Article de presse: Charles Tillon le chef des Francs-tireurs
Publié le 22/02/2012
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28 mars 1942 - Né le 3 juillet 1897 à Rennes, il n'a pas vingt-deux ans lorsque, le 26 juin 1919, il organise une mutinerie à bord du croiseur Guicken. Les échos de la révolte de la mer Noire sont venus jusqu'à ce bâtiment qui faisait interminablement la navette entre Tarente et le port grec d'Itéa.
Jusque-là, sa vie avait été celle d'un jeune Breton pauvre élevé dans un milieu paysan et pieux, puis d'un élève appliqué et d'un ouvrier consciencieux, enfin d'un engagé volontaire, en pleine guerre. D'un mutin, sa condamnation à cinq ans de bagne militaire, les souffrances qu'il endure dans un camp marocain et ses réflexions font un révolutionnaire. Bénéficiaire d'une remise de peine, au bord de la mort, il s'inscrit au Parti communiste dès son retour à Rennes en 1922.
Sa carrière commence à bifurquer lorsqu'il entre au comité central du PC en 1931 puis comme suppléant au bureau politique en 1932, et lorsqu'il devient conseiller général de la Seine en 1935 et député d'Aubervilliers en 1936. En 1939, il est envoyé en Espagne pour assurer l'évacuation de combattants républicains il y est fait prisonnier pendant un mois par les troupes franquistes.
Après la dissolution du Parti communiste, le 26 septembre 1939 - il sera condamné par contumace à cinq ans de prison en mars 1940, - il passe dans la clandestinité. Chargé de réorganiser le parti dans le Sud-Ouest, où, fait exceptionnel, un appel contre les fascistes hitlériens est lancé après l'entrée des troupes allemandes à Bordeaux, il est appelé à participer au secrétariat clandestin de celui-ci en mai 1941 il est l'un des rares à avoir le contact permanent avec Jacques Duclos et Benoît Frachon.
Les réseaux de renseignement et les groupes de combat s'organisent spontanément, à l'initiative ou non des responsables régionaux du parti, en particulier l'Organisation spéciale (OS), qui donnera tant de martyrs à la Résistance.
C'est Charles Tillon qui est chargé d'organiser en juin 1941, sur des bases militaires et autonomes, d'abord l'OS puis les FTP (Francs-tireurs et partisans) qui en sont issus et sont encadrés à l'origine par les meilleurs éléments du PC il devient le chef du comité militaire national des FTP, ou FTPF (Francs-tireurs et partisans français) créé par le parti au cours de l'hiver 1941-1942, et le restera jusqu'à la Libération.
Le 9 septembre 1944, alors qu'il est chargé d'intégrer les FTP dans l'armée française, il est nommé ministre de l'air dans le gouvernement du général de Gaulle.
Du révolté de 1919, du bagnard de 1920-1922, du condamné de 1940, la Résistance a fait un ministre. Du député élu et réélu depuis 1945 et du dirigeant, membre du bureau politique depuis la Libération, l'opposition va faire un hérétique, ou du moins un réprouvé. C'est en avril 1951 que les difficultés commencent à huis clos entre lui et la direction communiste en l'absence de Maurice Thorez, alors malade en URSS : on lui reproche d'avoir conçu le Mouvement de la paix comme une organisation politique en quelque sorte rivale du parti, et on le prive des responsabilités qu'il y assume au nom du parti. Mais il faut attendre le comité central des 3 et 4 septembre 1952 pour que toute une série de griefs, souvent obscurs, lui soient adressés en même temps qu'à André Marty.
Dans cette période " stalinienne " que traverse le parti, cet homme qui a son franc-parler est jugé incommode et va jusqu'à être qualifié de " corps étranger ".
Successivement exclu du bureau politique en septembre et du comité central en décembre, " replacé à la base ", Charles Tillon sera, quatre ans plus tard, en 1957, rétabli dans tous ses droits de membre du Parti communiste.
Retiré dans un petit village de Haute-Provence aussitôt après sa condamnation, " étranglé de chagrin puis de dégoût ", Charles Tillon entreprit d'occuper le reste de ses jours à écrire ses souvenirs. Il reprit l'action politique pour dénoncer, en 1970, l'arrivée à la direction du PCF d'un homme, M. Georges Marchais, qui n'avait pas partagé les " combats vitaux " de ce parti, c'est-à-dire son action dans la Résistance. Il meurt le 13 janvier 1993.
Le Monde du 14 janvier 1993
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