ROUSSEAU: Etat, lois et volonté générale
Publié le 27/04/2005
Extrait du document

Le texte est essentiellement centré sur la notion de volonté générale. Elle est introduite par une question ( « On demande « ) à laquelle Rousseau apporte une réponse indirecte en déplaçant le problème ( « Je réponds que la question est mal posée « ). La question initiale souligne l'apparente contradiction entre la liberté de l'individu et le fait qu'il obéisse à des lois qu'il désapprouve parfois;la réponse de Rousseau consiste à montrer comment la volonté générale transcende celle de l'individu; il peut alors éprouver cette thèse en prenant le cas de l'opposition entre l'avis particulier et la volonté générale : en la suivant l'individu fait ce qu'il veut véritablement.

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l'expression d'une volonté à laquelle il participe.C'est ainsi qu'est introduite la notion de volonté générale, « volonté constante » à la différence des volontésvelléitaires et capricieuses des individus.
La loi, si elle est modifiable, est tout de même faite pour durer longtempset procurer la stabilité à la vie politique et sociale.
Les lois sont donc l'expression de la volonté générale.
C'est surcette expression, et notamment sur sa base qu'est la Constitution, que se fonde le statut de citoyen et que laliberté peut être garantie.
Ce dernier point se comprend si l'on pense au fait que la « constance » de la volontégénérale garantit l'individu contre les excès de l'arbitraire d'un despote capable de changer les règles du jour aulendemain.Rousseau complète cette thèse en décrivant ce qui, dans un État de droit correspondant aux exigences du contratsocial, se passe lors du vote d'une loi.
Le texte devient ici plus difficile et paradoxal : comment en effet comprendrequ'on ne demande pas aux votants « s'ils approuvent la proposition ou s'ils la rejettent, mais si elle est conforme ounon à la volonté générale qui est la leur » ? La formule, à force d'être paradoxale, n'est-elle pas contradictoire? Leparadoxe ne se lève que si l'on remarque que dans le premier membre de phrase il s'agit de l'avis personnel desindividus munis de tels et tels intérêts particuliers.
Dans le deuxième en revanche, il s'agit de l'avis des mêmesindividus mais en tant que citoyens ayant en vue le bien commun.Cette distinction mérite un exemple.
Si l'on fait voter une loi sur le calcul de l'impôt, on ne demande pas à chaquevotant si elle l'avantage plus que la précédente, mais s'il la pense plus juste ou économiquement plus cohérente.
Ilfaut donc miser sur le fait que chacun pensera non pas en tant que personne privée mais en tant que « membre dusouverain », selon l'expression de Rousseau.Cette démarche qui invite à mettre entre parenthèses l'intérêt particulier pour penser en termes de bien public nesignifie pas que toutes les mesures seront adoptées à l'unanimité : il peut et il doit y avoir des divergences dans laconception de la justice sociale et des moyens de la garantir, ou dans les conceptions des rapports entre le pouvoirjudiciaire et le pouvoir exécutif, etc.D'où la nécessité d'envisager le cas, cité d'ailleurs au début du texte dans le cadre du « problème mal posé », del'opposant minoritaire et de la façon dont il peut considérer la législation adoptée contre son avis comme étantquand même la sienne.
Ici encore Rousseau donne une formulation presque provocante, puisqu'il s'agit de se direque l'on s'était trompé sur le contenu de la volonté générale et qu'il vaut mieux qu'il en soit ainsi.Doit-on nécessairement suivre Rousseau sur ce terrain pour approuver le principe de la démocratie? Rousseau prôneun respect absolu et sans aucune restriction de la volonté générale : dès lors que le vote a eu lieu, ce qui n'étaitque la volonté du plus grand nombre doit être voulu par tous sans état d'âme et sans y revenir.
Un tel idéal justifieégalement la grande méfiance de Rousseau à l'égard des « factions », des partis politiques, qui selon lui ont uneinvincible tendance à privilégier une logique partisane, par exemple d'opposition systématique, par rapport à unelogique réellement citoyenne.On peut ajouter que ce schéma ne vaut que si les minoritaires ont véritablement l'impression d'avoir été écoutés etentendus, sans quoi ce système serait générateur de frustrations et de rancoeur contre ce qui ne serait plus que lesystème du groupe au pouvoir.
De même, il est capital que la Constitution de l'État précise qu'en cas de désaccordtotal et profond, un individu a le droit de s'exiler et de s'insérer dans un autre État dont le fonctionnement seraitplus conforme à ses convictions.
Conclusion
La vision de la volonté générale que propose Rousseau est à la fois séduisante et exigeante, elle requiert de la partde chacun une véritable vertu citoyenne.
Rousseau était bien conscient de cette difficulté et attribuait lesdésordres politiques au fait que les individus conservaient souvent l'esprit égoïste caractéristique de l'état de natureet qui pousse à chercher avant tout son propre avantage, au lieu d'accorder leur façon d'être au cadre politique etsocial.Il est également important de méditer cette conception pour pouvoir porter un regard critique sur les conceptionsqui fondent le fonctionnement de la politique sur la concurrence des intérêts privés présentés comme tels et relayéspar les « groupes de pression », les « lobbies ».
Cette conception rejette l'idée de volonté générale comme une vuede l'esprit et mise sur des compromis pragmatiques entre les intérêts privés.
Il y a là un vaste débat,particulièrement dans les États possédant une tradition étatique forte.
ROUSSEAU (Jean-Jacques). Né à Genève en 1712, mort à Ermenonville en 1778. Il n'est pas dans notre propos de résumer la vie de Rousseau, sou séjour aux Charmettes chez Mme de Warens, àMontmorency chez Mme d'Épinay, ses travaux de musique, sa persécution par les catholiques comme par lesprotestants, son voyage en Angleterre après sa fuite de Suisse ou l'hospitalité du marquis de Girardin à Ermenonville.Non plus que la mise à l'Assistance Publique des cinq enfants qu'il eut de Thérèse Levasseur, ou sa brouille avec.
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