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Quelle est la part du social dans la vie psychologique ?

Publié le 22/02/2012

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Auguste Comte a dit que l'individu séparé de la société est une abstraction ; la société est en effet le milieu naturel de l'homme, et il est devenu banal de rappeler la formule d'Aristote : « l'homme est un animal social », mais cette formule garde tout son sens et vaut pour tous les moments et toutes les manifestations de notre vie. Il est cependant assez difficile de discerner ce qui en nous est purement individuel et à partir de quel point nous sommes marqués de l'empreinte sociale ; mais il reste que tout en nous n'est pas réaction organique ou simple retentissement d'une telle réaction : tout ce qui est détermination proprement dite — sentiment ou idée — n'a pu venir enrichir notre individualité, incapable elle-même de se dépasser, que par la »vertu des influences sociales. Ce sont ces influences que nous allons chercher à montrer, par une rapide revue des principales fonctions de la vie psychologique.

« de fer qui remplit la même fonction qu'autrefois une plume d'oiseau.

Les groupes spéciaux tendent, de leur côté, àl'innovation linguistique, à cause de leurs besoins spéciaux, ainsi opération ne signifie pas la même chose pour leboursier, le chirurgien, le militaire.

Mais si les langues spéciales commencent avec le sens spécial que les différentsgroupes sociaux donnent au même mot, elles se détachent assez vite de la langue vulgaire et se forgent desmoyens spéciaux, soit en déformant les mots eux-mêmes, soit en dénaturant le sens des mots, soit en employantdes mots inventés de toutes pièces. 4° Enfin, la mentalité humaine toute entière s'expliquerait par la vie sociale.

Les catégories de la pensée sont, pourDurkheim, la résultante des conditions sociologiques.

L'espace, par exemple, c'est d'abord le terrain sur lequel campeet chasse la tribu, prolongé par la pensée en d'autres terrains de chasse et de campement ; la notion de cause,c'est une relation abstraite dégagée de la constatation de l'influence efficace des forces collectives sur lesconsciences, etc.

C'est ce qui conduit Durkheim à penser que « puisque le monde exprimé par le système total desconcepts est celui que se représente la société, la société seule peut nous fournir les notions les plus généralessuivant lesquelles il doit être représenté.

Seul un sujet qui enveloppe tous les sujets particuliers est capabled'embrasser un tel objet ».

Ainsi, l'individu n'est pas naturellement fait pour découvrir la vie conceptuelle ; la sociétéau contraire offre naturellement à l'individu le modèle d'organisation qui lui permet de s'élever à une mentaliténouvelle et supérieure.Telle est, dans ses grandes lignes, l'explication rationnelle que la sociologie fournit à la psychologie des facultéssupérieures de l'homme.

Sans rentrer dans un examen critique approfondi de cette théorie, voici ce qu'il faut enretenir : 1) la vie commune, l'état de société, exaltent les puissances individuelles ;2) la société agit comme puissance conservatrice, comme tradition ; elle est la gardienne des acquisitionsantérieures qu'elle transmet à l'individu, et elle exige de l'individu qu'il s'assimile à elle, d'où la pression sociale et lecaractère de contrainte que présentent les représentations collectives ;3) enfin la structure sociale se reflète jusqu'à un Certain point dans la pensée des individus ; c'est ce que montre enparticulier l'étude de la formation et de l'évolution du langage.Il est donc possible que la vie sociale ait aidé à la vie mentale, en excitant l'intelligence, en conservant, lesconcepts acquis, en présentant à l'homme le spectacle de la société, en le forçant si l'on peut dire à penserl'organisation sociale et ses variations, bref en créant des conditions favorables à l'exercice de la pensée.

Mais lasociété ne crée pas l'intelligence elle-même ; ici comme ailleurs, la vie sociale exerce une action considérable dedirection, mais non de création, sur les facultés individuelles.Pour terminer, voyons l'influence qu'exerce la société dans le domaine de l'activité individuelle. 1) La vie sociale, par suite de l'importance de l'imitation, détermine dans l'individu des actions que seule elle peutexpliquer.

Les divers phénomènes de la mode, de la coutume, des moeurs sont des exemples typiques de cetteactivité imitatrice.2) D'autre part, c'est pour beaucoup sous l'influence de la société que nous contractons au cours de notre vie deshabitudes capables de modifier dans une large mesure notre personnalité.3) Dans le domaine de l'activité volontaire elle-même, les sociologues ont présenté une théorie tendant à expliquerla volonté par le milieu social où se trouvent les individus.

Pour Ch.

Blondel, il n'y a volonté que parce qu'il y a,présent à la conscience, un système d'impératifs collectifs de tout ordre, devant lequel notre conduite, si elle ne s'yconforme pas, a tout au moins à se justifier.

La puissance effective de ce système varie avec les individus, suivantl'aptitude des organismes et des tempéraments à incarner pour ainsi dire les représentations collectives et à lesaccepter comme principe d'action.

« Dire que la volonté est intelligence, raison, attention, prévision, anticipation,c'est dire que l'homme en agissant se voit agir et prévoit comme il agira.

Mais ce spectateur, tout en étant en nous,n'est pas nous-même, c'est la conscience du groupe installée en nous avec ses principes de connaissance etd'action, devant laquelle, comme juge, sedéroule le cours de nos pensées aussi bien que de nos actions ».Mais il faut tout de même remarquer que nous ne sommes pas seulement membres d'un groupe, nons sommes aussides consciences individuelles et des organismes : tous les individus ne réagissent pas de la même façon sous lapression sociale, et ici encore, l'évolution psychologique de l'individu n'est pas uniquement conditionnée par lesinfluences sociales qui agissent sur lui ; il y a une évolution intérieure, préparée, voulue, qui est le produit de saréflexion personnelle.

Quand on connaît la race, le milieu, la société, il reste à étudier le tout complexe qu'estl'individualité,-synthèse sans doute de ces éléments, mais synthèse où les éléments ne se retrouvent pas et qui estcapable à son tour de réaction propre. Conclusion.

Ainsi l'influence prépondérante de la société sur la vie psychologique tout entière de l'individu ne doit pas nous faire oublier le caractère personnel de cet individu.

Il y aurait une égale erreur à faire de la psychologiesans tenir compte de la société, et à expliquer uniquement par la société le comportement de l'individu.

Selon laformule de M.

Lalo « pour ce sociologisme exagéré, la vie sociale forme la vie psychologique ; pour un individualismeou un psychologisme non moins excessif en sens inverse, elle la déforme ; la vérité, c'est qu'elle la transforme ».

Lavie totale d'un individu humain est la résultante de forces dont les unes sont d'origine individuelle, c'est-à-direpsychologique, et les autres d'origine collective, c'est-à-dire sociologique.

Telle est la complexité irréductible de lanature humaine.. »

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