étude du texte de Genèse 1
Publié le 24/01/2024
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Relire sa mission éducative à la lumière de la dimension anthropologique de Gn 1-11.
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1.
Horizon.
Le texte biblique est d’une approche difficile et le lecteur a besoin d’être guidé pour entrer dans
sa complexité, dans les méandres des traductions, et pour s’autoriser à s’y aventurer avec ses
connaissances et ses expériences propres.
Tout texte, c’est d’autant plus vrai de la Bible, est une
invitation à entrer en dialogue.
Surgit alors la nécessité du désir.
Et ce désir, comment le nourrir
davantage que par l’attente ou la certitude d’y trouver une invitation à vivre, voire à vivre mieux.
À éduquer, à enseigner mieux, peut-être.
L’enjeu est décisif pour l’enseignant et l’éducateur, pas
seulement celui qui revendique une appartenance chrétienne.
Où fonder solidement ce projet d’humanisation de l’enfant et du jeune ? Où trouver l’audace de la
rencontre, de la parole, de la patience et du don de soi, nécessaires à quiconque veut éduquer un
élève, en voyant en lui l’être unique dont il se sent et se sait responsable ? Convaincus que le récit
biblique est un de ces lieux de fécondité, nous souhaitons reprendre l’invitation de Paul Valéry,
inscrite au fronton de la Cité de l’Architecture et du Patrimoine (Palais de Chaillot, au
Trocadéro) : « Il dépend de celui qui passe que je sois tombe ou trésor, que je parle ou me taise.
Cela ne tient qu’à toi.
Ami, n’entre pas sans désir »
Dans ces pages, à partir d’un corpus biblique limité – les chapitres 1 à 11 du Livre de la Genèse –
nous voulons réaliser ce double projet : offrir une initiation à la lecture de ces récits et proposer
aux éducateurs, enseignants ou non, de nourrir leur engagement professionnel.
Relire et fonder
l’acte éducatif dans la tradition biblique est une démarche apparemment étonnante, qui peut
même paraître désuète.
Or il n’en est rien.
Les récits bibliques sont « tombe ou trésor », mais les personnels, y compris dans l’enseignement
catholique, n’en sont pas familiers.
Ils nourriraient plutôt indifférence ou prévention à leur
égard.
Or, en explorant la complexité des relations interpersonnelles et communautaires, ils
déploient une conception de l’humain (anthropologie) et dessinent une posture éducative
fécondes.
Nous privilégions les ch.
1-11, en raison de leur statut singulier.
Situés avant l’appel adressé par
Dieu à Abraham, avant Sa révélation à Moïse, donc le début de l’histoire humaine, ils prétendent
à l’universalité.
Sans traiter d’un peuple particulier, ils affrontent les questions que croise tout
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être ou groupe humain.
Aussi la question éducative les rencontre-t-elle, puisqu’elle traite des
conditions et enjeux de l’humanisation : la présence imposée d’autrui, la différence sexuelle,
l’origine du mal, la violence et la mort, la fonction humanisante du langage, le pardon ou la relation
à Dieu.
Elle souligne que vivre, c’est relever des défis, présentés dans le texte comme des
épreuves : celle de la relation, avec le 1 er récit de création (1,1-2,4), de l’altérité avec 2 nd récit de
création (2,5-25), de la liberté, avec le récit du premier péché (3,1-24), de la fraternité, avec du
meurtre d’Abel (4,1-16), de l’alliance, avec le récit du déluge (6,5-9,28), de la diversité, avec le
récit de la construction de la tour de Babel (11,1-9)1 .
Avant de dire ce qu’est une existence réussie, le récit affronte l’expérience quotidienne, qui se
présente d’abord comme une succession de difficultés et de rendez-vous ratés.
Il explore les
attitudes qui détériorent les relations à Dieu, à la nature et à soi, qui dégradent les rapports
entre homme et femme, entre parents et enfants, entre frères ou avec l’étranger.
Il donne une
leçon de réalisme, sans jamais oublier la nécessaire pédagogie, dont l’absence décourage celui qui
voudrait se remettre en marche et reconstruire.
Invitant le lecteur à la lucidité, il propose des
outils de réflexion pour apprendre à conduire et à construire sa vie humainement.
Face au mal
que l’on commet et que l’on subit, à la souffrance et à la mort, où et comment trouver l’envie de
vivre, de vivre avec les autres et peut-être aussi pour les autres, de donner la vie et de relever
celle de celui qui est tombé ? Et que deviennent ces questions si je pose l’existence de Dieu
Père ? Ces chapitres s’emparent de ces situations, risquant une parole qui témoigne d’une foi dans
le Seigneur et d’une confiance en un être humain responsable.
