Commentaire de texte : Extrait du discours de Barack OBAMA prononcé le 18 mars 2008 à Philadelphie – « De la race en Amérique »
Publié le 05/08/2012
Extrait du document
e retour sur l´histoire et sa compréhension en appelle à une union perçue comme une réconciliation avec le passé. Ce discours par son universalisme concerne alors tout le monde et sonne comme le signe d’un ralliement plus concret : celui de l’appel aux urnes derrière un même projet et accessoirement un même candidat. Car rappelons-le, si ce discours émeut, étant donné qu’il se trouve dans un processus électoral, il a pour but essentiel de convaincre le maximum de gens à voter pour Obama, ce qui peut expliquer avant tout la volonté de ne vouloir mettre en avant aucun groupe racial ni aucune classe sociale et d’essayer que chaque personne puisse s’y reconnaître. Obama apparait alors comme un symbole de réunion : il sert intermédiaire entre les 2 races, il permet une certaine transition entre un passé parfois honteux et un futur qui se veut meilleur. Il est aussi l’emblème de l’arrêt immédiat d’une politique qui a usé à bien des niveaux, les Américains pendant huit ans. Barack Obama est donc par de nombreux aspects dépassant là aussi, la simple question raciale, le symbole de la promesse d’un changement singulier qui n’est pas non plus uniquement centré sur la volonté d’un consensus.
«
aurait tenu des propos anti-Blancs, antiaméricains.
En effet, des sermons du Révérend Wright, ancien pasteur et ami de Barack Obama, ont été largement diffusésdans les médias et on peut ainsi le voir appeler à maudire l'Amérique mettant en avant les discriminations raciales.
L'opinion est troublée.
On sent que la campagnepeut basculer.
De plus, une proche d'Hillary Clinton vient de déclarer que Barack Obama ne serait pas là s'il avait été « blanc ou une femme ».
Subitement, lacampagne vient ainsi de se centrer sur la question raciale.
C´est dans ce contexte que devant le Centre national de la Constitution, près du Centre de la Cloche de la Liberté et devant un parterre de journalistes venus dumonde entier, que Barack Obama prononce une allocution d'une quarantaine de minutes, qu'il a longuement préparée.
Alors qu´aucun homme politique américainn'a tenu un discours centré sur la question raciale depuis une soixantaine d'années, le futur candidat démocrate prend de la hauteur et propose de dépasser les termesclassiques du débat racial aux Etats-Unis.
Tournant le dos aux clivages entre Noirs et Blancs, il propose une vision de l'unité américaine post-raciale.
Il puise sesconvictions dans son ascendance.
En effet, comme il le rappelle dans la première partie de son discours (qui ne fait pas partie de l´extrait proposé), Barack Obama néen 1961 à Hawaï, est issu d'un père kenyan et d'une mère américaine.
A l'heure de ce discours, le problème racial aux Etats-Unis n´apparait pour beaucoup comme n´étant toujours pas réellement résolu.
En effet, si les progrès qui ont étéfaits sont indéniables, il existe toujours des disparités et des ressentiments qui se font sentir.
Dans l´extrait qui nous est proposé, ne représentant qu´un court extrait dudiscours tenu ce jour là, le futur Président porte un regard sur le passé, revenant longuement sur ce qui lui parait être les explications d´une colère noire qu´il décritcomme « réelle » et « puissante », et surtout « similaire » dans son intensité à celle ressentie par la communauté blanche.
Fort de cette analyse historique, il en dégagece qui lui semble être les changements nécessaires que l'Amérique doit faire sur la conception de la race.
Le lendemain, la presse du monde entier salue ce discourshistorique, aujourd´hui traduit et publié dans plusieurs langues.
Nombreuses sont les comparaisons de ce discours à celui du célèbre « I have a dream » de MartinLuther King.
Tout comme lui d'ailleurs, Obama obtiendra le prix Nobel de la paix, peu de temps après avoir été élu 44ème président des Etats-Unis, devenant ainsi,événement historique, le premier président de couleur sur cette terre à l'histoire « racialement » chargée.
Nous allons voir à la lumière de cet extrait comment Barack Obama aborde la question des rapports entre communautés raciales aux Etats-Unis et donne saconception de l'identité nationale américaine.
Est-il possible de dégager un aspect novateur dans ce discours ? Redéfinie-t-il la notion de race aux Etats-Unis commecertains l´analysent ou n´est-ce qu´un simple appel aux urnes, frôlant le populisme ? C´est par une approche rationnelle et historique de la construction de la questionraciale (I) que le futur Président prêche un discours d´union porté sur l´avenir (II), en dessinant les contours d´une approche de l´identité américaine unie dans sesdifférences, mais surtout décomplexée quant à son passé, et à la portée universelle.
I) Un discours rationnel, aux fondements historiques
Dans cet extrait, Barack Obama dénonce le fait que certains trouvent encore aujourd´hui des intérêts à jouer sur les passions suscitées par la question raciale, mettantainsi en danger l´unité de la Nation (A).
Il s'emploie également à montrer que les peurs et les colères sont légitimes à la fois de la part de la communauté noire maiségalement du côté de la communauté blanche, mais surtout que ces peurs et colères se fondent sur des causes rationnelles issues d'une histoire parfois injuste, plutôtque sur des préjugés racistes infondés (B).
