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SERRES (Michel)

Publié le 14/05/2019

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SERRES (Michel), philosophe français (Agen 1930). Auteur d'une thèse sur le Système de Leibniz et ses modèles mathématiques (1968), il centre sa réflexion sur les problèmes de la communication et s'attache aux méthodes de « traduction » qui permettent de passer d'une interprétation scientifique du monde au domaine de la représentation artistique {Esthétiques sur Carpaccio, 1975) et littéraire. Dans cette stratégie de transposition, analysée dans la série des Hermès (1969-1980), la science peut être définie comme « l'ensemble des messages optimalement invariants ». Si ce maximum n'est pas atteint, on se trouve dans le domaine capricieux et mouvant des modes de représentation et d'expression qui relèvent de la littérature, ou au mieux des sciences « molles » c'est-à-dire « humaines ». M. Serres mesure les transformations du message. Les trois états d'Auguste Comte traduisent le principe de d'Alembert ; Turner visualise la thermodynamique et la révolution industrielle ; Balzac dit l'univers concentrique de Laplace ; Bossuet, Vaugelas, les bosquets de Versailles, la géométrie classique expriment à leur manière une même conception de l'espace et du monde. Sur le bruit de fond, avec plus ou moins de « parasites », passe le message, discours, tableau ou équation [le Parasite, 1980). Car l'état premier, commun, normal est le chaos, le désordre. L'ordre, improbable, est une île dans l'océan du tohu-bohu originel. La science avance non comme un front dur et continu, mais comme un nuage fluctuant. L'art aussi. Au milieu du tourbillon des signaux, nous naviguons à l'estime [le Passage du Nord-Ouest, 1980). D'où la double nécessité de bien repérer les bases de départ, l'état premier, les commencements [Genèse, 1982), les fondations [Rome, le livre des fondations, 1983) et en même temps, à partir du premier écart, du clinamen [la Naissance de la physique dans le texte de Lucrèce, 1977), de suivre le plus concrètement possible la formation et

serres

« Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)Michel Serresné en 1930 Ancien élève de l'École Navale et de l'École Normale Supérieure, Michel Serres trouve, dans sa thèse Le système deLeibniz et ses modèles mathématiques (1968), au cœur de la pensée la plus systématique du Grand Siècle, lavariabilité indifférente des éléments engendrés par la logique du système, la multiplication indéfinie des points de vuepossibles, l'absence de point fixe d'une raison qui tente de se penser systématiquement.

C'est ce mouvementessentiel de la pensée qu'il va s'employer à réhabiliter dans sa grande œuvre Hermès (5 vols.

1968-1981), contre latendance opposée de la raison à la stabilité, l'ordonnancement, la séparation des savoirs : les oppositions figées(vrai et faux, notamment) tout comme le cloisonnement des activités de l'esprit (théorie et art, science et mythe,sciences de la nature et sciences humaines) sont des digues pesantes que notre époque fait exploser : entre tousles domaines, des consonances, des analogies et des rapprochements s'imposent et nous invitent à une autremanière de penser, souple, ouverte et tolérante : non dans le désordre et l'anarchie mais dans ce lieu vivantd'élaboration et de réélaboration des ordres et des hiérarchies.

Ce lieu, c'est peut-être celui du corps — Les Cinqsens (1986), le Tiers-instruit (1991) — que la raison ordonnatrice a trop vite relégué dans la sphère de l'irrationnel :Michel Serres nous rappelle que c'est par la discipline du corps que l'on apprend et que l'esprit se développe, que lamémoire, premier lieu de l'ordre, est d'abord une faculté du corps, et que celui-ci possède une rationalité propre,visible par exemple dans l'activité sportive.. »

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