Les récits bibliques ne les aborde pas conceptuellement : on note l’absence des mots « relation »,
« liberté », « confiance », « origine », etc.
Ce choix tient le texte à distance de la démonstration
philosophique.
Ainsi celui-ci donne à penser au lecteur, sans penser à sa place.
Sans délivrer de
vérité définitive et unique, il invite à un travail d’interprétation, en faisant participer ce lecteur à
l’élaboration du sens de ce qui est raconté.
Le lecteur peut alors confronter deux récits : le
texte qu’il reçoit, et le récit qu’il se fait, plus ou moins consciemment, de sa vie, et à partir
duquel il entre dans le texte.
Ces textes n’intéressent-ils que les croyants, pour qui ces questions sont liées à une conception
de Dieu (théologie) ? Pour les chrétiens, c’est non, car l’acte de foi et la démarche
anthropologique sont deux approches distinctes.
Aussi ces textes sont-ils un lieu de rencontre
entre les personnes.
S’ils sont pour eux Parole de Dieu, ils sont aussi des paroles humaines, qui
.
L’étude des textes de Gn 1-11 doit beaucoup aux conférences et aux écrits du Professeur
André Wénin.
Qu’il soit remercié pour sa capacité à renouveler la compréhension de ces récits.
1
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n’ont pas été reçues pour être retranscrites comme un savoir définitif, mais traduisent une
expérience et une conception de l’humain et de Dieu.
À nous qui sommes arrivés à l’âge adulte, la
vie a donné des réponses et conserve des questions, semblables à celles qui, durant les 1000 ans
de rédaction des textes, ont travaillé d’autres humains.
Ce travail se propose aux acteurs des communautés éducatives, où l’on rencontre ceux qui
croient, ceux qui cherchent ou sont indifférents et comprennent la vie sans référence à une
transcendance, ceux qui sont agnostiques et athées [Simone Weil fait une remarque éclairante,
dans La pesanteur et la grâce : « Il y a deux athéismes dont l’un est purification de la notion de
Dieu »].
De plus, il existe diverses façons de croire, selon l’appartenance confessionnelle, la
pratique religieuse et le niveau d’adhésion aux dogmes.
Ce pluralisme si caractéristique de nos
communautés éducatives est favorisé par le fait que l’enseignement catholique invite à exprimer
des convictions croyantes.
Ce n’est d’ailleurs pas malgré, mais en raison des différences entre les
personnes, que l’exploration de l’anthropologie que propose le texte biblique prend tout son sens,
l’affirmation n’étant paradoxale que pour qui pense que la foi est un paquetage, une sécurité, une
assurance ou pour qui, au contraire, considère la non foi comme un manque, une amputation, un
déficit.
Notre perspective est autre, puisque le projet éducatif fondé sur l’Évangile considère le jeune et
l’adulte comme un homme ou une femme en chemin.
Ce dernier aussi, l’enseignement catholique
doit le rejoindre sur son itinéraire, lui proposer une meilleure connaissance de soi à travers la
médiation du métier.
Là opère la magie du récit, qui parle de ma situation en parlant d’autrui
vivant en d’autres temps.
En interrogeant la façon d’être engagé(e) dans l’éducation, dans
l’enseignement, il rejoint des questionnements qui en traversent l’exercice quotidien.
Il nous
invite à travailler la posture, le regard posé sur soi et les adultes, le métier et les jeunes.
Une
posture, c’est cette manière d’être, la façon de se rendre présent et de parler, qui en disent long
sur ce que l’on pense d’autrui.
Ce qui parasite un texte, ce sont les idées reçues.
C’est le cas pour le récit biblique : aussi faut-il
se réconcilier avec lui par un travail de lecture qui libère la parole, en accueillant les remarques
des participants.
La première entrée dans le récit doit être « naïve ».
En effet, peu de personnes
ont vraiment lu ces textes in extenso.
Ils les ont entendus, il y a parfois longtemps, en classe ou
en catéchèse.
Aussi, celui qui croit les connaître ne doit-il pas projeter un savoir tout fait sur
eux, mais chercher à les (re)découvrir.
À titre d’expérience, interrogeons-nous sur le fruit qu’ont
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mangé l’homme et la femme : beaucoup pensent qu’il s’agit d’une pomme.
Découvrir son absence du
récit permet de se rendre compte de la connaissance partielle et partiale qui est la nôtre.
L’enjeu d’un engagement en école catholique est d’apprendre à conjuguer l’évangile avec le
quotidien de la classe et de l’institution.
Être élève, enseignant et éducateur s’apprend.
Surtout
qu’il ne s’agit pas, dans un temps premier,....
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