Rousseau , Félicité et Bonheur dans les passions
Publié le 19/10/2022
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Introduction
Thème et question posée : Dans ce texte, Rousseau s’intéresse à l’idée du bonheur pour se poser la question
suivante : est-ce une bonne stratégie que de jouir sans limite des charmes de la vie, de satisfaire le mieux possible
tous ses désirs ?
Problématique : Si l’on définit le bonheur comme la maximisation des plaisirs, il semble évident que plus on goûte de
plaisirs, plus on se rapproche du bonheur.
Mais l’Histoire autant que l’actualité nous montre que les personnes qui
ont accès au plus grand nombre de plaisirs ne sont pas toujours, loin s’en faut, celles qui se disent les plus heureuses.
Thèse : La réponse de Rousseau est sans équivoque : pour se rapprocher du bonheur, il faut non pas laisser libre
cours à ses désirs, mais au contraire « modérer ses passions », c’est-à-dire désirer moins.
Annonce du plan : Afin d’établir cette thèse, Rousseau procède en trois temps.
D’abord il établit qu’il y a deux
manières incompatibles d’accéder à un état de satisfaction.
Dans un second temps, il montre que, si l’on tient
compte des effets de la durée et pas seulement de l’intensité, ces deux routes sont équivalentes.
Enfin, Rousseau
introduit un second argument : le rôle que joue notre imagination.
Cet argument donne définitivement l’avantage à
la voie de la modération.
I – Deux manières incompatibles d’accéder à un état de satisfaction
Je conçois deux manières d'arriver à la félicité.
L'une en satisfaisant ses passions et l'autre en les modérant :
par la première on jouit, par la seconde on ne désire point, et l'on serait heureux par toutes deux s'il ne
manquait à l'une cette durée et à l'autre cette vivacité qui constituent le vrai bonheur.
Les routes pour arriver
à ces deux états sont entièrement opposées, il faut donc opter,
La première phrase de Rousseau annonce qu’il existe « deux manières d’arriver à la félicité ».
Le terme de Félicité
semble synonyme de bonheur.
Pourtant la suite semble indiquer qu’il ne s’agit pas d’un « vrai bonheur ».
On
pourrait définir le mot de « félicité » plutôt comme un état de « désirs satisfaits ».
En effet, la fin de la phrase donne
la définition du « vrai bonheur » selon l’auteur : « cette durée et cette vivacité ».
La félicité n’est donc synonyme de
bonheur qu’à la double condition qu’elle soit intense et durable.
Rousseau présente ensuite ces deux méthodes : « par la première on jouit, par la seconde on ne désire point ».
Il
définit de fait la félicité comme une égalité entre ce que l’on désire et ce que l’on obtient.
Pour parvenir à cette
égalité, il faut soit augmenter ce qui est obtenu, soit réduire le besoin.
Il faut donc bien remarquer ici que la
modération ne signifie pas qu’il faut rester frustré, mais bien « cesser de désirer ».
Rousseau remarque dès le début qu’aucune de ces méthodes ne conduit au « vrai bonheur », qui semble donc
inaccessible.
En effet chacune est incomplète (« s’il ne manquait à l’une cette durée et à l’autre cette vivacité »).
Le
plaisir ne dure pas et débouche sur un autre désir, et la modération est certes durable, mais elle manque d’intensité.
L’enjeu n’est donc pas d’atteindre le bonheur, mais de trouver la voie qui s’en approche le plus.
A ce stade, le constat est plutôt pessimiste, aucune méthode ne permet d’accéder au bonheur.
On peut cependant
se demander si l’une des deux s’en approche plus que l’autre.
C’est ce que se propose la suite du texte.
La première idée qui viendrait à l’esprit serait de combiner les deux méthodes pour obtenir à la fois la vivacité et la
durée.
Mais Rousseau affirme que cela est impossible : les deux routes sont « entièrement opposées, il faut donc
opter ».
Il ne le démontre pas et le tient pour évident.
Est-ce nécessairement le cas ? Il semble que oui : réduire son
désir rend ensuite sa satisfaction inutile, voire contre-productive.
Une personne qui parviendrait à annuler sa faim
(au moyen d’un médicament adapté, d’un « anneau gastrique… », n’aurait aucun intérêt à se forcer à manger… le
résultat serait absurde.
Critique/perspective : On est en droit de se poser une question : est-il possible de cesser de désirer ? l’expression
« modérer ses passions » est paradoxale puisque « passion » est par définition ce qui est subi, devant quoi on est
passif.
Comment pourrait-on décider de ne plus désirer ou de désirer moins ?
II – Les deux voies semblent équivalentes
et le choix est aisé si l'on compare les effets de l'un et de l'autre.
On ne saurait nier qu'un homme qui savoure
à longs traits le plaisir et la volupté ne soit actuellement plus heureux et ne jouisse mieux des charmes de la
vie que celui qui ne désire ni ne possède point.
Deux choses me semblent pourtant rendre l'état du dernier
préférable.
En premier lieu : plus l'action du plaisir est vive, et moins elle a de durée ; c'est un fait incontesté.
On perd donc sur le temps ce qu'on gagne sur le sentiment ; jusqu'ici tout serait compensé.
En indiquant que « le choix est aisé », Rousseau feint d’accepter une évidence.
En effet l’idée qui s’impose à tous
comme une évidence est qu’on est plus heureux lorsqu’on satisfait ses désirs, en comparaison d’un être un peu
terne qui ne désire presque rien.
Ce dernier évite bien la frustration, mais il nous semble qu’il passe à côté de
l’essentiel de la vie… Rousseau reconnaît cela mais prend soin d’ajouter l’adverbe « actuellement » (l’homme qui
jouit est « actuellement plus heureux »), adverbe que l’on peut comprendre comme « à un instant précis ».
Cela
laisse entendre que la conclusion sera différente de l’évidence car le rapport au temps, la durée est un élément qui
peut faire une différence.
Avant de la démontrer, Rousseau annonce directement sa thèse : « l’état du dernier » (celui qui se modère) est
préférable.
Contrairement aux apparences, c’est la seconde voie qui est préférable.
Mais pour établir cette certitude,
il annonce deux arguments.
Le premier argument consiste à prendre en compte la durée.
En effet, Rousseau rappelle que « la vivacité » et « la
durée » varient en sens inverse.
L’erreur initiale était de ne prendre en compte que la vivacité, c’est-à-dire l’intensité
du plaisir.
Si l’on élargit notre vision, on s’aperçoit donc que la jouissance à tout prix n’est pas supérieure à la voie de
la modération.
Cet argument annule donc l’avantage....
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