Texte Aristote, Ethique à Nicomaque, éléments de corrigé - L'amitié
Publié le 24/10/2020
Extrait du document
«
Avec la formule : « Il faut aussi s’être éprouvé mutuellement et avoir un parfait accord de caractère,
ce qui est fort difficile », Aristote énonce les implications principales de l’amitié véritable.
Ces
implications sont indispensables, comme en témoigne : « Il faut ».
« S’être éprouvé » renvoie à l’idée
de connaitre chacun son ami, mais cette connaissance ne peut pas être superficielle.
C’est là l’essence
de l’amitié : s’éprouver, c’est avoir appris à se connaitre bien l’un l’autre.
En effet, pour connaitre son
ami, il ne suffit pas seulement de partager des bons moments, il faut avoir traversé des épreuves
ensemble.
Car les épreuves, les problèmes à résoudre et les décisions difficiles montrent qui nous
sommes vraiment.
Deux amis se montrent sans crainte l’un à l’autre, partagent les douleurs et les
difficultés.
Quand on s’est éprouvé, donc quand des épreuves nous ont « testés », alors on peut
savoir si le deuxième pilier de l’amitié véritable est présent dans la relation : un « parfait accord de
caractère ».
Le mot « parfait », qui renvoie à l’ « amitié parfaite » du début du texte, traduit une fois
de plus la vision sans équivoque de l’amitié véritable.
Ici, un accord parfait signifie un accord total.
Il
est également important de remarquer que pour Aristote, les différences ne sont pas un obstacle à
l’amitié ; si elles l’avaient été, il aurait utilisé le mot « ressemblance » au lieu d’ «accord ».
Aristote
parle ici d’une compatibilité des personnalités.
On pense au philosophe Montaigne, qui fit
l’expérience de cette compatibilité dans sa très forte amitié avec La Boétie, qu’il justifiera de cette
manière : « parce que c’était lui, parce que c’était moi ».
On peut finalement remarquer que ce
processus de se découvrir par les bons comme mauvais ou cruciaux moments, pour enfin savoir si on
est « fait l’un pour l’autre », prend du temps.
C’est aussi pour cette raison que la véritable amitié est
toujours « fort difficile » à créer et à tenir.
2
Aristote passe ensuite à la définition des deux autres formes d’amitié : l’amitié de plaisir et l’amitié
d’intérêt.
Il donne d’abord la deuxième raison à la rareté de l’amitié véritable : peu de gens sont
« disposés » à s’engager dans cette relation qui demande tant de devoirs au contraire de l’amitié de
plaisir ou d’intérêt.
Il fait une distinction avec les deux autres sortes, qui elles sont fréquentes, et que
l’on n’est pas obligé de restreindre à une seule personne.
Il affiche clairement la hiérarchisation des
trois formes, l’amitié véritable supérieure aux autres : « Il ne s’agit que d’intérêt et de plaisir ».
Ces
deux dernières formes n’exigent pas de durée.
Mais l’amitié de plaisir comporte tout de même
certains devoirs, ou du moins des piliers sans lesquels elle ne peut exister : la sincérité des intentions,
d’abord.
En effet, les conditions doivent être « les mêmes de part et d’autre », c’est-à-dire que les
deux amis doivent vouloir une amitié de plaisir et non d’intérêt.
Si l’un des deux ment sur son
intention et ne souhaite que de l’intérêt, l’autre est instrumentalisé, manipulé par son ami (que l’on
pourrait qualifier de faux ami).
La deuxième condition sine qua non est le don entre les amis.
Don, et
non commerce, car sinon on tomberait dans une amitié d’intérêt : l’amitié de plaisir fait appel à « la
libéralité » et à « la générosité de cœur ».
Ces conditions ou devoirs font que l’amitié de plaisir
« ressemble davantage à l’amitié véritable » que l’amitié d’intérêt, la seule des trois formes que
l’auteur de ce texte semble considérer comme insignifiante et stérile.
Elle « n’est guère digne que de
l’âme des marchands » donc elle s’assimile à un commerce.
Question 3
L’amitié de plaisir n’est pas la forme la plus élevée de l’amitié, car c’est une amitié incomplète.
D’abord pour la raison qu’elle ne permet pas d’élever l’humain autant que l’amitié véritable.
En effet,
l’amitié véritable fait appel à toutes nos facultés intellectuelles et éthiques, comme le dit Epicure.
Elle
le fait parce que, comme l’a montré Aristote dans ce texte, elle demande un engagement de tout son
être.
L’amitié de plaisir ne s’inscrit pas nécessairement dans la durée et ne permet donc pas que la
2 - Il aurait fallu développer les qualités en jeu ici avant de passer aux deux autres formes d’amitié.
Sur ce point,
nous renvoyons à ce que nous avons vu en cours et à l’autre copie.
2.
»
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