1995: Politique internationale
Publié le 06/12/2018
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LA TENTATION DU REPLI
Tandis que l’adhésion de trois nouveaux États (l’Autriche, la Finlande et la Suède) à l’Union européenne inaugure l’année 1995, la première crise de la mondialisation économique déclenchée un mois plus tôt se développe outre-Atlantique, au Mexique. Un ébranlement passé quelque peu inaperçu, qui menace pourtant l’équilibre des marchés monétaires mondiaux et, surtout, est directement lié à l’intégration à marche forcée d’un pays à la situation économique encore fragile au sein de l’ALENA, la première zone commerciale du monde.
MÉFIANCE DES PEUPLES, HÉSITATION
DES GOUVERNANTS FACE À L'INTERNATIONALISATION
La « globalisation » ou l’interpénétration des places financières, tendance dominante de cette fin de siècle, ne s’opère pas sans heurts, et elle exige des États qu’ils se départissent de nombre de leurs compétences. Dès lors, en échange de l’aide de la communauté internationale, en particulier des États-Unis, le Mexique, qui connaît l’une de ses plus graves crises politiques et sociales avec la révolte des Indiens du Chiapas, est mis sous tutelle. C’est ainsi que, privés d’un de leurs pouvoirs régaliens - la politique monétaire est désormais confiée à des organismes de plus en plus indépendants (banques centrales), ou supranationaux (Institut monétaire européen, FMI ou Banque mondiale) -, les gouvernements se soumettent aux mécanismes d’un marché désincarné, source de développement, certes, mais de plus en plus
puissant et de plus en plus autonome. La chute du peso en est l’un des révélateurs ; la politique (certains parlent de « dictature ») des taux d’intérêt en est un autre, qui trahit T affaiblissement considérable de la souveraineté des États. Ainsi, en France, le gouvernement Juppé se voit contraint d’abandonner les promesses faites pendant la campagne électorale de Jacques Chirac et amorcer un revirement radical afin de respecter ses engagements européens, provoquant inquiétude et révolte. L’Europe de Maastricht est par ailleurs devenue le principal sujet de litige au sein des partis et entre certains Etats membres, ainsi qu'un repoussoir pour quelques forces politiques, de gauche comme de droite. Même si la plupart des gouvernants jugent irréversible cette intégration « par le haut » des vieilles nations européennes, les critères dits « de convergence » semblent de plus en plus difficiles à respecter, si bien qu’une Europe « à deux vitesses », avec un noyau dur constitué autour de l’Allemagne, est envisagée, tandis que l’échéance prévue pour l’entrée en vigueur de la monnaie unique (l'euro) laisse d’aucuns sceptiques, au premier chef les industriels et les financiers. Quelques mois à peine après leur adhésion à l’Union européenne, la Suède, la Finlande et l’Autriche sont gagnées par l'« euroscepticisme », de même que certains pays du Sud telle l’Espagne, alors que les anciennes démocraties populaires se pressent aux portes de Bruxelles. Toutefois, les pays d’Europe de l’Est tentent de s’arrimer - économiquement mais aussi militairement - à l’Ouest, mais leurs citoyens n’entendent pas y parvenir au prix d’une libéralisation sauvage. Ainsi, les ex-communistes l'emportent parfois. Le cas de la Pologne, qui connaît le plus fort taux de
croissance en Europe, est particulièrement frappant, même si d’autres raisons que la situation sociale (l’autoritarisme de Lech Walesa et les ingérences de l’Eglise dans la vie sociale) expliquent ce tournant. On y observe, en tout cas, le même divorce entre gouvernants et gouvernés que dans les pays plus développés. A l’Est, l’intégration se heurte finalement aux mêmes obstacles que dans les pays occidentaux. La réforme des systèmes de protection sociale, qui constitue le grand chantier des prochaines années, en est le noeud gordien. La France est, de ce point de vue, le premier État à en avoir fait l’expérience. En Russie, la même tendance se fait jour et les restructurations économiques auront peut-être raison de Boris Eltsine, un président de plus en plus tenté de céder aux pressions des conservateurs et des nationalistes, grands vainqueurs des élections législatives de la fin de l’année. Moscou semble désormais définir comme priorités le maintien de l’intégrité territoriale de la Fédération - quitte à soumettre par les armes la Répu-
blique indépendantiste de Tchétchénie - et le contrôle de son « étranger proche », en soutenant, par exemple, le gouvernement procommuniste vacillant du Tadjikistan. La Russie reste ainsi tiraillée entre la volonté d’insertion au sein du monde développé (qui supposerait la poursuite des réformes) et la tentation du repli : elle oppose son veto catégorique à l’adhésion de ses anciens satellites à l’OTAN, émet des réserves face à l’élargissement de l’Union européenne, revient sur ses engagements en matière de désarmement.
