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Article de presse: Budapest : l'explosion

Publié le 17/01/2022

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23 octobre 1956 - Le 21 octobre 1956, Wladislaw Gomulka est élu premier secrétaire du Parti polonais. Après une confrontation dramatique avec Nikita Khrouchtchev et trois autres membres du présidium, Moscou, qui était hostile au retour sur la scène de cette ancienne victime du stalinisme, cède. L'intervention militaire a pu être évitée. Les troupes soviétiques reçoivent l'ordre de se retirer dans leurs bases. Le lendemain, à Budapest, différentes assemblées organisées dans les facultés saluent le dénouement heureux de la crise polonaise. Les étudiants de l'Université technique présentent une liste de revendications en quinze points. Ils demandent-notamment-le retour d'Imre Nagy, le " Gomulka hongrois ", dont ils attendent une démocratisation du régime. Le 23 octobre, à midi, une manifestation de soutien aux Polonais est interdite. Deux heures plus tard, l'interdiction est levée. Aussitôt, des dizaines de milliers de jeunes, portant des drapeaux aux couleurs nationales, défilent dans les rues de la capitale et se rendent devant les statues des héros hongrois et polonais de l'indépendance. Le président de l'Association des écrivains donne lecture d'une résolution exigeant des modifications de structure et des changements de personnalités à la tête du parti et de l'Etat. La nouvelle de la manifestation se répand dans toute la ville. Au " Bois de Boulogne " de Budapest, l'immense statue de bronze de Staline est déboulonnée. A 20 heures, on diffuse le discours du premier secrétaire du Parti, Ernö Gerö, qui dirige le comité central depuis qu'en juillet son meilleur ami, Matyas Rakosi, le " Staline hongrois ", a dû se retirer. Ses propos maladroits mettront le feu aux poudres. De plus en plus nombreux, les manifestants demandent la publication de leurs revendications. Les forces de sécurité prennent position autour de la radio. Selon plusieurs témoignages, elles ouvrent le feu sur la foule. Les versions du début de la fusillade sont contradictoires. Il n'en reste pas moins que, pour la première fois, le sang coule. Dans la nuit, la garnison de la caserne Kilian se range aux côtés des manifestants, qui disposeront ainsi d'armes supplémentaires provenant des usines d'armement Lampart et Danubia. Le comité central siège toute la nuit et coopte parmi ses membres Imre Nagy, qui devient président du conseil. Dans la matinée du 24, le gouvernement, invoquant le traité de Varsovie, fait appel aux troupes soviétiques pour rétablir l'ordre. Plus tard, on expliquera qu'Imre Nagy ignorait cet appel émanant d'Ernö Gerö et d'Andréas Hegedus (ce dernier était le prédécesseur de Nagy à la tête du gouvernement). La loi martiale est proclamée. L'après-midi, le président du conseil promet l'amnistie pour les insurgés qui auront rendu les armes, ainsi que la " démocratisation systématique de la vie politique et économique ". Mais les rangs des insurgés grossissent d'heure en heure. Les Soviétiques ne peuvent plus compter que sur les forces de sécurité : la police ordinaire et l'armée se désintègrent, laissant le gouvernement pratiquement isolé. C'est dans ces circonstances que Mikhaïl Souslov et Anastase Mikoyan, membres du présidium (aujourd'hui Politburo) du parti soviétique, arrivent inopinément à Budapest et font tomber sur Ernö Gerö toute la responsabilité des événements. Le premier secrétaire est aussitôt remplacé par Janos Kadar, communiste de longue date, victime des épurations staliniennes. Celui-ci promet des négociations " sur les questions litigieuses entre la Hongrie et l'Union soviétique ". Imre Nagy déclare que les " fautes du passé sont à l'origine des événements actuels. La contre-révolution est soutenue par un grand nombre d'ouvriers de bonne foi. " Ce langage est nouveau, mais les combats meurtriers se poursuivent. Des conseils ouvriers se créent à Budapest et en province : la grève générale continue. Le 26 octobre, le parti s'engage à assurer la formation