et tels seront de 1956 à 1961 les " mots-clés " de son programme.
Pour imposer Brasilia, il dut lutter contre les sarcasmes, l'apathie ou l'indifférence de la majorité des Brésiliens. En fait, l'idée de transférer la capitale fédérale sur le haut plateau du Goias n'était pas neuve. Le premier projet remonte à 1853. Une commission gouvernementale avait, en 1934, choisi le site. Mais la poussière avait recouvert tous les dossiers quand Juscelino proclama : " Je ferai Brasilia ! " Il tint parole. En mars 1957, le concours donna la préférence aux architectes Lucio Costa et Oscar Niemeyer, qui avaient déjà construit le ministère de l'éducation à Rio. L'inauguration officielle eut lieu le 21 avril 1960 dans une atmosphère de recueillement et d'étonnement au milieu des tourbillons de rouges poussières latéritiques emportées par le vent de la savane.
Juscelino ne passa que cinq mois, les derniers de son mandat, dans le délicat palais de l'Alvorada. Il s'efforça d'accélérer le transfert réel des pouvoirs, des hommes et des dossiers. L'homme du Minas était parfaitement à l'aise dans ce décor de pionnier. Dans son esprit, Brasilia n'était pas une fin, mais un moyen. La cité futuriste aux " super-blocs " et au réseau d'autoroutes entrecroisées n'avait de sens que si elle pouvait favoriser la création de nouvelles villes et de nouveaux centres de vie. Kubitschek prétendait réussir avec la route ce que les Américains du Nord avaient réalisé avec le rail. Il s'agissait, selon sa propre formule, de " faire participer 6 millions de kilomètres carrés de territoires au progrès général du Brésil ".
MARCEL NIEDERGANG
Le Monde du 24 août 1976
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