(Seconds Analytiques) - Aristote - Commentaire
Publié le 23/03/2015
Extrait du document
«
Textes commentés 41
Les principes ne sont pas connus par démonstration, sinon ils ne
seraient pas principes du
savoir; de plus, l'hypothèse commode de
l'innéisme est
«absurde» (atopon, 99 b 26), car elle rend cette fois
l'ignorance incompréhensible.
Reste donc,
si l'on n'entend pas réifier les
principes en Idées séparées,
à admettre que la sensation elle-même
constitue
« une puissance innée de discrimination » qui nous rend
capables d'accéder aux principes.
Les nuances sont ici essentielles:
la
sensation est une «puissance» ou une «capacité» (dunamis) qui nous
met en route vers les principes, mais elle n'est pas leur connaissance en
acte.
En effet, comme le Texte
1 nous l'a appris, en unifiant« une multi
plicité de
souvenirs» l'expérience sensible ne s'élève pas réellement au
dessus de
la particularité, puisque l'objet de cette expérience n'est jamais
un universel.
Et pourtant, Aristote écrit aussi que
la sensation est
«sensation de l'universel (aisthèsis tou katholou) » ! Pour lever l'équi
voque, il suffit de comprendre que
l'unité de l'universel réside en
puissance dans la multiplicité sensible, comme « une et identique dans
tous les cas
particuliers».
Ainsi, «l'homme», qui n'est aucun être
humain particulier,
«repose tout entier», mais in nuce, dans la vision de
Callias : il y reste en attente
d'un travail d'unification des traits spéci
fiques (
« indifférenciés » dans l'acte perceptif, car « l' homme-Callias »
est une sorte d'indiscernable) qui relient Callias, Socrate, etc.
Ce travail
est une
«induction» (epagôgè) allant du multiple vers l'unité de
l'universel ; comme si, devant
la profusion sensible, notre capacité à
saisir des généralités synthétiques mettait peu à peu fin à une « débâcle ».
Dieu peut bien être le « stratège» de l'ordre parfait du Ciel
(cf.
Métaph.
A, 10, 1 075 a 11-25), nous qui avons affaire au monde
sublunaire imparfait, nous ne le comprenons souvent
que «d'une
manière vague et obscure, semblables aux soldats mal exercés dans les
combats» (A, 4, 985 a 13-14).
C'est ainsi que nous marchons vers les
principes les plus universels, en arrêtant l'une après l'autre les débâcles.
Mais
la reconstitution finale de «l'ordre» (hè arkhè) sera le fait de
l'intellect (nous)..
»
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