1995: L'élection présidentielle en France
Publié le 06/12/2018
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vote, il a été devancé, contre toute attente, de près de trois points par Lionel Jospin. Ensuite, parce que la majorité sur laquelle il s’appuie est trop divisée pour que son succès soit porteur d’une dynamique : à l'amertume des « balladu-riens » s’ajoutent les ambitions rivales et les idées divergentes de ses trois principaux « lieutenants », Alain Juppé, Philippe Séguin et Alain Madelin. En dépit du ralliement de la majeure partie des électeurs ayant voté au premier tour pour Édouard Balladur, le nouveau président de la République n’apparaît pas comme le rassembleur qu’il aurait souhaité être. Si, parmi certaines catégories sociales plutôt acquises à la gauche (les jeunes, les employés, voire les ouvriers), il obtient, selon une enquête BVA, de bons résultats, il reste, pour l’essentiel, l’élu du « peuple de droite ».
Le « peuple de gauche », qui s’était reconnu naguère en François Mitterrand, a, pour sa part, trouvé en Lionel Jospin
L'élection présidentielle des 23 avril et 7 mai 1995 a permis aux gaullistes de reconquérir l'Elysée, vingt et un ans après la mort de Georges Pompidou et l'échec de Jacques Chaban-Delmas face à Valéry Giscard d’Estaing.
Sous le signe du « changement », Jacques Chirac a devancé le Premier ministre sortant, Edouard Balladur, au premier tour, et le candidat socialiste Lionel Jospin, au second. La gauche a obtenu un résultat supérieur à ses espérances, tandis que le Front national réalisait, pour sa part, le meilleur score de son histoire.
«
-
94
politique française
Les sondages
dans la campagne
de
l'élection présidentielle
Jamais campagne électorale n'aura été autant dominée par les sondages
que celle de l'élection présidentielle de 1995.
Acteurs et observateurs politiques ont vécu au rythme des intentions de vote.
Particulièrement nombreuses, conformément
à la passion française pour ces enquêtes, elles ont aussi, et surtout,
fortement influencé la compétition électorale.
Dans un premier temps, Édouard Balladur en a été le principal bénéficiaire.
Jacques Chirac a ensuite effectué une spectaculaire remontée
dans les enquêtes d'opinion.
Enfin, la sous-évaluation du score de Lionel Jospin a provoqué
une vive polémique au soir du premier tour.
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L'évolution des sondages
selon Plantu.
1 1 n'est pas exagéré d'affirmer qu'Édouard
Balladur s'est porté candidat à l'élection
présidentielle parce que les sondages lui
étaient favorables plusieurs mois avant le
scrutin.
La cote de popularité du Premier
ministre, nommé en mars 1993,
est longtemps
restée très élevée, phénomène remarquable
dans une période de crise économique.
Dans
les intentions de vote mesurées en 1994, il dis
tançait largement Jacques Chirac, le fondateur
et chef de file du RPR.
Balladur obtenait alors gauche
semblait avoir très peu de chances de
participer au second tour.
Le paysage électoral
n'avait jamais subi
un bouleversement
d'une telle ampleur le
soutien du cœur
de l'électorat de
droite (catholiques
pratiquants, non
salariés, personnes
âgées), tout en
séduisant une frac
tion déci si v.e du La
conviction, largement répandue dans le
>, que Balladur allait passer
sans difficulté de l'Hôtel Matignon à l'Elysée
n'a pas été sans conséquences sur les rallie
ments des uns et des autres.
Les sondages
confortaient tous ceux qui se prononçaient en
sa faveur : ils misaient sur le favori.
Aussi
Jacques Chirac s'est-il retrouvé bien isolé au
tout début de l'année 1995.
À ce moment-là,
sondeurs et commentateurs ont souvent péché
par excès de confiance en observant les inten
tions de vote.
Ils ont eu tendance à oublier
qu'elles prennent leur véritable sens seulement
lorsque la campagne bat son plein et que
l'électorat commence à se poser réellement la
question du choix.
