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Qu'attend on de l'art ?

Publié le 29/03/2010

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Nous traiterons le sujet en limitant l'art aux beaux-arts. Nous ne considérerons ainsi ni l'artisanat, ni l'art rituel.    I) Nous attendons d'une oeuvre d'art la satisfaction du désir    Désir : prise de conscience d'un manque, dont la satisfaction procure du plaisir. Le stoïcisme nous invite à discipliner nos désirs si on veut atteindre le bonheur.    a- Le spectateur attend d'une oeuvre d'art qu'elle échappe à ses attentes + expérience du beau  - Jauss : notion de l' « écart esthétique «: il existe une distanciation entre l'attente du spectateur vis-à-vis de l'oeuvre et l'oeuvre elle-même. Ainsi, nous pouvons dire que le spectateur attend d'une oeuvre d'art qu'elle renouvelle son horizon d'attente artistique, qu'elle échappe à son attente, c'est-à-dire qu'elle se distingue de la production contemporaine ou antérieure qui avait formé le goût du spectateur -modifiant ainsi ce que les générations suivantes attendront d'une oeuvre, etc...    b- L'artiste attend de son oeuvre l'expérience du bonheur  L'oeuvre en création est source de bonheur, ainsi que l'effort de remémoration pour la produire.    c- L'artiste attend de son oeuvre qu'elle le fasse échapper au devenir, à l'énantiodromie  A la différence d'une production d'ordre naturel ou d'un objet artificiel destiné à la consommation, qui sont essentiellement périssables, une oeuvre d'art est une production durable qui ouvre l'homme à une dimension d'intemporalité  (Hegel): « Les événements arrivent, mais aussitôt arrivés, ils s'évanouissent; l'oeuvre d'art leur confère de la durée, les représente dans leur vérité impérissable. L'intérêt humain, la valeur spirituelle d'un événement, d'un caractère individuel, d'une action, dans leur évolution et leurs aboutissements, sont saisis par l'oeuvre d'art qui les fait ressortir d'une façon plus pure et plus transparente que dans la réalité ordinaire. «). 

« elle-même : il invente, imagine, crée des fictions.

La réalité n'est pas copiée par l'artiste : elle est transfigurée,réinterprétée, voire réinventée.

Une musique n'imite pas le chant des oiseaux, une sculpture n'est pas une copiestricte du modèle (en figeant le modèle dans une pose, l'artiste change déjà la réalité, qui, elle, est changeante etfugace)..., l'exemple le plus parlant étant bien entendu l'art abstrait :quel objet réel Mondrian copierait-il ? c- L'artest source d'illusion et modifie le rapport que nous devons avoir à la réalité, c'est-à-dire à la vérité Si cettemodification de la réalité s'effectue par un travail spirituel, son résultat – l'oeuvre d'art – estnéanmoinsd'ordre sensible (son, couleur, forme...).

Le spectateur contemple (ou écoute) l'oeuvre d'art qui se donneà lui par la perception sensible.

Si le plaisir esthétique, le sentiment du beau, n'est pas un simple plaisir des sens,c'est bien sur notre affectivité sensible que joue l'art.

C'est sur ce point que Platon critique l'art, d'une part parceque l'art n'est qu'imitation de l'apparence sensible des choses, et donc presque dépourvu d'être – Platonconcevant l'art uniquement dans une perspective mimétique (l'oeuvre d'art est une copie de l'objet sensible).

L'objetsensible, une table par exemple, contient moins d'être, c'est-à-dire moins de réalité que l'Idée (l'idée de table), et lapeinture de l'objet (le tableau d'une table) contient encore moins de réalité que l'objet lui-même.

L'art participe à unprocessus de déperdition de la réalité, la réalité véritable étant du domaine de l'intelligible, c'est-à-dire du domainedes idées.

D'autre part, Platon reproche aux artistes d'inciter le public à se complaire dans les émotions sensibles,voire dans la sensiblerie, en provoquant un plaisir qui n'est pas purement intellectuel.

L'artiste est donc unillusionniste qui nous éloigne de la vérité et de la recherche de la vérité : "tous les poètes [...] ne sont que desimitateurs d'images [...] ils n'atteignent pas la vérité, et c'est ainsi qu'un peintre [...] fera sans rien entendre lui-même à la cordonnerie, un cordonnier qui paraîtra véritable à ceux qui n'y entendent pas plus que lui, et qui enjugent d'après les couleurs et les attitudes" (Platon, La République, X).

Ainsi, l'art modifie le rapport à la réalitécomprise comme vérité : l'artiste nous détourne du vrai en nous trompant, et nous détourne de la recherche du vraien nous flattant.

TR: Il apparaît donc que l'art permet un rapport spécifiquement humain à la réalité, parce que cerapport n'est pas un simple rapport d'immédiateté instinctive : on n'est plus asservi à la nature, et on produit"gratuitement", c'est-à-dire sans finalité utilitaire liée à la satisfaction des besoins.

Mais en tant que telle laproduction artistique est néanmoins matérielle, et dans la mesure où l'oeuvre d'art provoque en nous dessentiments, des émotions, l'art reste inscrit dans le sensible toujours mouvant, pluriel, irréductible.

