sujet : Peut-on convaincre autrui qu’une œuvre d’art est belle ?

mon jugement universellement valable ; j’estime que tout le monde peut et doit avoir la même exclamation. C’est là l’essence du jugement esthétique ; c’est là son universalité.

A présent que nous avons cerné, sinon défini, avec Kant, l’essence du plaisir esthétique ; maintenant que nous voyons mieux à quelles caractéristiques il répond, nous pourrons vraiment nous demander si nous sommes en mesure de surmonter tout l’ineffable que recèle « c’est beau ! » et convaincre autrui de la beauté d’une œuvre...

Nous savons désormais que le plaisir esthétique ressenti devant l’œuvre d’art réside, en majeure partie, dans mon regard. Donc, la véritable question qui se pose à nous maintenant, est : mon plaisir esthétique est-il communicable à autrui ? Puis-je le convaincre de la beauté de l’œuvre ? Et comment ?

Si l’on interprète quelque peu le sens étymologique de convictio, on peut le traduire comme une victoire qui amènerait celui à qui l’on faisait face, de notre côté. Convaincre, c’est comme galvaniser des soldats ennemis pour les faire rentrer dans nos propres rangs. Or, sans nul doute, la conviction s’accompagne d’un travail de persuasion. Et convaincre autrui — qui vient du latin alter — c’est faire face à une altérité et donc avoir recours à une extériorisation : le dialogue, par exemple. On se heurte, d’ores et déjà, à la première difficulté : comment extérioriser un plaisir ? Paul Valéry a bien montré que la peau humaine séparait deux mondes à jamais distincts : celui des couleurs — de l’expression possible — et celui des douleurs — comme des plaisirs ineffables. Donc, de ce point de vue, la conviction qu’une œuvre d’art est belle est incommunicable.

En outre, celui qui n’est pas convaincu — autrui — va demander des preuves, comme Thra-symaque, dans la République de Platon, demande des preuves à Socrate. Or, pour prouver que l’œuvre d’art est belle, il faudrait pouvoir se référer