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Willard Quine

Publié le 22/02/2012

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De quelques principes philosophiques de Quine : sciences de la nature et logique extensionnelle.    Les thèses de Quine s'enchaînent et se soutiennent mutuellement, sans pour autant prétendre former un système exclusif et définitif. Il faut résister à l'idée d'en donner une " axiomatisation " unique, dans la mesure où Quine a insisté sur la souplesse des théories, qui peuvent se réadapter et se réorganiser suivant les besoins. Sa philosophie est en effet semblable à la démarche scientifique qu'elle décrit : les principes y jouent un rôle régulateur qui doit être mis à l'épreuve de la pratique des sciences et des ressources du langage.    Le premier principe est donc épistémologique : il s'agit du naturalisme, selon lequel les sciences de la nature sont le modèle de toute connaissance. Il faut préciser que ces sciences nous apprennent à observer et à raisonner mais autorisent aussi des révisions profondes de tout notre savoir si l'expérience le réclame ­ y compris, en dernier ressort, des principes logiques qui ont conditionné la possibilité de l'expérience. Ce naturalisme est empiriste, puisque l'observation dépend des séries de stimuli sensoriels, mais non-dogmatique puisqu'il peut se corriger et se réinterpréter. Cette attention aux détails du progrès scientifique est un complément indispensable au formalisme logique.    Le second principe est un critère logique, à la fois de ce qui peut avoir un sens (la sémantique) et de ce qu'on peut ou doit admettre comme existant (l'ontologie). Le premier degré du critère consiste dans le slogan : " Pas d'entité sans identité ". Cette condition est loin d'être triviale : toute " entité " dont on ne peut dire à quoi elle est identique ou de quoi elle diffère est donc une " pseudo-entité " vague, elle est entachée d'un flou irrémédiable qui doit l'exclure d'une saine ontologie. L'identité doit se comprendre sur un strict modèle extensionnel. La logique oppose dans le concept son extension et son intention. La première enveloppe la totalité des individus tombant sous le concept, la seconde comprend les propriétés ou caractères qui déterminent si un individu tombe ou non sous le concept. En termes plus modernes de théorie des ensembles, l'extension d'un ensemble est la totalité de ses membres alors que son intention le définit abstraitement. En linguistique, l'extension serait la référence et l'intention la signification.   

« De quelques principes philosophiques de Quine : sciences de la nature et logique extensionnelle.

Les thèses de Quine s'enchaînent et se soutiennent mutuellement, sans pour autant prétendre former un systèmeexclusif et définitif.

Il faut résister à l'idée d'en donner une “ axiomatisation ” unique, dans la mesure où Quine ainsisté sur la souplesse des théories, qui peuvent se réadapter et se réorganiser suivant les besoins.

Sa philosophieest en effet semblable à la démarche scientifique qu'elle décrit : les principes y jouent un rôle régulateur qui doitêtre mis à l'épreuve de la pratique des sciences et des ressources du langage.

Le premier principe est donc épistémologique : il s'agit du naturalisme , selon lequel les sciences de la nature sont le modèle de toute connaissance.

Il faut préciser que ces sciences nous apprennent à observer et à raisonner maisautorisent aussi des révisions profondes de tout notre savoir si l'expérience le réclame y compris, en dernierressort, des principes logiques qui ont conditionné la possibilité de l'expérience.

Ce naturalisme est empiriste,puisque l'observation dépend des séries de stimuli sensoriels, mais non-dogmatique puisqu'il peut se corriger et se réinterpréter.

Cette attention aux détails du progrès scientifique est un complément indispensable au formalismelogique.

Le second principe est un critère logique, à la fois de ce qui peut avoir un sens (la sémantique) et de ce qu'on peutou doit admettre comme existant (l'ontologie).

Le premier degré du critère consiste dans le slogan : “ Pas d'entitésans identité ”.

Cette condition est loin d'être triviale : toute “ entité ” dont on ne peut dire à quoi elle est identiqueou de quoi elle diffère est donc une “ pseudo-entité ” vague, elle est entachée d'un flou irrémédiable qui doitl'exclure d'une saine ontologie.

L'identité doit se comprendre sur un strict modèle extensionnel .

La logique oppose dans le concept son extension et son intention.

La première enveloppe la totalité des individus tombant sous leconcept, la seconde comprend les propriétés ou caractères qui déterminent si un individu tombe ou non sous leconcept.

En termes plus modernes de théorie des ensembles, l'extension d'un ensemble est la totalité de sesmembres alors que son intention le définit abstraitement.

En linguistique, l'extension serait la référence et l'intentionla signification.

