Article de presse: Iran-Irak, une interminable guerre d'usure
Publié le 22/02/2012
Extrait du document
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soldats de Téhéran, partis de Desfoul et de Suse, d'effectuer une percée spectaculaire de 50 km en direction de la frontière.
Plusde 2 000 kilomètres carrés de territoire sont reconquis en une semaine.
Le président Hussein reconnaît implicitement la défaite endemandant à ses troupes de " ne pas sombrer dans l'amertume ", face à ce qu'il appelle pudiquement " la modification de noslignes défensives ".
Bagdad commence à assouplir ses conditions pour une paix négociée, ne réclamant plus que le " respect de la souveraineté del'Irak ".
Le 20 juin, invoquant l'invasion israélienne du Liban, le président irakien annonce un retrait unilatéral des territoiresiraniens occupés.
Il souhaite obtenir en échange un geste qui lui permettrait de sortir honorablement du guêpier iranien.
Téhéranpour sa part demeure intraitable et exige toujours la condamnation du " criminel Saddam " comme prix de la paix, vouant ainsi àl'échec toutes les tentatives faites par les différents médiateurs.
En fait, depuis la libération en mai de Khorramchahr, lors de l'" opération Jérusalem ", les Iraniens avaient récupéré pratiquement la quasi-totalité de leurs territoires.
L' opération Ramadan
Le problème pour les dirigeants iraniens consistait alors savoir s'il fallait faire la paix avec l'Irak.
Quitte à sauver le présidentSaddam Hussein, ou poursuivre la guerre en territoire ennemi pour " aider le peuple irakien à se libérer du régime baasiste ".Après un bref débat, les thèses jusqu'au-boutistes de l'imam Khomeiny l'emportent.
Le patriarche est persuadé que l'entrée destroupes iraniennes en Irak précipitera la chute du régime de Bagdad.
Il tombe ainsi dans la même erreur que son adversaire avaitcommise en septembre 1980.
Pas plus que l'armée irakienne, les troupes de Téhéran ne semblent être en mesure d'entreprendreune guerre de conquête loin de leurs bases arrière.
De plus, le sentiment de défendre leur pays semble avoir donné aux militairesirakiens une combativité nouvelle.
L' " opération Ramadan " lancée en juillet 1982 dans le but d'isoler Bassorah n'obtient que peude résultats.
Il en est de même de l'offensive " Moslem ibn Aghil " déclenchée le 1 er octobre en direction de Mandali et de l'opération " Moharam ", entreprise le 1 er novembre dans le gouvernorat de Missan.
Toutes ces offensives visent en fait à créer le long de la frontière une série de poches qui constitueraient autant de points defixation des troupes irakiennes, contraignant ainsi les militaires de Bagdad à étirer leurs défenses, en prévision de la " grandeoffensive " que l'imam Khomeiny ne cesse d'annoncer.
Ne pouvant remporter une bataille décisive, les Iraniens ont adopté lacoûteuse tactique de la guerre d'usure quasi permanente, dont l'objectif semble être de faire tomber le régime de Bagdad enexacerbant les tensions internes en Irak.
Mais cette stratégie est à double tranchant et l'Iran subit comme son adversaire lescontrecoups d'une guerre qui n'en finit plus.
Les quatre offensives " aurore " de 1983
Les quatre offensives " Aurore " qui jalonnent l'année 1983 accroissent le mécontentement diffus de la population iranienne, quicommence à sentir que la dégradation constante de son niveau de vie est la conséquence directe de la poursuite de la guerre, etqui se montre de moins en moins disposée à " mourir pour Kerbala " (ville sainte du chiisme, dans le sud de l'Irak).
L'offensivedans la région de Missan, se solde par de lourdes pertes en vies humaines.
Les bombardements irakiens d'objectifs civils iraniensaccentuent la grogne des habitants des villes touchées par les missiles sol-sol irakiens.
L'Iran dispose cependant d'un nombre suffisant de " volontaires " et de militaires pour tenter de mener à bien l' " offensivefinale " dont rêve toujours l'imam.
Ce dernier et ses conseillers militaires semblent d'ailleurs avoir tiré les leçons de l'échec desquatre premières phases de l' " Aurore ".
Ils comptent de moins en moins sur l'héroïsme et l'esprit de sacrifice des jeunesvolontaires et de plus en plus sur la compétence et le savoir-faire des militaires professionnels, longtemps tenus en bride par descommissaires politiques religieux, et les gardiens de la révolution.
Dotés de pouvoirs accrus, les officiers de l'armée pourront désormais mener la guerre d'une manière plus efficace et classique.Et ce dans le but d'en terminer le plus rapidement possible avec un problème qui commence à peser sérieusement sur la situationintérieure du pays.
Cet objectif est devenu d'autant plus impératif que l'Irak, récemment doté de nouveaux armements soviétiqueset français, dont les redoutables Exocet, est désormais théoriquement capable de porter des coups mortels à l'économie iranienneen bombardant ses terminaux pétroliers, dont celui de l'île de Kharg, par où passe la plus grande partie de l'or noir que lesIraniens exportent pour financer la guerre et assurer la survie économique du pays.
JEAN GUEYRAS Le Monde du 25 février 1984.
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