Que pensez-vous de la formule de Ribot : « C'est la tendance qui est le fait primordial de la vie affective » ?

« H>6 PSYCHOLOGIE ne se rattache à quelque besoin naturel, ni davantage de besoin naturel qui n'ait été modifié par l'expérience de la vie affective.

B.

La vie affective.

-Le mot " sensibilité » étant amphibologique - ou parle de la sensibilité d'une balance ou d'un thermomètre, c'est-à-dire de son pouvoir de nous procurer certaines connaissances -, les psycho­ logues modernes lui ont substitué celui de " affectivité », qui désigne le pouvoir de ressentir du plaisir ou de la douleur.

Par suite on réunit sous .le terme de cc vie affective >> l'ensemble des faits psychiques qui constituent les diverses manières d'être de notre affectivité : le plaisir et la douleur, les sentiments, les émotions et les passions.

Les tendances, étant le ressort de l'action, sont parfois rattachées à la partie de la psychologie intitulée " .!a vie active ».

~fais on les rattache plus habi­ tuellement à la vie affective sur laquelle elles exercent une influence déterminante.

Nous revenons ainsi à la pensée de RrnoT, pour qui "c'est la tendance qni est le fait primordial de la vie affective n.

Que faut-il en penser? U.

-- DISCUSSIO:ll.

Le sens de l'adjectif "primordial» paraît à première vue assez clair.

'.ois quand on veut ] 'expliciter avec précision on se prend à hésiter.

Dans rr primordial » il y a " premier », mais dans quel sens la tendance est-elle première ? A.

Primauté d'origine.

- S'en tenir à l'étymologie (primordium, com­ mencement), cc primordial» désignerait une primauté d'origine ou une priorité chronologique.

Dans ce cas, la proposition de RrnoT voudrait dire que la tendance est le fait premier de la vie affective.

· Comprise comme une simple antériorité de la tendance par rapport aux autres faits de la vie affective, particulièrement par rapport au plaisir et à la douleur, cette thèse paraît de prime abord indiscutable : les êtres vivants sont orientés et tendus vers certaines directions longtemps avant d'être capables de jouir et de souffrir, capacité à laquelle une grande masse d'entre eux, les végétaux, n'atteindront jamais.

Mais on peut se demander si, antérieurement à l'apparition de cette capacité et indépendamment d'elle, les tendances des êtres vivants peuvent être rangées parmi les faits d'affectivité.

La réponse sera certainement négative si nous considérons la plante et on ne Yoit pas pourquoi elle serait affirmative quand on considère l'embryon animal ou humain, qui en sont encore à la vie végétative.

Si la tendance peut être classée parmi les faits affectifs, c'est, sembie-t-il, non pas à cause de sa nature propre, mais à cause des états de plaisir et de douleur qui l'accompagnent ou à 1 'origine desquels elle se trouve.

La tendance est le fait primordial de la vie.

Il ne semble pas qu'on puisse la considérer comme ie fait primordial de la vie affective.

B.

Primauté de dépendance 7 -Nous sommes ainsi amenés à une autre interprétation du mot " primordial » : la primauté de la tendance ne serait pas seulement d'ordre temporel; elle impliquerait aussi une priorité. »