Échange international et convergence des économies
Publié le 04/04/2023
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«
Échange international et convergence des économies
En octobre 2017, le président chinois Xi Jinping a été reconduit à la tête du parti communiste
chinois, ce qui le propulse presque sans aucun doute vers un nouveau mandat à la tête de son pays à
partir de mars 2018.
Depuis plusieurs années déjà, la Chine se pose en fervent défenseur de l'échange
international, ayant conscience des progrès considérables que celui-ci lui a permis de réaliser en un
temps record en terme de croissance économique, et dans une certaine mesure en terme de
développement.
Cette position chinoise est d'autant plus signifiante que, dans le même temps, des PDEM
comme les États-Unis ou la Grande-Bretagne semblent montrer des signes de remise en cause des
bienfaits des échanges internationaux, comme en témoignent l'élection de D.
Trump ou la victoire du
Brexit, alors qu'historiquement, ces pays furent la locomotive du monde développé, « la frontière
technologique » mais aussi la frontière en terme de développement humain et de modèle économique à
atteindre pour n'importe quel pays du monde.
Ainsi, tout au long du XX siècle, l'insertion et la
participation des pays à l'échange international, que l'on pourrait définir au sens large comme l'ensemble
des flux de biens et services, mais aussi de capitaux (et qui est donc une notion plus large que le simple
commerce international) qui se réalisent chaque année entre les agents résidents sur un territoire et le
reste du monde, fut présentée comme la condition nécessaire, et parfois suffisante, à la convergence des
économies, c'est-à-dire à un processus de rapprochement entre des économies dont les caractéristiques
et le niveau de développement étaient initialement différents.
Autrement dit, plus un pays était inséré
dans l'échange international, et plus il avait de chance de connaître une trajectoire de croissance et de
développement lui permettant de rattraper les économies des PDEM.
Il y aurait une sorte d'automaticité
et de naturalité de ce phénomène selon des auteurs tels que Rostow ou F.
Fukuyama, dans son livre à
succès La fin de l'histoire et le dernier homme (1992).
Toutefois, postuler un lien automatique entre participation à l'échange international et
convergence des économies vers les économies proches de la frontière technologique ne va pas de soi.
En effet, il conviendra d'affiner l'analyse.
Par exemple, échanger des biens et des services et donc
participer au commerce international peut permettre de créer une forte croissance mettant le pays sur le
chemin de la convergence.
A l’inverse, ouvrir sans limite de capitaux peut être source de déstabilisation
qui retarde cette convergence comme en témoignent les échecs des plans d'ajustements structurels du
FMI et de la Banque mondiale des années 1980-1990 dans certains PED que décrit parfaitement Stiglitz
dans La grande désillusion (2003).
La Chine est d'ailleurs le parfait exemple de pays ayant largement
participé au commerce international alors que son marché des capitaux reste encore ajd largement
contrôlé par les autorités monétaires chinoises.
Pour le dire autrement, certains traits de l’échange
international peuvent permettre la convergence des économies, alors que d'autres peuvent la retarder.
Par ailleurs, encore faut-il s'entendre sur la définition même de la notion de convergence.
Cette dernière
est-elle absolue comme le pensait Solow, c'est-à-dire destinée à arriver de manière certaine et
irréversible, selon une vision téléologique de la croissance et du développement ? La convergence seraitelle conditionnelle, c'est-à-dire se limitant à la convergence des revenus par tête des pays ayant le même
sentier de croissance équilibrée de long terme (comme pour les pays de l'OCDE) ? Ou concernerait-elle
plutôt des groupes de pays, des « clubs de convergence » selon l'expression de W.
Baumol, bénéficiant
de certaines externalités positives pour converger pendant que d'autres resteraient exclus de cette
convergence? Nous voyons bien que selon la définition retenue, les liens entre échange international et
convergence des économies ne sont pas si transparents que cela.
Mais surtout, nous nous devons
d'interroger également le sens de la causalité: en effet, si l’échange international permet une
convergence des économies, cette dernière, en retour, permet-elle aux pays de s'insérer plus facilement
dans les échanges internationaux et dans la mondialisation ? Par conséquent, quels sont les liens entre
échange international et convergence des économies : De quelles façons ces deux phénomènes se
nourrissent-ils réciproquement? De plus, une convergence globale permise par l'échange international ne
risque-t-elle pas de se faire au prix d'une divergence interne aux économies nationales de plus en plus
grande, potentiellement délétère pour la stabilité des économies des PDEM comme des PED comme le
craignent des auteurs comme F.
Bourguignon, T.
Piketty, P.-N.
Giraud ou encore B.
Milanovic ?
L’échange international a, tout d abord, favorisé historiquement la convergence et le rattrapage
des économies des PED vers les économies des PDEM.
