Qu'est ce qu'une hypothèse scientifique ?
Publié le 27/02/2005
Extrait du document


«
l'aider à rendre son observation plus complète.
Photographe passif des phénomènes, l'observateur« écoute la nature et écrit sous sa dictée ».
§ L'interprétation ou hypothèse .
Le fait constaté et le phénomène bien observé appellent l'idée.
§ L'expérimentation .
Le savant institue une expérience qui puisse confirmer ou infirmer l'hypothèse. L'expérience n'est qu'une « observation provoquée ou préméditée dans le but de vérifier la validité d'une hypothèse ».
Claude Bernard montre bien que, sans hypothèse, il n'existe pas de méthode expérimentale.
Une idée anticipée est le point de départ de tout raisonnement expérimental.
Sans cela, le savant ne pourraitqu'accumuler des observations stériles.
Mais d'un autre côté, Bernard affirme que l'observateur doit, sous peine de prendre les conceptions de son esprit pour la réalité, éviter toute idée préconçue et enregistrerpassivement les phénomènes.
Le développement des sciences expérimentales amènera Bachelard à s'opposer à cette idée de passivité de l'observateur.
Une des grandes découvertes de Bernard lui-même, la fonction glycogénique du foie, nous en fournira le bon exemple.
Les théories en vigueur divisaient le monde vivant en deux règnes distincts : les végétaux, quiproduisent le sucre, et les animaux, qui le consomment et en tirent leur énergie.
Or, Bernard découvre du sucre dans le sang de chiens nourris exclusivement de viande.
L'organisme animal produit donc par lui-mêmedu sucre et c'est dans le foie que Bernard localisera cette production.
Il semble bien ici, conformément à ce que dit Bernard , que c'est un fait –la découverte de sucre dans le sang de chiens nourris exclusivement de viande- qui provoque l'hypothèse de la fonction glycogénique du foie.
Mais ce n'est qu'une apparence.
Carce fait ne peut faire naître une telle hypothèse que parce qu'il est problématique, ou, comme le disait Louis de Broglie , « polémique ».
Et s'il est problématique qu'en regard des théories antérieures admises.
Si aucune théorie n'avait soutenu la thèse de la production exclusivement végétale du sucre, le fait de la découverted'un sucre animal n'aurait posé aucun problème et fait naître aucune hypothèse.
L'hypothèse naît donc d'unproblème et le problème dépend lui-même directement d'un contexte théorique.
Illustrons plus précisément cette idée par un exemple emprunté cette fois à la physique.
Qu'est-ce quiconduisit Newton à la formulation de la théorie de la gravitation universelle ? La pomme que, paraît-il, il reçut sur la tête n'explique évidemment rien, mais on peut remarquer qu'ici comme souvent la légende de lascience rejoint l'inductivisme en invoquant les « faits », fussent-ils imaginaires, à l'origine de la théorie.
Il faut en vérité comprendre la nature des problèmes que la physique du temps de Newton pouvait se poser, etleurs présupposés théoriques.
Pour ce faire, un aperçu de l'histoire des théories physiques du mouvementn'est pas inutile.
Pour l'antiquité grecque, avec Aristote , le mouvement est par nature passager, transitoire.
Son essence estde finir.
Ce n'est pas un état de la matière.
L'univers n'est en ordrequ'à l'état de repos.
Le mouvement est alors l'indice d'un désordre–soit comme la cessation de l'état naturel d'ordre (lancer une pierre enl'air)- soit comme tendance à rétablir l'ordre naturel (quand la pierreretombe).
Cette théorie semble, il faut le souligner, tout à faitcorrespondre à certaines données évidentes de l'expérience : chacunpeut constater qu'aucun mouvement ne dure indéfiniment.
A partir duXVII ième siècle, les théories modernes du mouvement vontpromouvoir celui-ci au rang de passage à celui d'état.
Leur principefondamental est le principe d'inertie, selon lequel un corps a tendanceà conserver tout état nouveau qui lui est communiqué : lorsqu'uncorps en mouvement s'arrête, c'est donc dû, non comme le croyaitAristote à des causes inhérentes, mais à des facteurs extérieurs, tels les frottements, la résistance de l'air, etc.
Or ce principe d'inertie va poser des problèmes nouveaux.
Par exemple,comment se fait-il que la Terre tourne autour du soleil, puisque, selonce principe d'inertie, elle devrait se mouvoir d'un mouvement rectilignecorrespondant à une tangente de son orbite ? Pour Copernic qui, au XVI ième, ne connaissait pas le principe d'inertie, le problème ne seposait pas, et Copernic pouvait considérer alors, comme les Grecs, le mouvement circulaire des planètes comme un mouvement naturel et auto-explicatif.
A l'époque de Newton au contraire compte tenu de l'état nouveau des théories du mouvement, ce qui n'était pas un problème centcinquante ans plus tôt en devient un.
Il faut expliquer le mouvement orbital des planètes, qui ne s'expliqueplus de lui-même.
La théorie de la gravitation sera cette explication.
Conclusion. L'hypothèse, sous ses différentes formes, a donc des rôles indispensables, essentiels même, dans la science.
Celle-ci ne progresse, comme l'affirmait Cl.
BERNARD, que « par la puissance créatrice del'esprit », et c'est cette puissance que manifeste l'hypothèse..
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