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Vouloir retourner à une vie naturelle a-t-il un sens pour l'homme?

Publié le 13/03/2005

Extrait du document

D'un côté, les hommes tendent à s'associer, de l'autre, ils y répugnent. L'homme est ambivalent, et la société est traversée à la fois par des forces qui la maintiennent, et des forces qui la mettent en danger.

* Cependant, l'effet de ces forces est, lui aussi, ambivalent. Car Kant voit dans cet égoïsme naturel des hommes, dans leur vanité et leur désir de domination, un aiguillon qui les pousse à développer leurs talents. Sans cela, la société baignerait «dans une concorde, une satisfaction et un amour mutuel parfaits«, qui serait, en fait, moins profitable à l'espèce que cette émulation. L'égoïsme a donc paradoxalement aussi son rôle à jouer dans le développement de la société. « L'homme a un penchant à s'associer, car dans un tel état, il se sent plus qu'homme par le développement de ses dispositions naturelles. Mais il manifeste aussi une grande propension à se détacher (s'isoler), car il trouve en même temps en lui le caractère d'insociabilité qui le pousse à vouloir tout diriger dans son sens ; et de, ce fait, il s'attend à rencontrer des résistances de tous côtés, de même qu'il se sait par lui-même enclin à résister aux autres. C'est cette résistance qui éveille toutes les forces de l'homme, le porte à surmonter son inclination à la paresse, et, sous l'impulsion de l'ambition, de l'instinct de domination ou de cupidité, à se frayer une place parmi ses compagnons qu'il supporte de mauvais gré, mais dont il ne peut se passer. L'homme a alors parcouru les premiers pas, qui de la grossièreté le mènent à la culture dont le fondement véritable est la valeur sociale de l'homme...

Vous devez vous pencher sur la célèbre notion d'homme à l'état de nature qui a été largement développée du XVI ième au XVII ième siècle, et dont l'écologie moderne n'est, sous certains aspects, qu'une résurgence. vous pouvez développer Ici un plan progressif, s'attachant aux différents sens de l'expression "vie naturelle", ou un plan dialectique si vous vous intéressez au problème du retour vers le passé.  

  • [L'homme étant bon par nature, il est donc légitime pour lui de vouloir à cette vie naturelle.]

L'état de nature est un paradis perdu

La civilisation nie la vie comme la société nie la liberté

  • [L'homme est un être de culture et non de nature. Vouloir retourner à la vie naturelle, c'est vouloir réduire l'homme à un simple animal d'instincts et de sensations.]

L'homme est un animal politique (Aristote)

La culture s'oppose au monde naturel

L'insociable sociabilité  

« "La loi est faite pour les faibles et pour le grand nombre.

C'est donc parrapport à eux-mêmes et en vue de leur intérêt personnel qu'ils font la loi etqu'ils décident de l'éloge et du blâme.

Pour effrayer les plus forts, les pluscapables de l'emporter sur eux, et pour les empêcher de l'emporter en effet,ils racontent que toute supériorité est laide et injuste, et que l'injusticeconsiste essentiellement à vouloir s'élever au-dessus des autres : quant àeux, il leur suffit, j'imagine, d'être au niveau des autres, sans les valoir.Voilà pourquoi la loi déclare injuste et laide toute tentative pour dépasser leniveau commun, et c'est cela qu'on appelle l'injustice.

Mais la nature elle-même, selon moi, nous prouve qu'en bonne justice celui qui vaut plus doitl'emporter sur celui qui vaut moins, le capable sur l'incapable.

Elle nousmontre partout, chez les animaux et chez l'homme, dans les cités et lesfamilles, qu'il en est bien ainsi, que la marque du juste, c'est la domination dupuissant sur le faible et sa supériorité admise.

De quel droit, en effet, Xerxèsvint-il porter la guerre dans la Grèce, ou son père chez les Scythes?...

Maistous ces gens-là agissent, à mon avis, selon la vraie nature du droit et, parZeus, selon la loi de la nature, bien que ce soit peut-être contraire à celleque nous établissons, nous, et selon laquelle nous façonnons les meilleurs etles plus vigoureux d'entre nous, les prenant en bas âge, comme deslionceaux, pour les asservir à force d'incantations et de mômeries.

" PLATON Si l'opposition de la nature et de la loi a été, dans l'Antiquité grecque, chère aux Sophistes qui ont souvent exprimé le caractère conventionnel et artificiel des lois, néanmoins cette oppositionclassique prend ici un sens tout particulier, puisque Calliclès fonde sur elle sa théorie du droit du plus fort.Dans la première partie (« La loi...

ce qu'on appelle l'injustice »), Calliclès veut analyser l'origine de la loi.

