Schopenhauer et les exigences de la société sur l'individu
Publié le 23/09/2011
Extrait du document
Et tout d'abord toute société exige nécessairement un accommodement réciproque, une volonté d'harmonie : aussi, plus elle est nombreuse, plus elle devient fade. On ne peut être vraiment soi qu'aussi longtemps qu'on est seul ; qui n'aime donc pas la solitude n'aime pas la liberté, car on n'est libre qu'étant seul. Toute société a pour compagne inséparable la contrainte et réclame des sacrifices qui coûtent d'autant plus cher que la propre individualité est plus marquante. Par conséquent, chacun fuira, supportera ou chérira la solitude en proportion exacte de la valeur de son propre moi. Car c'est là que le mesquin sent toute sa mesquinerie et le grand esprit toute sa grandeur ; bref, chacun s'y pèse à sa vraie valeur. Arthur SCHOPENHAUER.
«
pouvoir s’affirmer dans son originalité, dans son unicité.
Normalement,
l’harmonie c’est l’union équilibrée de différents sons, couleurs qui se
mélangent en se faisant tous entendre ou voir (une sorte d’heureuse
cacophonie !).
L’harmonie est d’ailleurs en ce sens plus belle qu’une simple
symétrie qui satisfait l’esprit par sa régularité mais déçoit aussi par sa seule
régularité.
Reproduction du même, alors que dans l’harmonie, il y a une
dissymétrie, mais équilibrée ; variété mais unité aussi, on peut ici penser à la
divine proportion du nombre d’or.
Mais ici l’harmonie n’est pas cette unité du
divers, elle tourne selon Schopenhauer à un son monocorde, à un
monochrome.
Un seul son, une seule couleur, celui du groupe, celle de la
masse.
Le groupe passe avant l’individu, chacun doit entrer dans un moule
unique de pensée, de manière d’être.
On est comme tout le monde, tous les
mêmes, c’est pourquoi on peut vivre ensemble.
Chacun se laisse
dépersonnaliser, se noie dans la masse informe (« fade ») et uniforme.
Et plus
on est nombreux, plus le nombre écrase les individus.
Face à ce tableau de la socialisation, on ne peut que souhaiter la solitude.
Selon un raisonnement manichéen, si on se perd soi-même en société, alors
on se retrouve dans la solitude.
C’est sous forme d’équation que
Schopenhauer va exposer cela, l 2 à 5.
Etre soi = être seul = être libre.
En effet,
quand on est seul, on n’a pas à feindre ceci ou cela, à paraître, à s’empêcher
tel ou tel comportement.
On est tel qu’on est.
On n’est pas influencé par les
autres, soumis à des normes comportementales ou autres.
On est donc libre
d’être soi et libre tout court car il n’y a pas d’obstacle à nos désirs, pas de
règles à respecter, pas de contact avec les autres donc pas d’obligation de
respecter leur liberté.
On se retrouve à une sorte d’état de nature, pré-social,
indépendant avec une liberté naturelle, « un droit illimité de faire tout ce qui
nous tente et que l’on peut atteindre », comme le disait Rousseau.
Mais surtout
on se retrouve en dehors du jeu social et de l’hétéronomie qui l’accompagne et
donc autonome On trouve ici une idée que réaffirmera Bergson pour qui la
liberté consiste à devenir ce que l’on est, pour qui l’obstacle à la liberté n’est
pas interne (le fait que je sois ceci ou cela, que je n’ai pas choisi ce que je suis)
mais externe.
Car être libre, c’est être soi, faire en sorte que ce que l’on fait,
que qui l’on est s’accorde avec ce que nous sommes, à la manière d’un portrait
ressemblant à son modèle.
Pour Bergson aussi il s’agit de ne pas se laisser
emporter par « le courant de la vie sociale », de ne pas se laisser dicter sa
conduite du dehors, par les autres.
La liberté n’est pas dans le choix de ce que
nous sommes, mais dans le fait de ne pas laisser les autres décider
directement ou indirectement de qui nous sommes, de qui nous assumons
comme étant nous.
Mais on pourrait aussi objecter à Schopenhauer que l’on
est soi aussi par et avec les autres.
On peut effet souligner la part active du
rapport à l’autre dans la construction de soi, la prise de conscience de soi.
C’est ce que souligne Sartre à travers l’exemple de la honte qui permet de se
rendre compte de qui nous sommes, et oblige à abandonner la mauvaise foi du
regard jeté sur soi, on peut penser au rôle des autres dans la construction de
soi dans les premières années de la vie par un jeu de distanciation et
d’identification.
On peut enfin penser à Hegel et à sa dialectique du maître et de
l’esclave qui souligne que c’est dans la confrontation des consciences que.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- La Princesse de Clèves, Mme de Lafayette, Parcours : Individu, morale et société Texte 2 : L'AVEU
- « Il me semble que nous soyons parvenus à cette époque prédite par Descartes où les hommes em-ploieraient la force et les actions du feu, de l'eau, de l'air, des astres et de tous les autres corps, en même façon que les métiers d'artisan et se rendraient ainsi, maitres de la nature. Mais, par un renversement étrange, cette domination collective se transforme en asservissement dès que l'on descend à l'échelle de l'individu et en un asservissement assez proche de celui que comporte la vi
- Société et Individu
- LA SOCIÉTÉ EST-ELLE UNE CONTRAINTE POUR L' INDIVIDU ?
- Mémoire, individu et société