Que pensez-vous de cette affirmation de Royer-Collard: Les libertés, ce sont des résistances ?
Publié le 11/07/2010
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La Boétie dans De la Servitude volontaire, ou « Contr’Un « pose la question de savoir comprendre comment des millions de personnes peuvent obéir à un seul homme aux dépens de leur liberté : c’est-à-dire comprendre comment une servitude volontaire est possible. Plus exactement c’est la question de l’autorité fixant l’obéissance qui pose problème et c’est bien ce que l’on peut comprendre avec cette interrogation dès le début de l’ouvrage : « Je désirerais seulement qu’on me fît comprendre comment il se peut que tant d’hommes, tant de villes, tant de nations supportent quelquefois tout d’un tyran seul, qui n’a de puissance que celle qu’on lui donne, qui n’a de pouvoir de leur nuire qu’autant qu’ils veulent bien l’endurer, et qui ne pourrait leur faire aucun mal s’ils aimaient mieux tout souffrir de lui que de le contredire «. Or l’Etat que dénonce ici La Boétie n’est pas un Etat de droit, mais un Etat de police ou une monarchie absolue ne rendant pas compte de la liberté des individus. Or la liberté se conçoit bien ici dans un double sens qui est celui à la fois de la liberté naturelle qui ne souffre aucune résistance mais aussi de la liberté civile qui elle doit se comprendre dans la cadre de la loi. C’est bien aussi dans la genèse de l’avènement de la liberté que doit se comprendre cette réflexion sur le rapport entre les libertés et les résistances.
«
Transition : Ainsi les libertés ne sont que le fruit de nos résistances face à l'injustice, à la puissance d'autrui ou au joug del'extériorité.
Néanmoins, Proudhon a bien mis en exergue l'existence d'une liberté intérieure qui est renverser leliberté-résistance en ne le saisissant plus de l'extérieur mais du point de vue intérieur.
II – Libertés malgré soi a) Il apparaît que la véritable liberté est bien cette résistance face à soi-même comme on peut le voir dans cettecitation des Essais, III, 12 : « La vraie liberté, c'est de pouvoir toute chose sur soi ».
Il s'agit de résister à soi- même.
Montaigne distingue ici au moins deux type de liberté : une liberté intérieure et une liberté extérieure.
Or la dernière semble hiérarchiquement supérieure à cette première dans la mesure où elle marquerait véritablement unevictoire contre soi.
Plus exactement, c'est faire référence au travail de méditation et du contrôle-maîtrise de soi.Dans ce cas, la liberté n'est pas simplement le pouvoir de faire ce que je veux ou de pouvoir étendre mon pouvoirnaturel sur toute chose extérieure qui se présente à moi mais bien réussir à prendre le dessus sur mes passions etmon désir.
C'est donc obtenir la liberté de l'âme ou de l'esprit plutôt que celle du corps.
Si l'on peut dire que la vraieliberté c'est pouvoir avoir le contrôle sur soi, c'est dans la mesure où l'homme qui ne maîtrise pas ses passions estalors dépendant de la tyrannie de ses passions et de ses émotions, le jouet de son désir et de son imagination.
Ence sens, il ne se détermine à agir non pas de manière autonome ou indépendante mais bien de façon hétéronomique.Il ne se contrôle, il n'est que l'instrument de la réalisation de ses désirs.
C'est pourquoi la figure du sage est bien cethomme qui réalise la paix intérieure, c'est-à-dire qui équilibre ses désirs et possède un pouvoir de détermination parsa volonté sur soi absolu.b) De cette résistance apparaît la liberté qui n'est rien d'autre que l'autonomie de la volonté de l'individu.
C'est alorsque doit se développer l'esprit de discipline afin que cette liberté ne soit pas le jeu des passions et des désirs.
Ainsicompris la résistance est une contrainte nécessaire à la liberté première de l'homme devant conduire l'homme versune liberté civile et morale, comme le propose Kant dans la Critique de la raison pure : « La contrainte qui réduit et finit par extirper le penchant persistant qui nous porte à nous écarter de certaines règles s'appelle discipline.
