ROUSSEAU: les conventions humaines
Publié le 28/04/2005
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Dans ce texte, Jean-Jacques Rousseau établit une distinction entre deux formes de justices. La première est universelle et trouve son fondement en Dieu, la seconde est le résultat de conventions entre les hommes. Sans doute la première est-elle supérieure à la seconde, mais Rousseau considère que la seconde s'avère indispensable à l'intérieur d'une cité. L'auteur commence par examiner la justice dite « universelle « puis la justice en tant que convention sociale, avant de terminer son texte sur une comparaison entre la situation de l'homme à l'état de nature et dans l'état de société.

«
– On ne peut concevoir un homme sans la présence de trois facultés: la conscience, la raison et la volonté.
Par laconscience il est capable de reconnaître ses actions, et par la raison il est apte à mesurer la portée et la valeur decelles-ci ; par la volonté il est en mesure de choisir ce qu'il va faire.– Ainsi, en réfléchissant sur lui-même, l'homme possède en lui-même la règle qui lui permet d'agir conformément à lajustice.
« Puis-je vouloir que la maxime de mon action soit érigée par ma volonté en une loi universelle? » (Kant,Fondements de la métaphysique des moeurs).
Dans la solitude de sa conscience, sans avoir à recourir aux loispositives, l'homme possède les moyens lui permettant de participer à la réalisation de la justice.– Dans une cité idéale, où tous les hommes auraient un égal degré de conscience et de raison qui leur permettraitde faire les choix justes, les lois positives seraient inutiles et la justice pourrait être réalisée sans recourir à la loi.
Dans la cité réelle, n'est-ce pas par la loi que la justice peut se réaliser?
– Ce n'est pas parce que l'homme possède en lui toutes les facultés lui permettant de bien juger qu'il va s'en servirde façon juste.
« Ce n'est pas assez d'avoir l'esprit bon mais le principal est de l'appliquer bien », notait Descartesdans le Discours de la méthode avant d'observer également que « les plus grandes âmes sont capables des grandsvices aussi bien que des plus grandes vertus ».
L'aptitude à choisir le mal tout en ayant la connaissance du bien estaussi l'une des caractéristiques de la condition humaine.– Dans ces conditions, le recours aux seules lois de la raison s'avère inefficace pour réaliser la justice au sein de lacité.
Le droit naturel s'appuie sur l'exigence de réciprocité et n'expose pas à d'autres sanctions que la réprobationde sa conscience.
Qui peut garantir que cette exigence sera respectée sous la menace d'une sanction si peusévère?– Le droit positif est un ensemble de conventions sur lesquelles les hommes s'entendent et auxquelles ils donnentl'autorité de la loi.
Quiconque y déroge s'expose aux sanctions prévues par la loi.
Moins parfaites que les exigencesdu droit naturel, elles sont néanmoins plus efficaces.
C'est ainsi que les lois peuvent réaliser la justice au sein de lacité.
Comment faire en sorte que la loi soit juste?
– Les lois positives dirigent la vie sociale, elles disent ce qui doit être, ce qui ne doit pas être et à quoi s'exposentles contrevenants.
Mais suffit-il qu'une convention soit adoptée par un groupe d'hommes pour qu'elle devienne ipsofacto l'expression de la justice? On peut trouver dans la littérature ou dans l'histoire des exemples de lois discutées,élaborées et adoptées par les hommes et qui étaient malgré tout parfaitement injustes.
La légalité est-elle lagarantie absolue de la légitimité?– Exemples d'écarts entre légalité et légitimité dans la littérature (Antigone de Sophocle opposant la loi des dieux àcelle de la cité) et dans l'histoire (le général de Gaulle contestant en juin 1940 la légitimité des autorités légales dela France de Vichy).– Comment éviter que la loi positive ne s'écarte des exigences de la justice? Le problème est complexe et sanssolution définitive.
Il importe que la loi positive soit élaborée par le plus grand nombre et qu'elle soit très largementdébattue de façon à devenir une véritable expression de la volonté générale.
Conclusion
Dans une cité idéale, la justice pourrait sans doute se réaliser en l'absence de loi.
Mais les hommes n'étant pasvertueux par nature, dans la cité réelle il faut que la loi positive les guide dans leur conduite de façon à permettre laréalisation de la justice.
ROUSSEAU (Jean-Jacques). Né à Genève en 1712, mort à Ermenonville en 1778. Il n'est pas dans notre propos de résumer la vie de Rousseau, sou séjour aux Charmettes chez Mme de Warens, àMontmorency chez Mme d'Épinay, ses travaux de musique, sa persécution par les catholiques comme par lesprotestants, son voyage en Angleterre après sa fuite de Suisse ou l'hospitalité du marquis de Girardin à Ermenonville.Non plus que la mise à l'Assistance Publique des cinq enfants qu'il eut de Thérèse Levasseur, ou sa brouille avecGrimm et Diderot.
Jean-Jacques Rousseau fut seul, chassé de partout, et c'est en méditant sur son existencemalheureuse, qu'il a pu énoncer sa doctrine de philosophe.
Sa philosophie n'est pas un système, mais une vision dela condition humaine.
— Contrairement aux Encyclopédistes, l'homme, pour Rousseau, est naturellement bon etjuste.
Il fut heureux lorsqu'il vivait sans réfléchir, au milieu de la nature, uniquement préoccupé des soins matérielsde la vie quotidienne.
Puis, il a cherché à paraître, à dominer.
Il a inventé la propriété.
Sont venus l'inquiétude.
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