Que signifieici la loi et que désigne-t-elle exactement ? La loi (nomos) représente dans ce texte la règle générale et impérativerégissant du dehors l'activité humaine.

Notons que, chez les Grecs, à l'époque classique, le nomos est une loi qui nedoit rien à la révélation : elle n'a pas été établie par les dieux, elle est « laïque » en quelque sorte.

Dès lors, quelleest son origine profonde?Calliclès voit dans la loi une création de la foule faible et impuissante, sans énergie physique et morale : la loi estune expression du manque, manque de force, de vigueur et de vie.

C'est le produit de ceux qui ne peuvent déployerdans l'existence une surabondance existentielle.

La foule, dans la mesure où elle ne possède pas l'énergie créatricevéritable, désire en somme se protéger de l'élite.

La loi, l'éloge, le blâme constituent autant d'armes dans lastratégie des faibles.

Éloge et blâme : ce sont les jugements favorables et défavorables, c'est-à-dire les énoncésaxiologiques, portant sur des valeurs, qu'utilise la foule impuissante.

En même temps que la loi, elle crée les valeurs,le bien et le mal, les jugements préférentiels qui organisent l'existence sociale.Dans quel but exactement? Il s'agit d'effrayer « les lions », de se mettre à l'abri de leur supériorité, de les empêcherde créer et de déployer leur puissance.

Ainsi les faibles se mettront-ils au niveau des autres : ils égaliseront tout,dans le sens de la médiocrité, cela va sans dire.

En d'autres termes, lois et énoncés axiologiques sont des produitsdu ressentiment des faibles contre les forts, ressentiment qui met finalement tout au même niveau.Les faibles créent la loi, mais aussi l'éloge et le blâme, par conséquent tout ce qui représente les valeurs morales.

Ilsélaborent aussi une théorie du juste et de l'injuste, transformant en injustice (ce qui est contraire au droit) toutemanifestation vitale de supériorité.

La loi appellera contraire au droit ce qui dépasse la sphère de la médiocrité.

Lediscours de Calliclès est donc très synthétique.

Malgré son apparence désordonnée, il rassemble les énoncésaxiologiques humains (loi, juste, injuste, droit) pour les mettre sous le signe de l'impuissance, du ressentiment et dela crainte.

Ceux qui n'ont pas la vigueur, la grande santé du corps et de l'esprit, inventent la loi, les valeurs et lajustice pour compenser leur misère existentielle.

La justice, c'est le respect du droit.

Mais on ne parle de respect dudroit que par peur de la supériorité.

La première partie du texte unifie donc le système des valeurs pour le rapporterà l'effroi devant la vie et à l'intérêt personnel de ceux qui ne peuvent créer.

Il y a incontestablement, chez Calliclès,bien avant Nietzsche, une description généalogique, donnant à voir la création des valeurs morales, oeuvre desfaibles et des impuissants : c'est l'égoïsme médiocre des moutons qui engendre les valeurs.Dans la seconde partie du texte, c'est le concept de nature qui est analysé par le sophiste.

Que désigne ici lanature? Par opposition à la loi changeante et conventionnelle, elle représente ce qui est inné et spontané,l'ensemble des éléments innés appartenant à tout individu.

L'ordre de la nature donne à voir le fond commun quasibiologique.

Or, l'ordre naturel (« Mais la nature...

admise ») nous renvoie à la force pure et simple, la force étantcomprise ici comme violence.

Cette violence pure est la loi suprême : au plus fort d'avoir la plus forte part, car ledroit, c'est-à-dire ce qui est légitime, est identique à la force.

Ainsi, la violence règne à l'état de nature et légitimetout droit.

L'ordre humain comme l'ordre animal expriment la victoire et la supériorité de la force violente.

En bref, lerapport « domination-soumission » qui s'établit par la médiation de la violence légitime et fonde tout droit en tantque tel.Dans la sous-partie suivante (« De quel droit...

Scythes ») Calliclès énumère quelques exemples historiques à l'appuide sa thèse.Il tire ensuite la morale de ses exemples (« Mais tous ces gens...

loi de la nature ») répétant que force fondelégitimité et que violence est mère de droit.Enfin, dans les dernières lignes, c'est toute l'éducation humaine que Calliclès met en question.

Les incantations, àsavoir l'emploi de paroles magiques agissant par émotion, ainsi que les mômeries, c'est-à-dire des cérémoniesridicules, permettent de façonner et de construire les âmes.

Ainsi prend-on en charge de jeunes lionceaux toutpuissants, dont on détruit la force spirituelle par la magie de discours faux et creux.

L'éducation n'est qu'un discoursmenteur et magique, donnant l'être à ce qui n'en a pas, attribuant de la force à ce qui n'est rien.

Éduquer, c'est. »

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