d'un gouvernement " largement représentatif et national " et approuve la formation de conseils d'ouvriers. Le nouveau gouvernement du 27 octobre comprend aussi des ministres qui n'appartenaient pas au PC en même temps, les références à la " contre-révolution " se font plus rares. Le lendemain, l'éditorial de Szabad Nép, organe du parti, qualifie l'insurrection de " mouvement national et démocratique ". Des négociations sont entamées en vue d'un cessez-le-feu entre les insurgés et les Soviétiques. Le 28, la direction du parti est provisoirement confiée à un présidium composé de six membres, parmi lesquels figurent Imre Nagy et Janos Kadar. Le programme gouvernemental, présenté le même jour, tient compte de la plupart des revendications formulées par les étudiants avant le début de l'insurrection. Une véritable révolution Mais les concessions arrivent trop tard. Les conseils ouvriers, comités révolutionnaires, partis et groupements spontanément créés-et dont certains sont encouragés par des émissions irresponsables de la radio " Europe libre " de Munich-veulent aller beaucoup plus loin. Ils réclament un nouveau remaniement gouvernemental afin d'éliminer tous les hommes de la période stalinienne. On commence à parler d'élections libres et de retrait de la Hongrie du pacte de Varsovie. Les troupes soviétiques, apparemment vaincues et démoralisées, commencent à se retirer de Budapest. Inattendue, mal préparée, improbable, la révolution semble victorieuse. Dans les rues de Budapest, on pourchasse ouvertement les membres de l'AVH, la sinistre police de sécurité. Des scènes d'atrocités se produisent le 30 octobre devant le bâtiment du comité local du parti, place de la République. Le jour même de l'attaque, Janos Kadar et le nouveau présidium semblent avoir franchi le Rubicon. Ils approuvent l'abolition du parti unique et le retour à un système de gouvernement fondé sur une coalition, telle qu'elle existait en 1945. Janos Kadar entrera évidemment dans le nouveau cabinet. Dans la soirée, le cardinal primat Mindszenty, condamné à la prison à vie en février 1949 après une sinistre comédie judiciaire, retrouve la liberté. Le 30 octobre, une déclaration solennelle du gouvernement soviétique parle d' " égalité complète de droits " entre Etats socialistes et de " non-immixtion dans les affaires intérieures des autres pays ". Mais les nouvelles qui parviennent de Budapest-où le régime communiste est en train d'agoniser-incitent Nikita Khrouchtchev à préparer la contre-attaque. Au même moment, l'action franco-britannique contre l'Egypte déclenche une autre crise internationale. Dans ses Souvenirs, Nikita Khrouchtchev relate les hésitations du Kremlin face aux événements hongrois, mais aussi la détermination de l'URSS de mettre fin à ce que Moscou a toujours qualifié de " contre-révolution ". En province, les troupes soviétiques, qui faisaient mine de quitter le pays, commencent à faire demi-tour. Mais Youri Andropov, l'ambassadeur d'URSS à Budapest, convoqué au siège du gouvernement Nagy, n'admet pas l'évidence. Le 1er novembre, le comité d'organisation du parti, qui remplace le présidium, créé trois jours plus tôt, recommande au gouvernement le retrait de la Hongrie du pacte de Varsovie. Il estime que l'URSS a rompu ses engagements. Janos Kadar, membre du comité et ministre d'Etat, approuve cette décision capitale. Il sera présent lorsque le président Imre Nagy la notifiera à l'ambassadeur soviétique. Dans un appel diffusé par radio, Janos Kadar salue une nouvelle fois l' " héroïque soulèvement du peuple " . Mais il ajoute aussi que ce soulèvement est arrivé à la croisée des chemins, et insiste sur le danger contre-révolutionnaire. Peu après avoir lancé cet appel, il disparaît dans la nuit. On se garde bien de donner des précisions sur les circonstances de son départ. Les textes officiels se contentent d'assurer qu' " après le retrait du pacte de Varsovie, la proclamation de la neutralité et l'accroissement contre-révolutionnaire, il n'existait aucune autre voie que la rupture avec le gouvernement d'Imre Nagy et la création d'un nouveau