Ces hésitations et ces craintes face à une intégration qui lierait par trop les États aux décisions d’instances supranationales difficilement contrôlables se manifestent dans d’autres régions du globe : en Asie, où l’APEC, censée resserrer les liens entre les pays d’Asie-Pacifique, a finalement opté pour une association souple (et rejeté, par la même occasion, les propositions américaines d’une extension de son intervention au domaine de la défense) ; en Afrique, où des tendances protectionnistes et isolationnistes apparaissent ; au Maghreb, où l’Union du Maghreb arabe (UMA) donne des signes d’essoufflement. L’initiative « euroméditerranéenne » qui vise à créer une vaste zone de libre-échange n’apporte qu’une réponse économique, alors que l’accord de Schengen, c’est-à-dire la libre circulation des personnes à l’intérieur d’un espace européen « verrouillé », entre en vigueur. « Mondialisation », « globalisation », « intégration », « déréglementation » : autant de termes pour désigner une réalité fluide, une « circulation » des denrées, des informations, des valeurs (monétaires) et une passa tion de pouvoirs qui se heurte encore à quelques résistances dont certaines sont essentiellement culturelles.
On a ainsi beaucoup insisté sur les replis identitaires qui traversent les nations. Les mouvements islamistes se sont multipliés mais ils ne se sont pas structurés sur une base internationale afin de combattre les gouvernements en place. Cette mouvance reste hétéroclite. Outre le fait que s’y opposent deux tendances, l’une modérée, l’autre radicale, la plupart de ces mouvements agissent dans le cadre de leurs nations respectives:
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Même si la plupart des gouvernants
jugent irréversible cette intégration « par le
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critères dits « de convergence » semblent de
plus en plus difficiles à respecter, si bien
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noyau dur constitué autour de l'Allemagne,
est envisagée, tandis que l'échéance prévue
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unique (l'euro) laisse d'aucuns sceptiques, au
premier chef les industriels et les financiers.
Quelques mois à peine après leur adhésion à
l'Union européenne, la Suède, la Finlande et
l'Autriche sont gagnées par 1'« euroscepticis
me »,de même que certains pays du Sud telle
l'Espagne, alors que les anciennes démocra
ties populaires se pressent aux portes de
Bruxelles.
Toutefois, les pays d'Europe de
l'Est tentent de s'arrimer -économiquement
mais aussi militairement -à J'Ouest, mais
leurs citoyens n'entendent pas y parvenir au
prix d'une libéralisation sauvage.
Ainsi, les
ex-communistes l'emportent parfois.
Le cas
de la Pologne, qui connaît le plus fort taux de
croissance en Europe, est particulièrement
frappant, même si d'autres raisons que la
situation sociale (l'autoritarisme de Lech
Walesa et les ingérences de l'Église dans la
vie sociale) expliquent ce tournant.
On y
observe, en tout cas, le même divorce entre
gouvernants et gouvernés que dans les pays
plus développés.
À l'Est, l'intégration se
heurte finalement aux mêmes obstacles que
dans les pays occidentaux.
La réforme des
systèmes de protection sociale, qui constitue
Je grand chantier des prochaines années, en
est le nœud gordien.
La France est, de ce
point de vue, le premier État à en avoir fait
l'expérience.
En Russie, la même tendance se
fait jour et les restructurations économjques
auront peut-être raison de Boris Eltsine, un
président de plus en plus tenté de céder aux
pressions des conservateurs et des nationa
listes, grands vainqueurs des élections légis
latives de la fin de l'année.
Moscou semble
désormais définir comme priorités le main
tien de l'intégrité territoriale de la Fédération
- quitte à soumettre par les armes la Répu- blique
indépendantiste de Tchétchénie -et le
contrôle de son «étranger proche», en soute
nant, par exemple, le gouvernement procom
muniste vacillant du Tadjikistan.
La Russie
reste ainsi tiraillée entre la volonté d'insertion
au sein du monde développé (qui supposerait
la poursuite des réformes) et la tentation du
repli : elle oppose son veto catégorique à
l'adhésion de ses anciens satellites à l'OTAN,
émet des réserves face à l'élargissement de
J'Union européenne, revient sur ses engage
ments en matière de désarmement.
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Ces hésitations et ces craintes face à une
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d'autres régions du globe : en Asie, où
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la défense) ; en Afrique, où des tendances
protectionnistes et isolationnistes apparais
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arabe (UMA) donne des signes d'essouffle
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L'initiative « euroméditerranéenne »
qui vise à créer une vaste zone de libre-échan
ge n'apporte qu'une réponse économique,
alors que l'accord de Schengen, c'est-à-dire
la libre circulation des personnes à l'intérieur
d'un espace européen «verrouillé », entre en
vigueur.
« Mondialisation »,« globalisation »,
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