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Suis-je responsable de mes goûts ?

Publié le 23/02/2005

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    En tant que phénomène collectif, le goût est largement déterminé par des circonstances extérieures, tenant à l'évolution économique et sociale, qui peuvent sembler, à première vue, ne pas devoir entraîner de répercussion sur le plan esthétique. Le rôle des artistes demeure pourtant capital. Il n'est pas question ici, naturellement, des orientations qui s'affirment dans tel ou tel milieu, de la vogue des tableaux d'une certaine période qui se dessine à un moment donné, des cotes qui montent, de l'attrait soudain exercé par certains genres, par certaines écoles de peinture. Dans ces différents cas, seuls les marchands, les collectionneurs, les spéculateurs sont concernés. Il n'en reste pas moins que l'oeuvre des peintres, des sculpteurs, des architectes peut exercer une influence décisive sur le goût, soit que les artistes s'imposent d'eux-mêmes et imposent leur propre conception de la beauté, soit qu'ils se trouvent mis en vedette, protégés, imposés par les puissants du jour. Citons encore une fois Voltaire : « Le goût se forme insensiblement dans une nation qui n'en avait pas parce qu'on y prend peu à peu l'esprit des bons artistes. On s'accoutume à voir les tableaux avec les yeux de Le Brun, du Poussin, de Le Sueur ; on entend la déclamation notée des scènes de Quinault avec l'oreille de Lulli, et les airs, les symphonies, avec celle de Rameau. On lit les livres avec l'esprit des bons auteurs. » Quant à l'art de cour, des palais minoens aux salons de la princesse Mathilde, certes il impose un style, mais il oriente aussi le goût, d'abord dans le pays où il est né, puis partout où s'exerce l'influence de celui-ci.   Conclusion.

 Le goût, en effet, désigne, d’une part, un « don « personnel, d’autre part un phénomène collectif, l’orientation d’une société ou d’un milieu vers certaines formes d’art nettement déterminées ; c’est la faculté d’éliminer, de choisir, de créer des associations heureuses, qui naît d’une certaine intuition de la qualité, de la « saveur « des choses, parallèle en somme à celle qui s’exerce sur le plan sensoriel et gastronomique. Au sens de phénomène collectif, le goût n’a pas ce caractère subjectif : il est parfois une adhésion aux préférences et aux choix de personnalités marquantes d’un milieu, plus souvent le contrecoup d’événements historiques, d’une découverte ou d’une création dans le domaine de la culture ou même de la technique. Le goût d’une époque est fréquemment une réaction contre celui de l’époque précédente. Les différentes étapes de l’histoire du goût ne sont pas les phases successives d’une évolution continue, mais recèlent en elles-mêmes leur point de départ et leur terme. Celui-ci est marqué d’abord par la création d’un style, plus ou moins éphémère et, parallèlement, par l’apparition de modes, de « manies «, d’engouements, qui s’épuisent par leur excès même. On comprend que dans la définition même du goût, il n’ y a pas uniquement des prérogatives subjectives, mais le goût est façonné par l’entourage proche ou par la société. Je ne serais pas entièrement responsable de mes goûts.

 

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