A) Une dénonciation de l´hypocrisie face aux clivages des communautés et de l´instrumentalisation du sujet
Barack Obama met en avant le fait que la question raciale reste omniprésente dans la vie quotidienne de la plupart des Américains et qu'elle constitue même unematrice dans la construction des opinions personnelles (« les questions de race et de racisme continuent de définir fondamentalement leur vision du monde »).
Il faitremarquer qu'il s'agit d'un sujet politiquement incorrect, véritable tabou.
Il dénonce « les débats légitimes sur les injustices et les inégalités raciales » traités comme« du politiquement correct ou du racisme à rebours ».
Ou bien encore une « colère ne s'exprime pas en public ».
Le résultat est une hypocrisie quant au problèmeracial.
Le sujet déterminant les rapports sociaux au sein de la Nation américaine n'est finalement abordé qu'au sein de la sphère privée (« chez le coiffeur ou autour dela table familiale »).
Ceci permet de mieux comprendre les raisons d'un tel débat après la publicisation des sermons du Rév.
Wright.
Grâce à ce discours, BarackObama veut saisir l'occasion pour mettre la question sur la place publique et en finir avec cette hypocrisie de la société américaine.
Il est néanmoins intéressant de rappeler que dans le contexte de la campagne, ce discours sur la « race » est l´unique et le seul qu´a fait le candidat Obama sur lesujet.
Présenté dans cet exemple comme un sujet « définissant la vision du monde » d´un citoyen américain, il n´est pas sans intérêt de rappeler que les sujetsprimordiaux défendus par Obama n´étaient autre que l´Economie et la réponse à la crise financière et économique, la gestion des conflits Irakien et Afghan, laquestion sociale, le terrorisme, la crise du système de santé, le changement climatique.Il dénonce ici l'instrumentalisation de la division raciale qui agit comme un fléau pour l'idée de Nation.
Barack Obama critique le comportement des hommespolitiques, des journalistes ou des responsables religieux qui jouent des sentiments suscités par la différence raciale pour poursuivre des buts essentiellement lucratifs.« Les présentateurs des talkshows et les analystes conservateurs se sont bâtis des carrières en débusquant des accusations de racisme bidon ».
Il accuse également lesstratégies identitaires ou communautaires consistant à se définir par opposition à l'autre, à ce qui est différent, ces stratégies aboutissant à un renfermement progressifsur soi-même « on leur dit que… ».
Enfin, il met en garde contre la tendance à la victimisation fortement improductive.
Cette attitude observée par des Noirs commedes Blancs consiste à refuser d'assumer leur responsabilité et à expliquer leurs échecs personnels uniquement par le poids des discriminations positives ou négativessuscitées par la question raciale.
Tout ceci amène certains à attiser la tension raciale et à jouer sur les divisions afin de servir leurs intérêts sans prendre garde à lafragilisation de la cohésion nationale que cela crée.
Selon le candidat, il faut aller plus loin dans l'analyse pour rompre avec l'immobilisme qui laisse perdurer unmécanisme déjà en place de séparation des communautés.
Et surtout, ne pas fermer les yeux sur ce qu´il voit comme les véritables responsables d´une société auxinégalités exacerbées : « l'emprise des lobbies et des groupes de pression, une politique économique au service d'une minorité de privilégiés ».
Afin de ne pas tomberdans le piège du rejet de l´autre, il est selon lui indispensable de se pencher sur l´histoire car c´est « cette histoire qui explique les disparités ».
Il refuse de« condamner sans en comprendre », d´où l´aspect rationnel et historique de ce discours.
B) La question raciale démystifiée et rationalisée : l´histoire comme grille de lecture de la situation contemporaine
Le candidat s´attache dans le début de son discours (extrait non soumis) à rappeler que bien que les grands textes fondateurs des Etats-Unis, et en premier lieu laConstitution, expriment un idéal d'égalité dans la définition de l'identité américaine, une contradiction a toujours existé dans la conception de l'identité nationalebasée en partie sur l'idée de race (il illustre alors l'exclusion raciale dans l'esclavage puis la ségrégation).
Dans l´extrait qui nous est proposé, il ne revient que sur lesfaits du fin XIXème, XXème et XXIème siècle, faisant références aux « inégalités transmises par la génération précédente qui a souffert de l'héritage brutal del'esclavage et de Jim Crow ».
En effet, instaurées en 1876, les lois dites Jim Crow créent un nouvel ordre social dans le sud des Etats-Unis : la ségrégation raciale.
Cetexte intervient pour hiérarchiser et réorganiser la société sudiste après l'abolition de l'esclavage et la guerre de Sécession.
Dès lors, le système ségrégationnisteremplace le système esclavagiste.
La majorité des lois Jim Crow resteront en vigueur jusqu'au vote du Civil Rights Act en 1964.Il cite le fameux arrêt rendu par la cour suprême “Brown vs.
The Board of Education” , considéré a posteriori comme la première grande victoire du mouvementpour les droits civiques.
Au Kansas, en 1951, la jeune Linda Brown se voit refuser l'inscription dans une école blanche de son quartier.
Son père rassemble d'autresparents d'élèves et intente une class action, une plainte en nom collectif, contre l'administration.
Il obtient le soutien de la NAACP (The National Association for the.
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