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Toute vérité doit-elle être prouvée ?

Publié le 27/02/2008

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La vérité est une propriété qui s’attribue à nos jugements et à nos énoncés. Elle désigne leur accord avec la réalité. Mais Qu’est-ce qui peut garantir cet accord ? Il faut que ma pensée y soit amenée par quelque chose. Ce quelque chose, c’est la preuve. La preuve implique l’usage de la démonstration, c’est-à-dire du procédé par lequel on établit logiquement la vérité d’un énoncé en le déduisant de propositions premières et dont le modèle est la déduction mathématique.

Certaines choses semblent aller tellement de soi et semblent si bien connues qu'il serait extravagant d’en donner une preuve ; elles s’imposent d’elles-mêmes et immédiatement. Ainsi, il me semble possible de tenir immédiatement pour une vérité qu'il existe des choses matérielles autour de moi, que ce stylo écrit en noir et que cette feuille est blanche.

Pourquoi devrait-on prouver ces vérités qui s’imposent d’elles-mêmes et qu'il ne me semble pas possible de remettre en cause ? Comment les prouver d’ailleurs autrement qu’en affirmant que mes sens en témoignent et que cela suffit.

De plus, il semble bien qu’un énoncé puisse être une vérité sans être prouvé. « Dieu existe «, « Dieu n’existe pas «, voici deux énoncés contradictoires : nécessairement l’un est vrai et l’autre faux. L’un est une vérité même s’il n’a pas été prouvé. Simplement, je ne sais pas lequel. Il y a donc bien des vérités sans preuve.

Mais justement, à quoi me sert une vérité si je ne sais pas que c’est une vérité ? Et puis-je le savoir autrement qu’en en apportant une preuve ? C'est cela qui fait apparaître l’exigence de preuve. En en restant à la certitude immédiate, je risque d’en rester aussi à l’opinion non fondée et de ne pas accéder à la connaissance, au savoir. De plus, la connaissance, qu’elle soit scientifique ou philosophique, ne se définit-elle pas en partie par la recherche de fondements à nos affirmations, par quoi elle se différencie de la pure et simple opinion qui manque de ces assises nécessaires ?

Ainsi, toute vérité doit-elle être prouvée ou bien certaines vérités ont-elles le pouvoir de s’imposer d’elles-mêmes ?

« non démontrées et que j'accepte sans preuve.

Telles sont les définitions, axiomes et postulats en mathématique.

Ilfaut donc que je pose la vérité sans preuve de certains énoncés si je veux pouvoir en prouver d'autres.

Qu'est-cequi me permet de le faire ? Cela est-il purement arbitraire ou bien ces énoncés se distinguent-ils par quelquescritères de ceux qui requièrent une preuve ? Si c'est le cas, qu'est-ce qui les caractérise ?En effet, quand bien même aurais-je prouvé par une démonstration telle vérité, qu'est-ce qui me garantit que cettedémonstration est valide ? Qu'est-ce qui me garantit que je ne me suis pas trompé en la faisant ? Il faudrait que jepuisse prouver ma preuve.

Chacun voit bien là que je m'engage dans un processus sans fin et que donc exiger deprouver toute vérité, c'est se condamner à n'en prouver aucune.

Mais alors nous voilà de nouveau dans l'embarras.L'exigence de preuve semblait s'imposer pour distinguer le vrai du vraisemblable et faire naître la certitudeauthentique dans l'esprit, certitude sans laquelle je risque d'être abusé.L'impossibilité de tout prouver, et en particulier les points de départ de la preuve et son principe fondamental defonctionnement (le principe de contradiction) semblent nous mettre en demeure de renoncer à l'exigence de toutprouver et nous fait douter de la pertinence même de l'entreprise de prouver.

Sommes-nous alors condamnés auscepticisme ?Il est apparu que la preuve, c'est ce qui peut apporter la certitude nécessaire à la vérité pour qu'elle soit vraimentconnue comme telle.

La question qu'on peut se poser maintenant, afin de voir si une issue n'est pas possible quinous fasse échapper au scepticisme, est celle de savoir si on peut être certain d'une vérité sans qu'elle soitprouvée, mais d'une authentique certitude et non d'une conviction spontanée.

