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Raison et loi naturelle de CICÉRON

Publié le 06/01/2020

Extrait du document

Cicéron entend montrer que « le droit a son fondement, non dans une convention, mais dans la nature ». Par l'usage de la raison, l'homme participe de la nature divine et communique avec un ordre universel.

 

Cet animal prévoyant, judicieux, complexe, pénétrant, doué de mémoire, capable de raisonner et de réfléchir, auquel nous donnons le nom d’homme, a été engendré par un Dieu suprême qui l’a richement doté. Seul parmi tous les vivants et entre toutes les natures animales, il raisonne et il pense ; cela est refusé aux autres. Or qu’y a-t-il, je ne dis pas [seulement] dans l’homme, mais dans tout le ciel et sur la terre, de plus divin que la raison, qui arrivée à maturité et à sa perfection est justement appelée sagesse ? Puis donc qu’il n’y a rien de meilleur que la raison et qu’elle se trouve dans l’homme et en Dieu, elle crée entre Dieu et l’homme une première société. Si la raison leur appartient à l’un et à l’autre, la droite raison leur est aussi commune. Or la droite raison, c’est la loi et par la loi aussi nous devons nous croire, nous autres hommes, liés aux dieux. Où il y a communauté de loi, il y a aussi un droit commun, et ceux entre qui il existe cette communauté doivent être regardés comme étant de la même cité ; encore bien davantage s’ils obéissent aux mêmes commandements, aux mêmes pouvoirs. Or ils obéissent à l’ordre qui règne dans les cieux, au principe divin qui anime le monde, au Dieu tout puissant ; de sorte qu’on peut regarder cet univers comme la patrie commune des dieux et des hommes. [...]

 

De toutes les idées qui font l’entretien des doctes, la plus importante est celle qui nous fait clairement connaître que nous sommes nés pour la justice, et que le droit a son fondement, non dans une convention, mais dans la nature. Cette vérité paraîtra évidente si l’on considère les liens de société qui unissent les hommes entre eux. Il n’y a pas en effet d’êtres qui, comparés les uns aux autres, soient aussi semblables, aussi égaux que nous. Si l’étrangeté des coutumes, la vanité des opinions ne nous détournaient pas, ne pliaient pas nos faibles âmes moutonnières, nul homme ne serait aussi semblable à lui-même que tous le seraient à tous. Quoi que l’on veuille poser de l’homme, ce que l’on pose s’applique à tous. C’est bien la preuve qu’il n’y a pas dans le genre humain de dissemblances, autrement la même définition ne s’étendrait pas à tous. En effet la raison, qui seule nous élève au-dessus des bêtes, qui nous sert à interpréter, à raisonner, à réfuter, à discuter, à conclure est commune à tous les hommes ; la science peut être différente, le pouvoir d’apprendre est partagé par tous.

Cicéron, Des lois. Livre I, VIT et X; GF, 1965, pp. 133-6

« s'étendrait pas à tous.

En effet la raison, qui seule nous élève au­ dessus des bêtes, qui nous sert à interpréter, à raisonner, à réfuter, à discuter, à conclure est commune à tous les hommes; la science peut être différente, le pouvoir d'apprendre est partagé par tous.

CICÉRON, Des lois, Livre I, VII et X; GF, 1965, pp.

133-6 POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE .La conception ici défendue prétend fonder le droit et les institutions politiques sur une nature gouvernée par « la rai­ son, la puissance, l'esprit des dieux immortels ».

C'est remonter très haut, comme le fait remarquer un des inter­ locuteurs du dialogue : « Dieux immortels! que tu vas chercher loin les principes du droit! » Cicéron emprunte au stoïcisme le concept d'une raison divine qui gouverne toutes choses, ou comme le dira Sénèque « une part de l'esprit divin plongée dans le corps des hommes » Cette raison forme donc un lien cosmique et un lien social : « nous avons une raison qui nous lie les uns aux autres et nous rattache aux dieux, alors que les animaux n'ayant pas de raison, n'y participent pas et ne peuvent avoir avec nous aucun rapport de justice ».

Par la raison nous sommes citoyens de l'univers, comme le pro­ clamera Marc-Aurèle.

Toutefois, Cicéron ne néglige pas la diversité humaine, avec ses inévitables « écarts de conduite », manquements à cette loi qui définit notre vocation à la justice.

Mais il coupe court à tout relativisme éthique : « la loi est la raison suprême, gravée en notre nature, qui prescrit ce que l'on doit faire et interdit ce qu'il faut éviter de faire ».

La raison dans l'homme est à la fois une garantie d'uni­ verselle obligation à la justice, et un instrument de recon­ naissance de la loi (dont Cicéron n'exclut pas qu'on puisse mal user) : « il n'y a pas d'homme, quelle que soit sa nation, qui ayant la nature pour guide ne puisse parvenir à la .vertu ».

La raison désigne donc ici l'ordre, au double sens de norme naturelle et d'impératif, de nature et de devoir, d'exigence et d'existence.. »

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