centre révolutionnaire ". Ce n'est que par recoupement d'informations d'origines diverses que l'itinéraire du futur chef du parti peut être reconstitué. En compagnie de Ferenc Munnich, vétéran du mouvement communiste et ancien ambassadeur à Moscou, Janos Kadar devait se rendre tout d'abord à l'ambassade soviétique de Budapest, où se trouvaient Mikhaïl Souslov et Anastase Mikoyan, membres du présidium, envoyés pour la deuxième fois en quelques jours en Hongrie par Nikita Khrouchtchev. Janos Kadar et Ferenc Munnich partirent ensuite pour Oujgorod, petite ville soviétique d'Ukraine subcarpatique. Khrouchtchev consacrera la journée du 2 novembre, ainsi que la nuit du 2 au 3, aux consultations avec les dirigeants des pays de l'Est. Il obtient leur soutien pour cautionner une action militaire mettant fin à la " contre-révolution ". Seul le maréchal Tito, qu'il a rencontré dans l'île de Brioni, ne croit pas qu'un retour des blindés soit la meilleure solution à la crise hongroise. C'est lui qui proposera la création d'un nouveau gouvernement, dirigé par Janos Kadar et regroupant les " forces saines ", bien que les Soviétiques aient misé sur un autre candidat, vraisemblablement Ferenc Munnich. En tout cas, lorsque, dans la matinée du 3 novembre, Nikita Khrouchtchev et Gueorgui Malenkov regagnent Moscou, le présidium donne le feu vert à l'intervention. En même temps, et dans le plus grand secret, Janos Kadar et une demi-douzaine d'autre personnalités, qui ont rompu avec Imre Nagy, quittent le territoire soviétique pour s'installer à Szolnok. A l'aube du 4 novembre, les troupes soviétiques entrent en action à Budapest. Imre Nagy déclare qu'il s'agit d'une " intention évidente de renverser le gouvernement légal ". Au même moment, sur la longueur d'onde utilisée habituellement par les émissions vers l'étranger, une " lettre ouverte " lue par Ferenc Munnich annonce la formation d'un " gouvernement révolutionnaire ouvrier-paysan " présidé par Janos Kadar, qui demande l'aide des troupes soviétiques. En réalité, ces troupes étaient entrées en action avant même que les Hongrois ne fussent informés de l'existence d'un tel gouvernement. Trois jours plus tard, les " forces contre-révolutionnaires " sont écrasées et le gouvernement d'Imre Nagy dissous. Le 7 novembre, à 14 heures, Janos Kadar et les membres de son cabinet restreint prêtent serment au Parlement. " Par cet acte-précise le communiqué officiel, publié le 12 novembre,-le gouvernement légal a commencé son travail. " A peu près à la même heure, toute résistance armée a cessé en territoire hongrois. Avant sa chute, Imre Nagy avait demandé aux Nations unies de protéger la neutralité de la Hongrie. Les débats avaient commencé au Conseil de sécurité, sur plainte déposée par les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, avant l'intervention russe. Le 4 novembre au matin, le délégué américain demanda une réunion d'urgence du Conseil de sécurité. En séance, le délégué soviétique opposa son veto à une résolution demandant le retrait des troupes soviétiques. Le même jour, l'Assemblée générale se réunit. L'ordre du jour prévoyant l'étude de la situation en Hongrie fut adopté par 53 voix contre 7 (et 7 abstentions). Dans un message adressé au maréchal Boulganine, chef du gouvernement soviétique, le président Eisenhower demanda le retrait des troupes russes. Le 5 novembre, l'assemblée générale des Nations unies pria son secrétaire général, Dag Hammarskjöld, d'envoyer des représentants en Hongrie, mais le gouvernement Kadar dénia aux Nations unies le droit de s'occuper de son pays. Le 4 novembre, Imre Nagy et plusieurs de ses amis avaient trouvé refuge à l'ambassade de Yougoslavie. Le 22 novembre, après des tractations entre Belgrade et Budapest, ils quittèrent l'ambassade, assurés, en principe, d'être libres. Mais, en dépit des protestations yougoslaves, ils furent conduits à l'état-major soviétique et emmenés en Roumanie. Le 17 juin 1958, on apprenait l'exécution d'Imre Nagy et de ses proches collaborateurs, accusés de haute trahison. THOMAS SCHREIBER Le Monde du 23 octobre 1976