Il n'est rien de plus évident que l'identité comprise comme “ co-extensivité ” : deux ensembles sont identiques si etseulement s'ils ont tous leurs membres en commun.

Il suffit donc d'énumérer les individus des collections comparées.Il est en revanche plus difficile de déterminer l'identité intentionnelle, car les significations dérogent au critèred'identification.

L'extension de “ rouge ” peut renvoyer à telles ou telles couleurs rouges observables mais commentdéfinir nettement son intention ? telle qualité sensible dans l'esprit ? une essence du rouge ? une longueur d'ondedonnée ? une certaine façon dans une langue de découper le spectre visible ? Est-il possible de décréter de façonpurement intentionnelle l'identité de significations, sans revenir subrepticement à la référence ? L'exigence d'identitéconduit à l'extensionnalisme qui exclut tous les outils intentionnels.

La signification même de “ signification ” estnébuleuse et la linguistique doit dès lors chercher à limiter le rôle de ce mythe de la signification .

Quine ne nie naturellement pas que nos phrases veuillent dire quelque chose, mais admettre un domaine de significationsséparées de l'usage ne ferait que poser un faux problème.

Il existe cependant des tournures linguistiques où l'identité extensionnelle est compromise.

Dans un contexte extensionnel, tout terme peut eneffet être remplacé par un terme coextensif.

Il est parfaitement correct de passer de “ Cicéron L043 a dénoncé Catilina P1315 ” et de “ Cicéron L043 est Marcus Tullius ” à la conclusion : “ Marcus Tullius dénonce Catilina P1315 ”.

Ce type d'énoncés est appelé par Quine, à la suite de Russell H042 et Whitehead H1241 , contexte transparent .

Les contextes opaques sont ceux où cette substitution est non-valide logiquement.

Ainsi, une phrase contenant ce que Russell H042 avait appelé une attitude propositionnelle comme “ savoir ”, “ croire ”, “ chercher ” ouvre un contexte opaque.

De “ Jones sait que Cicéron L043 est Cicéron L043 ” et de “ Cicéron L043 est Marcus Tullius ”, on ne peut déduire logiquement : “ Jones sait que Cicéron L043 est Marcus Tullius ”.

De même, des énoncés avec des opérateurs modaux (nécessité, possibilité) ne conservent pas l'identité dans les substitutions de termes coextensifs.

De “ 9 est nécessairement supérieur à 5 ” et de “ Le nombre de planètes denotre système est égal à 9 ”, il est faux de dériver : “ Le nombre de planètes de notre système est nécessairementsupérieur à 5 ”.

Pour Quine, ce n'est pas la logique extensionnelle qui est trop pauvre pour traiter ces cas mais ce sont au contraire ces contextes opaques(significations, attitudes propositionnelles, modalités portant sur des individus, conditionnels irréels, dispositions virtuelles) qui trahissent desconfusions linguistiques ou métaphysiques.

Le langage doit être enrégimenté dans une notation canonique adaptée à un discours scientifique. Ce que nous perdons par rapport aux capacités de la langue commune est en fait un progrès et une clarification.

Le premier travail de Quineconsista d'ailleurs à fournir les moyens pour réécrire les Principia Mathematica de Russell H042 et Whitehead H1241 sans jamais passer par ces objets intentionnels que sont les propriétés.

La logique ne contraint pas à une seule ontologie possible mais n'est pas non plus indifférente.

Un des problèmes au confluent de la logique et del'ontologie venait de ce qu'il paraissait impossible de nier l'existence d'entités dans une théorie sans assumer en même temps leur existence.

Pourque l'énoncé “ Pégase n'existe pas ” ait un sens, il faut en effet que nous posions le terme “ Pégase ” dont nous nions qu'il a une référence.Russell H042 avait développé une théorie des descriptions définies qui transformait “ la racine carrée de -1 ” en “ x tel qu'il soit unique et qu'il soit égal à ÷-1 ”.

Quine généralise cette analyse à tous les termes singuliers.

Un nom propre d'une langue naturelle n'a du point de vue logique pas deprivilège par rapport à une description.

“ Pégase ” pourrait être remplacé par “ un x tel qu'il soit unique et qu'il pégasise ”, “ pégasiser ” abrégeant toutes les fonctions satisfaites par un individu quelconque qui “ pégasiserait ”.

Une telle description ne présuppose pas l'existence de cet “ x ”comme un objet singulier.

Il est donc possible de donner un critère plus précis de ce qu'une théorie affirme comme existant.

Exister, c'est être unevariable liée.

Ce critère d'engagement ontologique ( ontological commitment ) n'est pas censé expliquer ce qui existe mais clarifier ce qu'une théorie. »

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