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Zola: La Curée - Chapitre VI

Publié le 09/10/2010

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Elle s'aperçut dans la haute glace de l'armoire. Elle s'approcha, étonnée de se voir, oubliant son mari, oubliant Maxime, toute préoccupée par l'étrange femme qu'elle avait devant elle. La folie montait. Ses cheveux jaunes, relevés sur les tempes et sur la nuque, lui parurent une nudité, une obscénité. La ride de son front se creusait si profondément, qu'elle mettait une barre sombre au-dessus des yeux, la meurtrissure mince et bleuâtre d'un coup de fouet. Qui donc l'avait marquée ainsi? Son mari n'avait pas levé la main, pourtant. Et ses lèvres l'étonnaient par leur pâleur, ses yeux de myope lui semblaient morts. Comme elle était vieille ! Elle pencha le front, et quand elle se vit dans son maillot, dans sa légère blouse de gaze, elle se contempla, les cils baissés, avec des rougeurs subites. Qui l'avait mise nue? Que faisait-elle dans ce débraillé de fille qui se découvre jusqu'au ventre? Elle ne savait plus. Elle regardait ses cuisses que le maillot arrondissait, ses hanches dont elle suivait les lignes souples sous la gaze, son buste largement ouvert; et elle avait honte d'elle, et un mépris de sa chair l'emplissait d'une colère sourde contre ceux qui la laissaient ainsi, avec de simples cercles d'or aux chevilles et aux poignets pour lui cacher la peau.

La Curée raconte les agiotages auxquels la transformation de Paris a donné lieu sous le Second Empire: on creuse de nouvelles artères, on détruit des quartiers entiers pour les reconstruire, et les spéculateurs s'en donnent à cœur joie. C'est le cas de Saccart, homme froid, uniquement intéressé par l'argent. Renée, sa jeune femme, a une aventure avec le propre fils de Saccart; dans cet extrait, ils viennent d'être surpris par lui, mais rien ne s'est passé: le père et le fils sont partis sans un mot.

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