Qu'est-ce que le temps ?

« En nous acclimatant à l'existence, l'enfance nous fait oublier ou négliger l'extra­ ordinaire fait d'exister.

La raison sur ce point ne peut que constater son impuis­ sance : rien n'explique que nous soyons au monde ; nous, tels que nous sommes, et dans un monde tel.

Rien ne va de soi.

Tout est épouvantablement surprenant.

C'est exactement cela que l'homme oublie dans la quotidienneté de la vie pra­ tique et affairée; et c'est cette inquiétude que la philosophie doit éveiller.

Le cours de l'ex istence humaine se déroule dans trois temporalités différentes.

Le temps cosmique et biologique, notre temps naturel, nous relie au cosmos et à la nature, borne notre vie d'une extinction fatale, source d'une perpétuelle angoisse.

La vie sur terre est une navigation en plein cosmos qui devrait, si nous y réflé­ chissions, nous donner le sens et le goût de la grandeur et de la dignité.

L'inté­ rêt jamais démenti pour l'astrologie, et aujourd'hui pour l'astrophysique, signale notre appartenance aux étoiles.

La deuxième temporalité est sociale : jours ouvrables et jours chômés, fêtes et cérémonies, événements historiques et commémorations.

L'on peut vivre en marge de ce temps social.

La troisième temporalité est personnelle : les âges de la vie, l'enfance qui ne cesse pas en nous, l'adolescence emplie de rêves et d'illusions, la maturité qui exige des réussites impossibles, la vieillesse qui devrait être sage, les joies et les peines qui couturent l'âme et le corps, les victoires et les échecs ; enfin l'angoisse et le soulagement de finir cette vie.

Les personnes humaines ont-elles un avenir après la mort ? Nul ne le sait, mais il est du moins certain que cela n'est pas impossible, car naître est plus extraordi­ naire que renaître.

Les grandes religions ont imaginé la migration des âmes de corps en corps avant la fusion dans l'Un indifférencié (bouddhisme) ; les trois religions scripturaires, la résurrection des corps et le Jugement dernier.. »