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Consentement des interventions étatiques.

Publié le 09/02/2025

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« « Le système international est le théâtre de paradoxes profonds.

La souveraineté des Etats qui le composent est d’autant plus affirmée que l’interdépendance quotidienne est manifeste »1. Le Dictionnaire de droit international public défini l’intervention sollicitée comme l’« action de soutenir le gouvernement établi d’un État, à la suite d’un appel à l’aide pour maintenir l’ordre, pour faire face à des activités subversives ou à des activités de rebellions ou de sécession ou encore pour repousser une agression extérieure.

L’intervention sollicité est licite si elle se présente comme une application du droit de légitime défense collective.

[…] »2.

Cette définition pose deux problèmes, le premier est relatif aux termes employés, d’activités subversives, de rebellions ou de sécession, qui sont des notions ambigües, difficile à caractériser en pratique. Le second problème, provient du rattachement de l’intervention sollicité au système de défense collective, en assimilant le régime d’intervention consentie à la légitime défense.

Or ces deux notions sont distinctes, l’une étant un droit naturel consacré par la Charte des Nations unies, à l’article 51, et la seconde étant issu du droit coutumier.

La définition de l’Institut de droit internationale, dans sa résolution relative à l’assistance militaire sollicitée, nous parait plus proche de la pratique internationale, « l’assistance militaire sollicitée s’entend de l’assistance militaire directe au moyen de l’envoi de forces armées par un Etat à un autre Etat, à la demande de ce dernier ».3 Par ailleurs faut-il usé de l’expression « consentie », « sollicité » ou « d’assistance militaire » ? Pour notre part, nous considérons ces expressions comme équivoques d’un point de vue juridique, celles-ci impliquant le même régime juridique. Depuis un certain nombre d’années, plusieurs États justifient leur opération militaire sur la base légale d’un consentement étatique.

Les exemples récents ne manquent pas Syrie, Yémen, Ukraine, Mali, en Gambie etc.

Ce phénomène est le produit de plusieurs facteurs, en premier lieu, la guerre a été délégitimée et délégalisée au fil de l’histoire4.

On parle désormais de recours à la force, qui ne comprend comme exceptions, que la légitime défense individuelle et collective, ainsi qu’une autorisation du Conseil de sécurité.

Ensuite, cela tient à l’accroissement des guerres civiles dans le monde, on estime que depuis la fin de la Guerre froide, il y a quatre fois plus de guerre civile, que de guerre internationale (entendu comme la lutte entre entités politiques indépendantes5).

Par conséquent, en 2014 sur les cent quatre-vingt-treize pays représentés à l’ONU, vingt-six sont des États en faillite et cent vingt autres sont en « alerte 1 https://www.monde-diplomatique.fr/1974/12/CONSTANTIN/32777 J.

SALMON, Dictionnaire de droit international public, Bruxelles, Belgique, Bruylant, 2001, p.

611. 3 Article 1, Session de Rhodes – 2011 Sous-groupe C – Assistance militaire sollicitée, 2011, p.

3. 4 D.

BATTISTELLA, Paix et guerres au XXIe siècle, La petite bibliothèque de sciences humaines, Auxerre, Sciences humaines, 2011, p.

142. 5 Ibid., p.

17. 2 rouge »6.

D’autre part la montée en puissance des groupes armées non étatiques concurrencent désormais les gouvernements à l’intérieur de leur État.

Ceux-ci sont de plus en plus équipés, grâce à au progrès technique et à l’individualisation de la puissance de feu7.

Mais aussi en raison des financements de plus en plus important, qui permettent à des États de se faire des guerres par procuration.

C’est le cas en Syrie, où chaque camp est soutenu par des puissances étrangères, que ce soit le Hezbollah et les milices chiites, appuyés par l’Iran ou les groupes rebelles sunnites, appuyés par les pays de golfe et la Turquies.

A l’heure de la mondialisation, de la remise en cause des frontières, le consentement des interventions militaires questionne le modèle d’État-nation. Déjà en 1991, Martin Van Creveld, prévoyait la fin du monopole de la violence étatique, susceptible d’entrainer de la fin de la distinction traditionnelle gouvernement-arméepopulation8.

Il ajoutait les guerres ne seraient plus le fait des armées, mais celui des groupes, questionnant l’efficacité militaire de l’État moderne, et donc son existence9. La revue stratégique de défense justifiait ses interventions par « la contraction de l’espace géopolitique, résultat de l’accroissement des interdépendances, facilite la propagation rapide des effets des crises, même lointaines, jusque sur le continent européen, plaçant ses pays et ses populations au contact direct des tensions de toute nature »10.

Pourtant si un ou plusieurs États ont la capacité d’intervenir pour assister un ou plusieurs autres États, cela est bien la preuve de son efficacité militaire, ou au moins de capacité de projection et de réponse à une ou plusieurs menaces identifiées. L’intervention consentie de ce point de vue, fait l’objet de plusieurs paradoxes.

Elle est à la fois caractéristique de la fragilisation du modèle de l’État-nation, étant donné que si un État sollicite un autre, pour maintenir l’ordre, c’est qu’il ne maitrise pas pleinement et entièrement ses pouvoirs régaliens.

D’un autre côté, sa capacité à pouvoir faire appel à un autre État, est la preuve de son existence et l’affirmation de sa souveraineté.

Cela entendu que le gouvernement demandant une assistance militaire ne fasse lui-même l’objet de pression de la part d’un État tiers.

Cette question est centrale, à l’heure où l’État est interconnecté dans un « nœud de réseaux », la décision d’un gouvernement doit prendre en compte une multitude d’informations 6 P.

SERVENT, Extension du domaine de la guerre, Paris, France, Perrin, 2017, p.

23. J.

HENROTIN, « Techno-guérillas - Anatomie de l’ennemi probable.

DSI HS N° 64 », Areion Group, mars 2019, pp.

8‑9. 8 J.

COLIN et L.

POIRIER, Les Transformations de la guerre, Bibliothèque stratégique, Paris, Économica, 1989, p. 245. 9 Ibid., pp.

251‑252. 10 MINISTERE DES ARMEES, Revue stratégique de défense et de sécurité nationale, 2017, § 23. 7 et d’obligations11.

L’avènement du libre-échange et la dépendance économique des pays émergents à l’égard des pays du nord, l’ingérence institutionnelle, de la surveillance des élections à celles des politiques économiques, font du consentement un processus complexe12. C’est donc un autre paradoxe d’une intervention consentie, elle fait à la fois office de décision étatique, tout en laissant planer un doute sur la capacité d’émettre librement un consentement à une intervention militaire étrangère.

Si son régime juridique interagis de plus en plus avec le système de sécurité collective, comme nous le verrons plus en détails, il n’en reste pas moins étranger.

Le régime des interventions consenties est de source coutumière.

Or la coutume.... »

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