« Les troupes soviétiques, apparemment vaincues et démoralisées, commencent à se retirer de Budapest.

Inattendue, malpréparée, improbable, la révolution semble victorieuse.

Dans les rues de Budapest, on pourchasse ouvertement les membres del'AVH, la sinistre police de sécurité.

Des scènes d'atrocités se produisent le 30 octobre devant le bâtiment du comité local duparti, place de la République. Le jour même de l'attaque, Janos Kadar et le nouveau présidium semblent avoir franchi le Rubicon.

Ils approuvent l'abolition duparti unique et le retour à un système de gouvernement fondé sur une coalition, telle qu'elle existait en 1945.

Janos Kadar entreraévidemment dans le nouveau cabinet.

Dans la soirée, le cardinal primat Mindszenty, condamné à la prison à vie en février 1949après une sinistre comédie judiciaire, retrouve la liberté. Le 30 octobre, une déclaration solennelle du gouvernement soviétique parle d' " égalité complète de droits " entre Etatssocialistes et de " non-immixtion dans les affaires intérieures des autres pays ".

Mais les nouvelles qui parviennent de Budapest-oùle régime communiste est en train d'agoniser-incitent Nikita Khrouchtchev à préparer la contre-attaque.

Au même moment,l'action franco-britannique contre l'Egypte déclenche une autre crise internationale.

Dans ses Souvenirs, Nikita Khrouchtchevrelate les hésitations du Kremlin face aux événements hongrois, mais aussi la détermination de l'URSS de mettre fin à ce queMoscou a toujours qualifié de " contre-révolution ".

En province, les troupes soviétiques, qui faisaient mine de quitter le pays,commencent à faire demi-tour.

Mais Youri Andropov, l'ambassadeur d'URSS à Budapest, convoqué au siège du gouvernementNagy, n'admet pas l'évidence. Le 1 er novembre, le comité d'organisation du parti, qui remplace le présidium, créé trois jours plus tôt, recommande au gouvernement le retrait de la Hongrie du pacte de Varsovie.

Il estime que l'URSS a rompu ses engagements.

Janos Kadar,membre du comité et ministre d'Etat, approuve cette décision capitale.

Il sera présent lorsque le président Imre Nagy la notifieraà l'ambassadeur soviétique. Dans un appel diffusé par radio, Janos Kadar salue une nouvelle fois l' " héroïque soulèvement du peuple " .

Mais il ajoute aussique ce soulèvement est arrivé à la croisée des chemins, et insiste sur le danger contre-révolutionnaire. Peu après avoir lancé cet appel, il disparaît dans la nuit.

On se garde bien de donner des précisions sur les circonstances de sondépart.

Les textes officiels se contentent d'assurer qu' " après le retrait du pacte de Varsovie, la proclamation de la neutralité etl'accroissement contre-révolutionnaire, il n'existait aucune autre voie que la rupture avec le gouvernement d'Imre Nagy et lacréation d'un nouveau centre révolutionnaire ".

Ce n'est que par recoupement d'informations d'origines diverses que l'itinéraire dufutur chef du parti peut être reconstitué.

En compagnie de Ferenc Munnich, vétéran du mouvement communiste et ancienambassadeur à Moscou, Janos Kadar devait se rendre tout d'abord à l'ambassade soviétique de Budapest, où se trouvaientMikhaïl Souslov et Anastase Mikoyan, membres du présidium, envoyés pour la deuxième fois en quelques jours en Hongrie parNikita Khrouchtchev. Janos Kadar et Ferenc Munnich partirent ensuite pour Oujgorod, petite ville soviétique d'Ukraine subcarpatique.

Khrouchtchevconsacrera la journée du 2 novembre, ainsi que la nuit du 2 au 3, aux consultations avec les dirigeants des pays de l'Est.

Il obtientleur soutien pour cautionner une action militaire mettant fin à la " contre-révolution ". Seul le maréchal Tito, qu'il a rencontré dans l'île de Brioni, ne croit pas qu'un retour des blindés soit la meilleure solution à lacrise hongroise.

C'est lui qui proposera la création d'un nouveau gouvernement, dirigé par Janos Kadar et regroupant les " forcessaines ", bien que les Soviétiques aient misé sur un autre candidat, vraisemblablement Ferenc Munnich.

En tout cas, lorsque, dansla matinée du 3 novembre, Nikita Khrouchtchev et Gueorgui Malenkov regagnent Moscou, le présidium donne le feu vert àl'intervention. En même temps, et dans le plus grand secret, Janos Kadar et une demi-douzaine d'autre personnalités, qui ont rompu avecImre Nagy, quittent le territoire soviétique pour s'installer à Szolnok. A l'aube du 4 novembre, les troupes soviétiques entrent en action à Budapest.

Imre Nagy déclare qu'il s'agit d'une " intentionévidente de renverser le gouvernement légal ".

Au même moment, sur la longueur d'onde utilisée habituellement par les émissionsvers l'étranger, une " lettre ouverte " lue par Ferenc Munnich annonce la formation d'un " gouvernement révolutionnaire ouvrier-paysan " présidé par Janos Kadar, qui demande l'aide des troupes soviétiques.

En réalité, ces troupes étaient entrées en actionavant même que les Hongrois ne fussent informés de l'existence d'un tel gouvernement. Trois jours plus tard, les " forces contre-révolutionnaires " sont écrasées et le gouvernement d'Imre Nagy dissous.

Le 7novembre, à 14 heures, Janos Kadar et les membres de son cabinet restreint prêtent serment au Parlement.

" Par cet acte-. »

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