Devoir de Philosophie

Ratio et logos de M. HEIDEGGER

Publié le 05/01/2020

Extrait du document

heidegger

Ratio et logos

M. HEIDEGGER (1889-1976)

 

Disciple de Husserl, Heidegger a fait scandale en disant que la science ne pense pas. Il distingue en effet la raison calculante (ratio en latin veut dire calcul) des techno-sciences modernes et la raison méditante (le logos grec) propre à la pensée philosophique.

 

La « philosophie » est dans la nécessité constante de justifier son existence devant les « sciences ». Elle pense y arriver plus sûrement en s’élevant elle-même au rang d’une science. Mais cet effort est l’abandon de l’essence de la pensée. La philosophie est poursuivie par la crainte de perdre en considération et en validité si elle n’est science. On voit là comme un manque qui est assimilé à une non-scientificité. L’Être en tant que l’élément de la pensée est abandonné dans l’interprétation technique de la pensée. La « logique » est la sanction de cette interprétation, en vigueur dès l’époque des sophistes et de Platon. On juge la pensée selon une mesure qui lui est inappropriée. Cette façon de juger équivaut au procédé qui tenterait d’apprécier l’essence et les ressources du poisson sur la capacité qu’il a de vivre en terrain sec. Depuis longtemps, trop longtemps déjà, la pensée est échouée en terrain sec. Peut-on maintenant appeler « irrationalisme » l’effort qui consiste à remettre la pensée dans son élément ?

 

Martin Heidegger, « Lettre sur l’humanisme » (1947), dans Questions III, trad. R. Munier, coll. « Classiques de la philosophie », Gallimard, 1966.

heidegger

« manque qui est assimilé à une non-scientificité.

L'Être en tant que l'élément de la pensée est abandonné dans l'interprétation technique de la pensée.

La « logique » est la sanction de cette interprétation, en vigueur dès l'époque des sophistes et de Platon.

On juge la pensée selon une mesure qui lui est inappro­ priée.

Cette façon de juger équivaut au procédé qui tenterait d'apprécier l'essence et les ressources du poisson sur la capa­ cité qu'il a de vivre en terrain sec.

Depuis longtemps, trop longtemps déjà, la pensée est échouée en terrain sec.

Peut-on maintenant appeler « irrationalisme » l'effort qui consiste à remettre la pensée dans son élément ? Martin HEIDEGGER,« Lettre sur l'humanisme» (1947), dans Questions III, trad.

R.

Munier, coll.

« Classiques de la philosophie », Gallimard, 1966.

POUR MIEUX COM.PRENDRE LE TEXTE.

Dans l'expression : « l'interprétation technique de la pen­ sée », le terme « technique » ne doit pas être compris au sens restreint d'application d'une science, d'autant plus que science et technique ne sont guère séparables dans les activités scientifiques contemporaines les plus avan­ cées.

L'interprétation technique de la pensée comprend les sciences et renvoie à une rationalité calculatrice au ser­ vice d'une domination des choses et des hommes.

Si la philosophie, pour de fausses raisons de prestige, adopte cette interprétation, elle ne peut qu'échouer au sens où le poisson s'échoue hors de l'eau, son élément, et meurt.

Cette comparaison permet de comprendre en quoi !'Être est I' « élément » de la pensée ; l'élément n'est pas une partie, mais le milieu où se déploie la pensée quand elle s'interroge sur le sens de !'Être, sur la vérité de !'Être, alors que diverses sciences explorent des domaines particuliers de I' « étant ».

On remarquera que cette fascination de la philosophie par la science a, selon Heidegger, commencé dès l'époque de Platon, mais n'a fait que s'accentuer.

Par la dernière phrase, Heidegger repousse une accusation d'irrationalisme qui relève d'une conception purement « technique » de la rationalité.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles