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Une langue bien faite mettrait-elle fin à toute discussion ?

Publié le 02/01/2006

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Ils expliquent d'ailleurs la prolifération des systèmes de communication tendant vers cet idéal. Il est certain, par exemple, qu'il vaut mieux, dans le cas du code de la route, que la part de « bruit » soit la moins forte possible. Mais on peut se demander si les langues artificielles qui éliminent tout malentendu ne sont pas seulement propres à un certain type de communication, limité à un objet précis. On doit s'interroger, par conséquent, sur les fonctionnements de tels langages. 2 - La mort de l'échange a) L'exclusion des sujets Pour que le discours monosémique soit possible, il faut que toutes les sources possibles de malentendu soient éliminées. Est-il concevable alors que l'expression de la subjectivité puisse se faire avec un tel instrument ? Les cas limites de langues « bien faites » sont des exemples qui supposent un énoncé sans sujet. N'importe qui à ma place déchiffre les signaux du code de la route de la même façon que moi, pourvu qu'il connaisse le système ; de même dans un énoncé mathématique. Dans les deux cas également, l'émetteur s'efface en tant que personne singulière : à la limite, dans le code de la route, son identité n'a plus aucune importance ; seul compte le contenu du message. La discussion est exclue parce que la communication se fait en dehors de toute énonciation particulière.
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« 3 - L'interprétation comme signe d'une langue bien faite a) La langue et la paroleNous voici revenus à l'opposition langue et parole posée par Saussure.

Elle a le mérite de souligner la doubledimension de la langue : celle du code général, qui permet la communication, celle de l'expression personnelle qui faitun usage particulier, original de ce code.

Cette double nature de la langue renvoie aux rapports qui la lient auxindividus ; une langue artificielle peut éliminer les incertitudes, mais elle restreint sa fonction à l'échanged'informations.

Le langage y est conçu seulement comme un intermédiaire permettant de s'entretenir de notionsobjectives, vérifiables.

Mais il élimine les autres possibilités.

C'est pourquoi il supprime toute discussion dans les deuxacceptions du terme : discussion destinée à éclaircir le sens, mais aussi échange personnel.

La dimension humainedisparaît, et Socrate est réduit au silence... b) L'interprétationL'interprétation apparaît alors comme le signe d'une langue « bien faite £ parce qu'elle concilie à la fois lesnécessités du code commun et les exigences de la parole individuelle.

Les langues naturelles réalisent donc ceparadoxe d'être des systèmes qui s'imposent aux individus sans qu'ils puissent s'en défendre, mais aussi desorganisations souples qui laissent aux sujets une marge de liberté.

Qu'il en résulte une ambiguïté, une discussion estdonc moins le signe d'une faiblesse, qu'un avantage, car le sens n'est pas toujours stable, il est aussi productionpersonnelle.

Réduire le langage à la transcription d'une vérité définitive conduit à lui retirer toute dimension vitale. c) La discussionLa discussion est do»c la résultante de la double particularité que nous venons d'esquisser.

Elle prend sa sourcedans la dimension ambiguë du langage, elle permet de jouer des deux caractéristiques.

En ce sens, elle estrecherche de l'accord, comme le montre la maïeutique de Socrate, recherche de la vérité.

Que le discours deSocrate s'achève souvent en récit mythique et non plus en dialogue, en discussion, peut également nous conduire àréfléchir sur les limites de la langue.

Seul le discours symbolique est susceptible d'arrêter le dialogue et de clore laréflexion.. »

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