Y a-t-il quelque chose que l'expérience ne puisse pas nous apprendre ?

espace euclidien) et n'ont été élaborées que par calcul, c'est-à-dire par un travail purement rationnel ; d'autre part, la multiplication des temporalités concevables — tant du point de vue de la science contemporaine que dans d'autres cultures que la nôtre — montre que le temps est pensé indépendam­ment de l'expérience sensible (sinon, il faudrait admettre que tous les hommes ne sont pas dotés des mêmes sensations et font donc des expé­riences hétérogènes).

Sans doute une théorie a priori (mathématisée) doit-clic être vérifiée expérimentalement pour être reconnue comme scientifique, ainsi que le dit Popper, mais la connaissance actuelle avance en inversant le processus admis par les empiristes : c'est désormais parce qu'il y a d'abord un travail a priori que l'expérience finit par nous apprendre quelque chose ; sans cet a priori, l'expérience — d'ailleurs devenue d'une complexité qui n'a plus rien de commun avec la simple perception — serait incapable de nous apprendre scientifiquement quoi que ce soit. L'expérience est ainsi guidée et orientée par une activité qui ne dépend pas d'elle.

Il n'empêche que l'expérience peut continuer à nous apprendre ce qui est nécessaire à notre vie quotidienne : on ne fait, en disant cela, que constater l'écart de plus en plus prononcé qui existe entre les besoins d'une pratique ordinaire et les avancées des savoirs scientifiques.