»Principalement donc la discipline est un concept lié à la notion de contrainte.
Elle est donc d'un usage négatif si l'onpeut dire.
Elle forme un obstacle à certains penchants afin de redresser l'homme aussi bien physiquement quemoralement dans le cas du sport ou de l'ascèse morale.c) C'est pourquoi la discipline ou « culture de la discipline est négative et consiste dans la libération de la volonté dudespotisme des désirs.
» comme le dit Kant dans la Critique de la faculté de juger .
Elle vise donc l'autonomie du sujet et son perfectionnement.
La discipline est alors une législation négative, notamment un système de précautionet d'examen de soi « devant lequel aucune apparence sophistique et fausse ne peut subsister, mais doit aucontraire se trahir aussitôt, nonobstant tout ce qui l'explique et l'excuse ».
L'autonomie est donc la liberté commecontraire de l'hétéronomie qui la contrainte de la volonté à des buts extérieurs développées par le désir, les passionsou encore l'imagination.
L'autonomie se comprend alors correspondance du soi à soi c'est-à-dire liaison intime du moiintérieur.
Transition : Ainsi la liberté intérieure comme intériorité se comprend au sein d'une résistance face à ses propres penchants, sesdésirs et passions.
L'autonomie de l'individu est cette partie essentielle de la liberté qui se conçoit alors commelibertés extérieure et intérieure.
Néanmoins les résistances doivent-elles aussi se faire contre nous-mêmes dans lasauvegarde du tissu social.
III – Libertés contre soi a) Toutefois, comme le remarque Montesquieu : « Ma liberté est de faire ce que les lois permettent » ( De l'esprit des lois , XI, 3).
Cette définition de la liberté s'oppose directement à l'idée selon laquelle être libre c'est faire ce que l'on veut, c'est-à-dire subir l'empire de sa volonté ou plus exactement subir l'emprise de ses désirs et de sespassions et agir comme un animal concupiscent.
Ainsi ma liberté selon Montesquieu est faire ce que je dois vouloir.La notion de devoir et de permission de la loi est essentielle, elle permet l'établissement d'une concorde entre leshommes et de les rendre inoffensifs entre eux.
La distinction essentielle repose alors sur la différence entre la liberténaturelle et la liberté civile puisque l'établissement de la loi signe l'établissement d'une société civile c'est-à-dire undépassement de l'état de nature et de l'état de guerre.
La liberté naturelle est donc le pouvoir que je peux avoir surtoute chose, c'est-à-dire que ma liberté ne s'arrête qu'à mon pouvoir de la prendre.
Elle semble illimitée mais ellecomporte les raisons du conflit avec autrui.
C'est en ce sens que le passage de l'état de nature à l'état civil marquela métamorphose de cette liberté naturelle en liberté civile c'est-à-dire que je limite volontairement ma puissanced'agir pour le bien commun et agit dans les limites de la loi, c'est-à-dire dans les limites que je me suis moi-mêmefixé avec l'accord d'autrui en vue de vivre en paix et en sécurité.
C'est pour le bien de tous et avec l'accord de lavolonté générale que je choisis de limiter ma puissance naturelle d'agir.
Cependant il ne s'agit pas d'une réduction dela liberté dans la mesure où il faut bien distinguer les deux différents types de liberté qui sont incompatibles etrelèvent de moments différents.
Il ne s'agit pas d'aliéner sa liberté mais bien de prendre la vraie mesure de la libertéqui ne relève plus alors du caprice mais de la raison.b) Bien plus, c'est dans le cadre du pacte social que les résistances contre ma liberté naturelle sont nécessairesafin de ne pas rendre caduc ce pacte et développer ma liberté civile.
Cette dernière se saisit au sein de la sociétéalors que l'autre se développe dans l'état de nature qui conduit nécessairement à l'état de guerre.
Par la formulationmême le pacte social se doit d'être neutre au risque sinon de rendre les clauses du contrat onéreuses pour une.
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