Ensuite, il semble qu'en retour, cette convergence
des économies ait des effets, qui peuvent parfois être ambivalents, sur la dynamique des échanges
internationaux.
Enfin, échanges internationaux et convergence des économies peuvent se nourrir
réciproquement de façon pérenne et positive, si et seulement si certaines conditions sont réunies, leurs
relations de causalité bénéfiques étant loin d'être naturelles.
I.
L'échange international a historiquement favorisé la convergence et le rattrapage
des économies des PED
A.
L'échange international devrait produire une convergence théorique des économies
des pays « en retard »…
•
Le modèle de Solow (1956) fut le socle d'une théorie de la convergence économique.
Selon
l'auteur, la productivité marginale du capital étant plus élevée dans les pays en retard (les
capitaux étant plus rares), les PED devraient attirer de nombreux capitaux et ainsi connaître une
croissance rapide les rapprochant des PDEM.
Cette convergence serait, à terme, absolue pour
Solow.
•
Dans la lignée du théorème HOS, le théorème Stolper-Samuelson insiste sur la convergence du
prix des facteurs de production à l'échelle internationale.
En effet, dans chaque pays, le prix du
facteur abondant doit s'élever, puisque celui-ci est, relativement à l'autre facteur, fortement
demandé.
À l'inverse, le prix du facteur rare baisse puisqu'il est relativement délaissé.
Par
conséquent, la spécialisation productive et factorielle devrait faire converger les niveaux de
revenus et la rémunération des facteurs de production à l'échelle internationale.
•
W.
Rostow adopte quant à lui une vision téléologique lui faisant dire que le développement de
n'importe quel pays doit passer par cinq étapes majeures faisant advenir en fin de parcours une
convergence des économies.
Pour lui, l'épargne, et donc sa mobilité à l'échelle internationale sous
forme d'échanges de capitaux, peuvent pallier au déficit d'épargne intérieure de certains pays
sous-développés.
Cette épargne permettrait de financer les investissements nécessaires au
décollage facilitant la sortie du « cercle vicieux de la pauvreté », selon l'expression de R.
Nurske.
B.
...
convergence qui se vérifie sur le plan empirique ?
•
Pour Gerschenkron, l'échange international permet aux pays « suiveurs » de bénéficier de la
technologie la plus moderne sans avoir eu au préalable à supporter les coûts de leur mise en
œuvre.
Le progrès technique serait donc assimilable à une sorte de bien collectif dont pourraient
jouir ces pays suiveurs, si l’État est présent et qu'il réalise les bonnes politiques économiques
conjoncturelles et structurelles.
•
Empiriquement, au niveau mondial, les inégalités se sont réduites entre les pays depuis les
années 1990 comme le démontrent C.
Morrisson ou F.
Bourguignon dans La mondialisation de
l'inégalité (2012).
En effet, près de la moitié des pays du G20 ajd sont d'anciens pays du tiers
monde.
Les pays émergents et les BRICS connaissent des taux de croissance économique à faire
pâlir les PDEM, d'autant plus depuis la crise de 2008.
Bourguignon rappelle que depuis les années
1990, le nombre de pauvres a baissé de 500 millions d'individus.
Selon un rapport de l'OCDE de
2010 « perspectives du développement mondial », le nombre de pays riches serait passe de 34 à
40 entre 1990 et 2000, le nombre de pays convergents, de 12 à 65, le nombre de pays « à la
traîne » de 66 à 38, et le nombre de pays pauvres, de 55 à 25.
Ces quelques chiffres confirment
donc une tendance à une forme de convergence.
•
Dans la seconde moitié du XX siècle, de nombreux pays d'Europe de l'Est, d'Amérique latine mais
surtout d'Asie, sont de parfaits exemples des liens positifs pouvant exister entre insertion dans
l'échange international et convergence des économies.
Les NPI d’Asie (Corée du Sud, Chine en
tête mais aussi Taïwan, Vietnam, Cambodge etc) semblent parfaitement mettre en œuvre la
stratégie en « vol d’oies sauvages » chère à Akamatsu.
C.
A l'inverse, les stratégies de développement auto-centré ont, semble-t-il, échoué
(pour certains PMA)
•
Dans les années 1950-1960, beaucoup de pays ont opté pour des stratégies de rupture avec le
marché et l'insertion dans les échanges internationaux, tout en favorisant des stratégies de
développement auto-centré, suivant par là certaines théories néo-marxistes du commerce
international Force est de constater que ces politiques furent globalement un échec.
Tant en
terme de PIB que d'IDH, beaucoup de PMA (d'Afrique, comme le Rwanda, la Sierra Leone, le
Liberia ou Madagascar, mais également des pays socialistes) restent à l'écart de la mondialisation
et voient leur économie diverger.
Bourguignon....
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