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Si le désir est inconscient, à quoi bon vouloir le maîtriser ?

Publié le 27/02/2008

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Le désir a été considéré comme inhérent à la nature humaine. Certains philosophes tels Schopenhauer ou Spinoza ont même vu en lui l'essence de l'homme. Qu'est-ce que cela signifie ? Le sujet présuppose ici que le désir est involontaire. Ce terme désigne un mouvement ou une activité qui n'est pas choisie par la volonté et donc par le sujet. Nous exécutons un geste involontaire quand nous ne sommes pas la cause véritable de nos actions. Or, le fait de pouvoir être la cause de ses actions, de pouvoir s'auto déterminer participe à la liberté. Spinoza a en effet, montré qu'une action libre est une action dont nous tirons les raisons que de soi-même. Affirmer que le désir est involontaire, c'est dire que ce dernier n'est pas le fruit d'une décision mais la réaction à quelques influences et sensations extérieures. Le désir se définit comme une tendance, un élan de l'homme vers un objet qui est considéré comme source de plaisirs et de satisfactions. Le désir se distingue de la volonté, qui n'est pas un simple mouvement mais une organisation réfléchie de moyens en vue d'une fin. Le désir peut aller sans ou contre la volonté (un désir, par exemple, que je sais interdit et que je ne veux pas réaliser); la volonté peut aller sans le désir (la volonté d'ingurgiter un médicament quand, pourtant, je ne le désire pas). Pour comprendre la primauté du désir sur notre choix, il faut remonter à sa source. Le désir prend naissance dans notre rapport au sensible. C'est bien parce qu'il est attachement au sensible au dépit du spirituel que les philosophes ont traditionnellement rejeté le désir. En acceptant l'hypothèse du désir involontaire, il faut s'interroger sur la position que nous devons adopter vis-à-vis de lui. Il s'agit de comprendre l'attitude « raisonnable ». ce qui est déraisonnable est ce qui échappe au règle de la raison, à la logique. Le terme « raisonnable » et « raison » proviennent du latin ration qui signifie « calcul » et « compte ». L'attitude raisonnable est celle qui développe un bon compte, c'est-à-dire qui analyse au mieux la situation pour agir de manière adéquate. Il est possible de dégager trois grandes acceptions du « maître » : le dominus, le magister, et le maestro - ces trois termes latins renvoyant aux trois grandes dimensions de la maîtrise. Le dominus renvoie à la maîtrise comme domination autrement dit comme hiérarchie. Le maître est donc celui qui domine, qui est à la tête de la hiérarchie, qui est dominant dans le rapport de force. Le magister est le maître en tant que sa maîtrise est légitimée par la possession d'un savoir, ou tout du moins d'une compétence. Le maestro est le maître qui maîtrise à la perfection son art. Or, essayer de maîtriser, de mettre en esclavage ce qui n'est pas du domaine de notre pouvoir, n'est-ce pas être en contradiction ? N'est-ce pas s'exposer à encore plus de souffrance ? Pourtant, la raison ne demande-t-elle pas justement à l'homme de réaliser sa liberté ? Ne lui intime-t-elle pas d'essayer de comprendre le désir et donc de devenir magister, dans le sens d'avoir un savoir sur lui ? Et si nous ne pouvons maîtriser le désir, quelle position devons-nous adopter qui soit la plus raisonnable ?

« vie.- C'est pour cela que Calliclès dans le dialogue de Platon soutient qu'il est nécessaire d'assouvir tous les désirs et demener une vie de plaisirs permanents.

Il exhortait ainsi à « vivre dans la jouissance, éprouver toutes les formes dedésir et les éprouver.

» Si nous ne pouvons le maîtriser, n'est-il pas plus profitable de ne pas le satisfaire etd'éprouver de la satisfaction ? Ainsi, pour Freud, ce qu'on nomme "bonheur" n'est qu'une "satisfaction plutôtsoudaine de besoins et de désirs, et n'est possible par sa nature que sous forme de phénomène épisodique."(Malaise dans la civilisation , 1929) Le bonheur ne serait alors rien d'autre que l'assouvissement des désirs… La raison n'est-elle pas de choisir le bonheur au malheur ?Le désir, tant qu'il n'est pas assouvi, est souffrance et rend l'homme malheureux.

Pour Leibniz, le désir troublel'esprit : "l'inquiétude qu'un homme ressent en lui-même par l'absence d'une chose qui lui donnerait du plaisir si elleétait présente, c'est ce qu'on nomme désir." Essayer de maîtriser son désir, de lui faire obstacle, c'est augmentercette inquiétude et donner au désir des proportions encore plus grandes qui nous amèneraient à des actesdangereux.

La raison est ce qui définit l'homme, renoncer à maîtriser le désir, c'est renoncer à la raison- Pourtant, nous ne pouvons pas dire qu'il est raisonnable de se laisser au désir.D'abord, il est clair que si tout le monde se mettait à vouloir satisfaire son ambition personnelle et aveugle enmaîtrisant les désirs des autres, nous serions perpétuellement en état d'anarchie et de conquête aveugle dupouvoir.