En ce sens l'artmodifie notre rapport à la réalité comprise cette fois comme vérité, donc comme objective, universelle etnécessaire.

Mais l'art peut-il vraiment quelque chose "contre" la réalité et la vérité, et ceci du point de vue del'artiste comme de celui du spectateur ? L'art ne peut être une fuite radicale et définitive dans un monde imaginaireni pour l'artiste ni pour le spectateur.

S'il nous permet de supporter notre rapport à la réalité qui nous est imposéepar la société, il n'en est pas pour autant la reproduction complaisante.

Cependant, sa finalité affichée ne sauraitêtre de bouleverser la réalité, l'histoire ou l'organisation sociale.

L'art ne pourra modifier notre rapport à la réalitéque s'il préserve sa spécificité : être "inutile".

L'art éduque notre jugement et rend possible un nouveau rapport aumonde : il nous dévoile une vérité qui n'est pas celle de notre rapport quotidien à la réalité.

L'art nous détourne durapport quotidien au monde sans nous faire perdre le "sens des réalités".

L'art, en tant qu'il est une productionhumaine qui ne vise la satisfaction d'aucun besoin, mais qui s'inscrit néanmoins dans la réalité et la matérialitésensible, révèle en effet que l'homme est un être spirituel.

III) L'art, expression de l'esprit a- L'art appartient par excellence à l'ordre des réalités symboliques au travers desquelles l'être humain donne sens à ce qu'il est.

Si nouspouvons qualifier l'art de spirituel, c'est que celui-ci semble répondre à des besoins plus élevés que les seulesexigences matérielles, n'obéissant pas à une nécessite d'ordre vital.

=> exemple : si du jour au lendemain toutes lesoeuvres qui constituent le patrimoine culturel de l'humanité venaient à disparaître, l'espèce humaine n'en mourraitpas.

Elle pourrait en effet perdurer dans son être biologique sans le moindre problème.

Il n'est pourtant pas sûr quel'homme puisse rester, dans les conditions de cette survie animale, un être humain défini comme tel, car celareviendrait à amputer celui-ci d'une de ses dimensions constitutives.

- Nous avons en effet besoin pour prendreconscience de nous-mêmes de former une représentation de ce que nous sommes.

L'art constitue à cet égard laforme emblématique de ce besoin d'auto-représentation à travers laquelle l'homme prend conscience de lui-même.=> Hegel, Introduction à l'esthétique (1835) : « Le besoin d'art en général a ceci de rationnel que l'homme en tantque conscience s'extériorise, se dédouble, s'offre à sa propre contemplation et à celle des autres.

Par l'oeuvre d'art,l'homme qui en est l'auteur cherche à exprimer la conscience qu'il a de lui-même ».

- Il est à ce sujet secondaireque tout le monde puisse avoir le talent -habilité d'exécution sans impliquer une faculté d'invention et d'innovation-nécessaire (sans parler du génie -selon Kant « disposition innée de l'esprit »).

Ce qui importe ici, c'est de penser l'artcomme le miroir dans lequel une collectivité se contemple, se reconnaît et peut tenter de se mettre en question : des'interroger sur ce qu'elle est, en se demandant s'il ne pourrait pas exister autre chose (d'autres oeuvres, d'autresvaleurs, d'autres institutions) que ce qui est actuellement donné.

=> C'est en ce sens que l'art constitue, au mêmetitre que le langage, une activité re-présentative par excellence.

A travers elle, il est possible à l'homme de semettre à distance des choses, en posant les conditions de sa propre reconnaissance comme être spirituel capablede conférer sens à son existence.

b- Au travers de l'art, l'homme parvient à rendre concrète son intériorité : l'artconstitue un moyen pour l'homme d'objectiver pour lui-même ce qu'il est en tant que tel.

Nous pouvons en ce sensdire de la création artistique qu'elle est libératrice, plus encore que le travail utilitaire : elle place en effet l'hommeface à ses désirs, comme s'ils étaient extérieurs à lui, et lui confère ainsi une certaine liberté à leur égard.

=> Hegel: « Par son passage dans la représentation , le sentiment sort de l'état de concentration dans lequel il se trouvaiten nous et s'offre à notre libre jugement ».

- Aristote l'avait déjà montré dans La Politique, en soulignant l'aspectcathartique (purificateur) de la représentation théâtrale, tout particulièrement de la tragédie.

En devenant objets dela représentation, les passions les plus virulentes (haine, violence, désir de mort...) sont mises en forme et mises àdistance, et perdent ainsi de leur caractère immédiat et aveuglant.

L'homme peut dès lors, à défaut de s'en rendretotalement maître, ne pas être purement et simplement enfermé en elles.

=> Une oeuvre d'art n'est donc pasn'importe quelle chose, c'est au contraire une production éminente contenant une signification spirituelle dont lesimple objet utilitaire se trouve dépourvu.

C'est sur ce quoi insiste tout particulièrement la réflexion de Hegel sur l'art: « Sous son aspect de chose, d'objet, l'oeuvre d'art [...] n'est oeuvre d'art qu'en tant que spiritualité, qu'en tant. »

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