Saint-Augustin: Chapitre 10 et 11, Livre III, Les Aveux (Nouvelle traduction des Confessions par Frédéric Boyer)
Publié le 01/10/2018
Extrait du document
« Devenu manichéen dans sa dix-neuvième année, en 372. Durant cette longue période au Manichéisme, Augustin s’est laissé séduire, et il n’a pas tardé à se faire lui-même « séducteur », déployant tout son talent pour entraîner dans la secte ses amis les plus chers. Il resta « auditeur » de la secte pendant neuf ans… sans jamais s’engager au-delà jusqu’à devenir « élu ». Sa vie dans la secte nous est mal connue, du moins dans ses aspects positifs, Augustin insistant, au moment où il rédige les Confessions, sur les erreurs des manichéens et sur ses propres déceptions plus que sur les avantages qu’il en a tirés… » Avoir voulu chercher la Vérité par la raison, la connaissance en entrant chez Manichéisme, Augustin nous a montré enfin le chemin pour la trouver, c’est le chemin du cœur, en se confessant « tu étais plus intérieur que mon intimité, plus élevé que mes sommets ». Il nous faut rappeler qu’Augustin raconte son histoire sous la lumière de la foi d’un adulte et que le temps chez des manichéens lui donne une connaissance importante qui lui permet de mener la lutte contre cette religion dès le « lendemain » de sa conversion. Le Manichéisme a influencé la formation d’Augustin. C’est cette secte dont il allait parler plusieurs fois dans les Confessions.
«
que cette pensée cosmologique soit appréciée par les philosophes de son époque, Augustin a dû les dépasser
devant l’amour de Dieu.
Pour lui, tout est faux.
Et les manichéens parlaient faussement non seulement de
Dieu mais aussi de sa création.Augustin avait confiance en la promesse des manichéens.
Il attendait que quelque chose de grand lui
soit révélé un jour ; il était avide de la « vérité claire et sans mélange » que les manichéens tenaient en
réserve pour leur disciple.
Rien ne semble avoir tant charmé les oreilles d’Augustin que ce mot de vérité : «
Oh vérité, vérité, du fond du cœur, c’est la moelle de mon âme qui soupirait vers toi quand ils faisaient
résonner ton nom à mes oreilles ».
Augustin était à la fois soutenu et illusionné par cette promesse.
Les
manichéens disaient : « vérité, vérité ».
Ils parlaient beaucoup de vérité mais elle n’était nulle part en eux.
À
ce sujet, on retrouve chez Augustin « l’accent de Jésus » quand il parle des pharisiens et docteurs de la loi,
des hypocrites.
Mais de quelle vérité parle -t-il ? Elle est Dieu lui-même et finalement le Christ en personne.
C’est Dieu
qui est vraiment vérité dont les manichéens parlaient faussement, « si souvent et de façon si variée dans
leurs paroles et dans leurs énormes et nombreux livres ».
Le Manichéisme était une religion initiatique.
Il
faisait appel à la raison, mais il n’introduisait que progressivement dans la vérité.
Cette initiation se faisait
grâce à l’enseignement du maître, Mani, qui avait tout consigné dans les livres réservés aux élus.
Dans la
marche vers la vérité, Mani jouait le rôle du Paraclet, du révélateur ultime.
“J’étais affamé de toi”.
Oui, Augustin avait vraiment faim et soif, la faim et soif de Vérité.
Par contre,
on lui servait à manger des paroles, de soleil et de lune.
Cette nourriture, les mirages trompeurs pour
l’esprit et le regard, le rendaient toujours plus vide : « je mangeais sans avidité.
Tu n’avais pas dans ma
bouche le goût de ce que tu es vraiment ».
Comme dans les rêves, les aliments ressemblent aux aliments de
la vie éveillée.
Mais ils ne nourrissent pas les dormeurs puisqu’ils dorment.
Ainsi, le cœur d’Augustin reste
toujours dans sa faim et soif de la vérité.
En voulant se rassasier de la véritable nourriture, c’est -à -dire de Dieu, Augustin tente à d’identifier
celui qui puisse lui en donner.
« Tu n’es ni ces corps que nous voyons, même dans le ciel, ni ceux que nous
n’y voyons pas.
» Ici Augustin provoque la question sur la nature de Dieu et celle de l’homme.
Il s’agit aussi
de la question sur la relation entre le corps et l’âme.
Selon le Manichéisme, l'homme naturel est donc
double.
Il possède: un esprit (l’âme) et un corps.
L’âme est une parcelle de Dieu perdue dans la matière dont
il faut la délivrer.
Pour Augustin, il veut comprendre non plus ce que Dieu est pour l’esprit, mais ce qu’il est
en lui-même.
Augustin veut positivement exprimer la transcendance de la Vérité.
« Dieu n’est pas de ces
corps.
Il n’est pas non plus l’âme qui est la vie des corps.
Dieu est la vie des âmes, la vie des vies, vivant par
lui-même.
Dieu ne change pas, c’est la vie de son âme.
»
Augustin désire découvrir afin de saisir celui qui est la « vie » de son âme, la « vie des vies ».
Mais «
Où étais-tu si loin, si loin de moi ? » Non, la question devrait être: « où étais-je si loin, si loin de toi, mon
Dieu ? » Comme le « fils prodigue » qui quitte son père et s’éloigne de sa maison, Augustin était si loin en
terre étrangère des mystifications, exclu de Dieu, privé des nourritures manichéennes.
Pour Augustin
maintenant, les vers et le chant poétique, le vol de Médée par exemple, sont bien plus utiles que les cinq
éléments maquillés de nuances diverses (les cinq fils de la Lumière : Air, Vent, Lumière, Eau, Feu) en
rapport avec les cinq antres des Ténèbres (les Ténèbres elles-mêmes, les Eaux, les Vents, le Feu, la Fumée).
Les parcelles de la substance divine sont aussitôt absorbées par les puissances ténébreuses ; mais cette «
perte de soi » est aussi le commencement du salut car l’âme divine ainsi mélangée empoisonnera.
»
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