La preuve est-elle la seule procédurecapable de faire naître en nous la certitude ? S'il peut y avoir des certitudes sans preuve, de quoi peuvent-ellesnaître ? De quel type de vérité s'agit-il ? Que doit être une vérité pour qu'elle manifeste immédiatement sa certitude,sans avoir besoin de passer par l'intermédiaire d'une preuve ?Dans Les Principes de la philosophie , Descartes affirme la chose suivante : « (…) La liberté de notre volonté se connaît sans preuve, par la seule expérience que nous en avons.

» Le moyen de cette connaissance certaine, c'est ce que Descartes appelle ici« l'expérience », mais de quoi s'agit-il ? Car après tout, on pourrait dire aussi que l'expérience, au sens du constatempirique, me montre que ce bâton dans l'eau est brisé, alors qu'il n'en est rien.

Ce terme renvoie ici à une épreuve; je sens en moi cette liberté de la volonté et je ne peux pas douter de son existence, elle se manifeste à moi avecévidence quand je la considère avec mon esprit attentif.

La première règle de méthode que Descartes se donne estde « ne recevoir jamais aucune chose pour vraie, que je ne la connusse évidemment être telle.

» C'est la notiond'évidence ici qui doit retenir notre attention.

Cette notion désigne la présence même de la vérité, c'est la véritéprésente en personne.

Cette évidence dont parle Descartes n'a cependant rien à voir avec les évidencesimmédiates qui sont trompeuses et n'ont donc alors d'évidences que le nom.

L'évidence cartésienne résulte d'uneactivité, d'un travail de l'esprit.

C'est ce dont il m'est impossible de douter.

Cette évidence peut être produite pardeux actes de l'esprit : l'intuition et la déduction.

La déduction, c'est « tout ce qui se conclut nécessairement decertaines choses connues avec certitude.

»La déduction renvoie donc à une procédure discursive par laquelle la vérité est établie de manière médiate, donc faitL'objet d'une preuve.

Pour le problème que nous examinons présentement, l'intuition présente un intérêt majeur.C'est une vision de l'esprit, l'acte par lequel l'esprit se met en présence même de la chose et fait advenir sonévidence.

Il n'y a là rien à voir avec ce que le sens commun entend par intuition et qui désigne le pouvoir irrationnelet fantasmé de sentir ou pressentir les choses.

Partons de la définition de Descartes : « Par intuition j'entends, nonpoint le témoignage instable des sens, ni le jugement trompeur de l'imagination qui opère des compositions sansvaleur, mais une représentation qui est le fait de l'intelligence pure et attentive, représentation si facile et sidistincte qu'il ne subsiste aucun doute sur ce qu'on y comprend.

» C'est cette intuition qui nous permet deconnaître, sans preuve, la vérité des principes premiers à partir desquels je vais pouvoir construire toute preuvefuture en utilisant la déduction.

Toute vérité ne doit donc pas être prouvée, même si aucune vérité ne s'imposed'elle-même.

Il faut que l'esprit agisse, qu'il donne son assentiment à la vérité, ce qui peut être suite à une preuve,mais aussi grâce à un acte d'intuition, par lequel la véritéest saisie en elle-même dans son évidence.Même s'il résulte de cet examen que tout n'est pas prouvable, il est apparu que l'essentiel résidait plutôt dans cettevigilance de l'esprit qui ne se laisse pas entraîner par les fausses évidences immédiates mais qui cherche àconstruire les évidences à partir de sa démarche réflexive, démarche qui peut avoir recours à la preuve, mais quipeut aussi s'en passer dans certaines conditions.

Toute vérité ne doit donc pas être prouvée et de toute façon nepeut pas l'être.

Certaines peuvent simplement être éprouvées ou bien saisies par l'acte de l'esprit attentif grâceauquel la vérité est là en chair et en os.

De plus, la structure même de la preuve a fait apparaître la nécessité duvrai sans preuve pour pouvoir commencer à prouver, ce qui, comme nous venons de le voir, ne nous contraintnullement au scepticisme.. »

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