ARTICLE DE PRESSE: Itzhak Rabin, homme d'épée, homme de paix
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
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Itzhak Rabin était-il un " faucon de gauche " ou une " colombe de droite " ? La question le laissait de marbre.
Son idéologie à luitenait en six lettres : Israël.
Pour le reste, on notera que le discours humaniste n'était pas sa tasse de thé et que les organisationsde défense de droits de l'homme, les israéliennes surtout, l'irritaient profondément.
" Quand Arafat prendra Gaza en main, disait-ilavec espoir, peu avant le retour du chef de l'OLP dans les territoires autonomes en juillet 1994, il pourra établir l'ordre sanss'inquiéter d'appels à la Cour suprême.
"
La mise en place par son ancien ennemi palestinien d'une " cour de sûreté de l'Etat ", en fait un tribunal d'exception qui siège encatimini, la nuit, sans témoin, condamne sans avocat et emprisonne au secret des dizaines d'opposants, islamistes ou non, l'auracomblé.
" Je ne crains pas d'affirmer, lançait-il samedi à ses derniers supporters de Tel Aviv, que nous avons trouvé, en l'OLP, unvéritable partenaire de paix qui a renoncé au terrorisme.
"
ITZHAK RABIN pouvait se montrer profondément humain avec ses proches, mais ce n'était ni un tendre ni un romantique.Les hommes d'Etat le sont rarement, et c'en était un.
A ses yeux, les accords signés avec l'OLP constituaient sans doute moins lemoyen de réparer une injustice historique commise contre un peuple expulsé de ses terres, que celui d'assurer la sécurité d'Israëlsur " la plus grande partie des territoires de l'ancienne Palestine du mandat britannique ".
Il crut d'ailleurs très longtemps, comme la plupart de ses collègues, militaires et politiciens, qu'il serait possible à Israël deconserver les territoires palestiniens conquis en 1967.
C'est l'Intifada, par sa résistance aux diverses vagues de répression, qui luiouvrit finalement les yeux.
Qui saura jamais si le vieux soldat, engagé volontaire à dix-huit ans dans la Hagannah, l'armée juiveclandestine qui préparait la naissance d'Israël contre l'occupation britannique, n'a pas éprouvé quelque admiration secrète pources milliers de gamins arabes qui, chaque jour, pendant sept années, ont affronté les balles de l'occupation avec de misérablespierres ?
Le premier ministre austère s'est-il jamais souvenu qu'un jeune guerrier juif nationaliste du nom d'Itzhak Rabin participait en1946 aux coups de main de la Hagannah contre l'occupant anglais et que cela lui avait valu six mois d'emprisonnement dans uncamp militaire situé...
à Gaza ? " Nous savons nous battre...
Personne ne nous a vaincus...
Nous ne fuyons pas les territoires...Nous avons fait un choix stratégique, celui de la paix.
" L'essentiel d'Itzhak Rabin est dans ces phrases, répétées comme unleitmotiv dans presque tous ses derniers discours.
Cigarettes, café, whisky et, à l'occasion, un bon steak non cachère.
Itzhak Rabin ne portait la kippa qu'en public, pourcertaines de ses sorties officielles, et il n'allait pas très régulièrement à la synagogue.
En d'autres termes, il n'avait rien de communavec le sionisme messianiste qui, depuis le début des années 70, a pris la relève des pionniers laïcs et des kibboutzniks dans lesterritoires occupés.
La paix est une décision stratégique d'Israël.
Le maintien, pour au moins cinq ans, de toutes les colonies juives, 147 au totalpour un peu plus de 140 000 habitants, Jérusalem-Est exclue , dans tous les territoires, y compris à Gaza, était, pour le disparu,une tactique à moyen terme visant à négocier en position de force, le moment venu, le statut définitif des territoires.
Cela, lescolons et l'extrême droite l'avaient compris, et c'est sans doute ce que les plus fanatiques d'entre eux ne lui ont pas pardonné.Homme d'épée il fut, homme d'épée il mourut.
D'une certaine manière, sa fin tragique conforte sa légende.
PATRICE CLAUDE Le Monde du 7 novembre 1995.
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