Article de presse: Conférence d'Helsinki, les mots et les choses
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
«
uns et par les autres.
N'est-il pas significatif que, à la veille même de l'ouverture de la conférence, M.
Henry Kissinger ait mis engarde les Soviétiques contre toute ingérence dans l'affaire portugaise, au moment même où se développe aux Açores unmouvement indépendantiste qui fait trop l'affaire des Américains pour qu'on ne les soupçonne pas d'y jouer un certain rôle?
Recul américain...
Paradoxalement, en effet, cette rencontre qui devrait asseoir le statu quo européen, qui devrait avoir l'effet " stabilisateur "assigné depuis un quart de siècle par la Maison Blanche à sa diplomatie, se déroule alors que la prédominance américaine surl'Europe, se trouve de plus en plus remise en cause.
Une tendance répandue chez les responsables occidentaux tend à rendre l'Union soviétique responsable des revers de l'OncleSam.
Mais, pour ne parler que de l'Europe, ce n'est pas elle qui a lancé les colonels d'Athènes, hommes liges des Etats-Unis,dans la criminelle aventure du putsch de Chypre.
Ce n'est pas elle qui a fait voter le Congrès américain contre l'aide militaire à laTurquie.
Ce n'est pas elle qui a poussé les électeurs italiens à voter pour un parti de toute façon assez rebelle à ses conseils.
Cen'est pas elle non plus qui a renversé le pouvoir archi usé de Marcelo Caetano, pour lequel les Américains avaient tant decomplaisance.
" Nous ne pouvons tout de même pas demander aux Russes de nous aider à nous opposer à la progression ducommunisme ", nous disait un jour quelqu'un qui ressemble beaucoup à Henry Kissinger.
Au recul américain, il existe dans chaque pays des causes spécifiques.
Mais il n'aurait pas une telle ampleur si des causes proprement américaines n'avaient pas entraîné une diminution générale duprestige des Etats-Unis et, avec eux, du modèle de société dont ils se sont faits les champions.
Le rôle, en cette affaire, de laguerre du Vietnam est immense, Watergate et la récession n'ont rien arrangé.
Comment une image aussi ternie à l'intérieur conserverait-elle son éclat à l'extérieur alors que l'économie capitaliste paraîtincapable de maîtriser l'inflation, le désordre monétaire, la stagnation économique et le chômage? Alors que se sont effondrées enun an une demi-douzaine de dictatures appuyées par les Etats-Unis?
...et progression soviétique
De cette perte de prestige, l'Union soviétique profite, bien entendu, même si l'idée mythique que des millions de gens s'enfaisaient à travers le monde au lendemain de la victoire de l'Axe a elle aussi largement décliné.
Plus personne ne voit en elle,comme à l'époque de " pépé Staline ", le paradis sur terre.
Mais seule une minorité croit, avec Soljenitsyne, qu'elle n'est qu'unenfer.
Maintenant qu'elle a cessé de s'ériger en modèle universel, et qu'il lui faut prendre son parti de la différenciation croissantetant au sein des Etats à gouvernement communiste qu'entre les divers PC de la diaspora, le jugement à son propos tend, dans unsens comme dans l'autre, à devenir moins passionné.
Ses admirateurs de toujours en découvrent les ombres au moment même oùbeaucoup de non-communistes se disent que ses habitants, s'ils restent privés de certaines libertés fondamentales, ignorent à toutle moins le chômage et l'insécurité.
Est-ce à dire que l'idylle va se poursuivre, la coexistence se muer en paix véritable et la coopération se substituer dans lesrelations entre Etats à la loi de la jungle à laquelle elles doivent tant? Le croire serait singulièrement s'abuser.
L'appui délibéré donné par l'Union soviétique à Indira Gandhi au moment où celle-ci liquide la démocratie que lui avait léguéeson père, la lutte pour les mers, l'affaire de l'Angola, la poursuite, malgré tous les SALT, de la course aux armements entre lesdeux superpuissances, sont des signes parmi d'autres que la compétition planétaire-comme ne cessent de le répéter les Chinoisaux Européens assoupis-ne connaît pas de véritable pause.
Et à qui fera-t-on croire que le conflit du Proche-Orient dureraittoujours si Washington et Moscou étaient vraiment d'accord sur les conditions de son règlement?
L'histoire, depuis qu'elle s'écrit, est lutte entre des courants contradictoires.
C'est une vue de l'esprit que de s'imaginer que lesengagements les plus solennels, et même les plus sincères, peuvent soudain la figer : trop de forces sont à l'oeuvre qui provoquentréactions et contre-réactions, échappant bien souvent, d'ailleurs, à ceux qui les ont mises en mouvement.
Aussi bien la liste destraités violés ou tombés en désuétude est-elle singulièrement plus longue que celle des accords respectés jusqu'à leur terme.
Du bon usage d'Helsinki
Est-ce à dire qu'Helsinki est inutile, et que les cent dix pages de l'Acte final rejoindront dans les cartons verts des archives lesinnombrables monuments dédiés par l'humanité à l'esprit d'illusion?
Pas le moins du monde.
D'abord, parce qu'il n'est pas inutile, dans la mesure où il existe des divergences à l'intérieur du camp.
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