THEORIE DE LA CONNAISSANCE: Empirisme et Scepticisme
Publié le 26/10/2009
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Une première réponse paraît s'imposer : toute connaissance nous vient des sens, ou, si l'on préfère, de l'expérience sensible. Si l'on fait un rapide inventaire de nos représentations les plus courantes, il semble en effet qu'elles trouvent leur origine dans des perceptions visuelles, tactiles, auditives, olfactives, gustatives, kinesthésiques, ou même cœnesthésiques. Qu'il y ait de telles représentations, qu'elles soient les plus nombreuses ou les plus fréquentes, c'est ce que personne ne conteste. Mais le problème qui se pose est de savoir si toute représentation sans exception trouve son origine première dans la perception sensible. Donner à cette question une réponse affirmative, c'est professer une doctrine empiriste. Nous allons voir qu'une telle théorie de la connaissance conduit inévitablement à un scepticisme quant à la vérité métaphysique. 1° Le scepticisme antique. Nous commencerons cet examen par une rapide étude du Scepticisme antique qui nous permettra de mettre en relief une idée importante. Enseigné par Enésidème, Pyrrhon, Carnéade, le Scepticisme se plaisait à nier la possibilité de toute connaissance objective, métaphysique ou même scientifique, en dénonçant toutes les contradictions dont se rend coupable la connaissance humaine. a) La contradiction repérée entre deux représentations ne sera probante que s'il s'agit de deux représentations différentes d'un même objet. Il est facile de dénoncer : — des contradictions entre les représentations d'un même objet que donnent deux sens différents : la vue me montre que ce bâton à moitié plongé dans l'eau s'infléchit dans une autre direction à partir de la surface du liquide ; le toucher me permet de sentir qu'il reste droit ; — des contradictions au sein d'un même sens : vu de loin, ce monument me paraît rond, vu de près, il me semble carré ; — des contradictions entre les sens et la raison : si je fais rouler une bille entre les extrémités de deux doigts croisés, je sens deux billes, mais la raison se refuse à ce dédoublement et cherche une explication de cette illusion (dite illusion d'Aristote) ; — des contradictions, enfin, au sein de la raison elle-même : les opinions les plus diverses séparent les philosophes, les doctrines les plus opposées sont affirmées avec autant de force et soutenues par des arguments souvent d'égale valeur ; ce fait serait-il possible si la raison était une et harmonieuse ?
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colorée de plusieurs couleurs, que les couleurs se combinent aux formes du dossier, du siège, des bras.
Tournonsmaintenant notre regard vers un ciel que nous supposerons sans nuages : nous ne percevrons alors que le bleu duciel absolument pur.
Du fauteuil, nous avions non pas une, mais un ensemble d'impressions, ou, si l'on préfère, uneimpression complexe ; du bleu du ciel, nous avons une impression simple.
Et comme lors de chacune de ces deuxexpériences, nous pouvions fermer les yeux et évoquer mentalement l'objet antérieurement perçu, il faut égalementdistinguer les idées complexes des idées simples ;
c) Revenons au problème de l'origine de nos connaissances.
On constate par une expérience qui n'est pour ainsi direjamais démentie que, lorsque nous avons dans la conscience une idée simple, celle-ci a toujours été précédée parl'impression simple qui lui correspond.
Nous ne pourrions jamais penser au bleu du ciel (c'est-à-dire en avoir l'idée) sinous n'avions jamais regardé le ciel (c'est-à-dire sans avoir eu d'abord l'impression).
Il suffit d'examinerattentivement sa propre expérience pour s'en convaincre.
Sans doute ne peut-on en dire autant de l'idée complexe,qui n'est pas toujours précédée de l'impression complexe correspondante : je puis avoir l'idée d'une chimère, que jen'ai pourtant, et pour cause, jamais vue.
Mais ce fait ne saurait nullement infirmer la proposition précédente,puisque toute idée complexe est un ensemble d'idées simples qui, chacune à chacune, dérivent des impressionssimples correspondantes ;
d) Mais comment les idées simples vont-elles s'associer à d'autres idées simples pour former des idées complexes ? Ilfaut bien qu'il y ait associations puisqu'il faut une origine aux idées complexes qui ne dérivent pas d'impressionscomplexes correspondantes.
Comment la représentation de la chimère a-t-elle pu se former en moi ? Sinon parl'association d'idées simples préalablement données par des expériences antérieures.
Le rôle de l'association est,nous allons le voir, d'une importance primordiale.
Il va expliquer pourquoi et comment nos connaissances seramènent à des croyances, et non à une science dont l'objectivité nous serait garantie.
Il est en effet évident queplus une représentation est vive, plus fortement nous croyons en la réalité de son objet : si nous rencontrons unami perdu de vue depuis longtemps, nous ne doutons pas de son existence réelle, mais si nous n'en avons que cetteimage mentale qu'on appelle souvenir, le doute grandira avec l'éloignement dans le temps des perceptions que nousavons eues autrefois de lui.
Si nous voyons un portrait, cette perception nouvelle ravivera l'idée que nous gardonset le doute diminuera.
Une association par ressemblance entre l'impression complexe actuelle et l'idée complexe quenotre conscience conservait augmente la croyance en l'existence de l'objet représenté.
Par un processuspsychologique comparable, des représentations que l'expérience nous a montrées fréquemment ou même toujoursassociées s'appelleront l'une l'autre : si l'impression complexe que me donne un ciel nuageux est toujours ou le plussouvent suivie par l'impression complexe que me donne la chute de la pluie, la réapparition de la première de cesimpressions inclinera mon esprit à attendre la seconde.
Il se forme dans l'esprit une habitude associative, et je finiraipar croire que le nuage est cause de la pluie.
Notre connaissance n'est donc en définitive faite que de croyances.Envisagée du point de vue qui nous occupe actuellement, la théorie de la connaissance professée par Hume permetdonc d'enregistrer le résultat suivant : tandis que le scepticisme antique faisait dériver de sa critique de laconnaissance un empirisme que l'on pourrait exprimer par la formule : il faut se contenter de la perception commetelle, de l'empirisme de Hume résulte, à l'inverse, un scepticisme qui récuse la validité de toute recherchemétaphysique et ramène la science à un ensemble de croyances.
Scepticisme antique et scepticisme moderneaffirment tous deux qu'aucun critère métaphysique de la vérité ne peut être défini puisque aucune vérité objectiven'est à la portée de la connaissance humaine.
Leur argument fondamental est le même : il est impossible à laconscience de sortir d'elle-même, à la représentation de se transcender pour atteindre son objet..
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