Il n'en a été ainsi que dans
la deuxième semaine de février, au cours de
laquelle, à la surprise générale, les courbes se
sont brusquement inversées.
Les intentions de
vote en faveur de Balladur s'effondraient, alors
que celles pour Chirac connaissaient une nette
progression.
Selon tous les baromètres, le Pre
mier ministre se faisait devancer par le maire
de Paris.
Jamais, de mémoire de sondeur, le
paysage préélectoral n'avait subi un boulever
sement d'une telle ampleur et d'une telle rapi
dité.
D'ailleurs, ce phénomène n'a pas manqué
de susciter des débats animés chez les polito
logues.
Certains analystes ont privilégié l'hy
pothèse d'un changement conjoncturel : Balla-
centre.
C'est ainsi que Jérôme Jaffré, analy
sant l'état des forces à trois mois et demi
du premier tour de scrutin, signait, dans le
Monde du 12 janvier 1995, un article présen
tant la victoire présidentielle du chef du gou
vernement comme quasi inéluctable : >, concluait le
directeur des études politiques de la SOFRES.
À la mi-janvier 1995, Balladur l'emportait
dans seize des dix-sept hypothèses de candida
tures testées par les différents instituts.
La dur
aurait été victime d'u1e fâcheuse coïnci
dence d'événements défavorables, telles les
affaires Schuller-Maréchal et Carignan, et la
mobilisation des jeunes contre le contrat d'in
sertion professionnelle (CIP).
D'autres ont mis
l'accent sur les handicaps du Premier ministre :
la pauvreté de son programme ou l'insuffisan
ce de son engagement sur le terrain.
Cette
inversion de tendance a constitué une étape
décisive dans la campagne.
En effet, apparais
sant désormais comme le favori, Chirac a
cessé de bénéficier de la > réservée au probable perdant.
Après
s'être lancé tardivement dans la course à l'Ély
sée, Lionel Jospin a réussi progressivement à
s'imposer comme candidé.t virtuel au second
tour.
Toutefois, en musclant sa campagne,
Édouard Balladur a laissé planer jusqu'au der
nier moment un doute quant à l'identité des
deux finalistes.
Or cette incertitude a vraisem
blablement joué un rôle dans la détermination
de certains électeurs.
Les résultats du
premier tour vont infliger
un démenti flagrant aux sondages.
Les der
nières enquêtes diffùsées, mais également
celles interdites de publication, car réalisées
pendant la dernière semaine, classaient Chirac
en tête, suivi de Jospin, puis de Balladur.
Et
voici que, le 23 avril au soir, le candidat socia
liste décroche la première place.
Hommes
politiques et journalistes sont alors plusieurs à
crier haro sur les sondage,, les responsables et
les partisans des enquêtes d'opinion rétorquant
que de nombreux électeurs ont sans doute
changé d'avis au dernier moment ...
en réagis
sant notamment aux dernières estimations.
Il
n'en demeure pas moins que certaines erreurs
de mesure -comme la sous-estimation systé
matique de l'influence de Jospin -sont révéla
trices des limites de l'instrument.
Les sondeurs
devront sans doute tirer de l'expérience de
l'élection présidentielle de 1995 une leçon de
modestie.
Éric DUPIN
L'ÉVOLUTION
DES INTENTIONS DE VOTE SELON L'INSTITUT BVA
Enquête du 19 au 23 janvier 1995 :
Balladur 31,5 %,
Chirac 20 %,
Jospin 15,5 %.
Enquête
du 17 au 20 février :
Balladur 21 %,
Chirac 21 %,
Jospin 22 %.
Enquête du
2 au S mars :
Balladur 18 %,
Chirac 24,5 %, Jospin 20%.
Dernière enquête publiéé (réalisée du
12 au
14 avril) :Balladur 16 %,
Chirac 26%,
Jospin 19 %.
Dernière enquête réaliséé (le 22 avril)
: Balladur 15,5 %,
Chirac 24,5 %,
Jospin 20 %.
Résultats du premier tour :
Balladur 18,58 %,
Chirac 20,84%,
Jospin 23,30%..
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