Chacun cherchant à être le plus fort politiquement (pour pouvoir s'imposer aux autres et s'assurer sesmoyens de jouissance), il ne pourrait en ressortir que de la tyrannie.

Ensuite, qui est tyran envers les autres l'estnécessairement envers lui-même.

Il est loin d'être sûr que quelqu'un qui soumet son intelligence et son courage àses moindres désirs soit un homme très ordonné.

La logique veut en effet que ce soit l'intelligence et le courage quisoient considérés comme supérieurs à tout autre désir.

Abaisser ces facultés les plus nobles aux autres désirs, c'estdonc imposer là aussi une anarchie entre les désirs.Dans le désir, nous abandonnons la raison pour se laisser aller aux réactions du corps.

Nous sommes par suite horsdu domaine de la raison et notre conduite ne peut être appelée raisonnable.

Il faut bien voir que ce qui faitl'humanité de l'homme n'est pas la satisfaction des désirs bestiaux du corps mais sa raison.

Pour Platon et Aristote,la raison est la partie divine de l'homme qu'il s'agit d'entretenir.

Socrate montre que celui qui se laisse diriger,commander par ses désirs est le plus esclave des esclaves.

Ainsi le tyran, dominé par ses désirs les plus vils estcelui que Platon place au plus bas de l'échelle des individus.

En proposant une tripartition de l'âme entre l'esprit(nous), le courage (thumos) et le désir (epithumia) où l'esprit en tant que supérieur commande à l'inférieur le désir,Socrate voit dans la conception de Calliclès qui prônait une vie entièrement soumise à l'assouvissement de tous lesdésirs, une forme de domination inauthentique et inversée.

De même, Aristote voit comme activité spécifique del'homme, la contemplation, activité de la raison.On peut même penser que le désir rattache l'homme à l'animalité.

Hegel, dans le chapitre Iv de Phénoménologie de l'esprit que initialement le désir est commun à l'homme et l'animal, commeconséquence de la vie.

Sans élévation de ce désir vers d'autres sphères, ledésir empêche l'homme de réaliser l'œuvre de l'esprit.

Peut-on dire quel'homme peut raisonnablement abandonner son humanité ? Il semble bien quenon.

L'homme raisonnable essaiera par tous les moyens de maîtriser son désiret tentera de réaliser son essence divine, son essence pensante.De même, le désir donne une vue complètement déformée du monde et laisseéchapper la rationalité de l'homme.

Il modifie notre jugement sur les choses,or, la raison se définit comme la faculté de bien juger.

Spinoza affirme ainsique le désir donne le jugement sur l'objet : " nous jugeons qu'une chose estbonne, parce que nous faisons effort vers elle, que nous la voulant ettendons vers elle par appétit ou désir." Ce qui veut dire que le désir ne sefonde pas sur une connaissance parfaite de l'objet désiré, bien au contraire.Dès lors, tant que la chose fait l'objet d'un désir, il nous est impossible de laconcevoir objectivement et nous pouvons juger sa valeur bonne alors que cen'est pas du tout le cas.- De plus, nous avons vu qu'il serait profitable de laisser le désir s'assouvirparce que cela lui apporterait satisfaction et bonheur.

Pourtant, c'est setromper sur la nature du désir.

Ce dernier est permanent, il refuse lasatisfaction et mène l'homme à toujours désirer sans répit.

"Tout désir naîtd'un manque, d'un état qui ne nous satisfait pas ; donc il est souffrance, tantqu'il n'est pas satisfait.

Or, nulle satisfaction n'est de durée ; elle n'est que lepoint de départ d'un désir nouveau.

"Schopenhauer, Le monde comme représentation et comme volonté.

De plus, les hommes qui courent toujours après la satisfaction des désirs, se trouvent à un moment rattrapés par l'ennui.Plus rien n'a plus de valeurs.

C'est ainsi que les gens très fortunés, pouvant satisfaire tous leurs désirs, ne sont pasles plus heureux, bien au contraire pour le philosophe allemand.C'est aussi ce que met en exergue le psychanalyste Lacan.

L'expérience de la psychanalyse met en évidence que ledésir fuit d'objet en objet en fonctions des représentations verbales, connectées à l'inconscient.

Le désir serait alorspour Lacan une métonymie, c'est-à-dire un déplacement incessant.

Dès lors, vouloir assouvir le désir, serait uneconduite que la raison analysant le désir, désavoue.

Cette recherche de satisfaction entraînerait l'homme dans uncercle vicieux de douleur.

Ce que met en évidence Platon dans le Gorgias .

Il compare le désir au tonneau percé des Danaïdes, impossible à remplir, or pour le philosophe grec, la sagesse et le développement de la sérénité se est. »

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