Quand on est jeune, on vénère ou on méprise sans y mettre encore cet art de la nuance qui forme le meilleur acquis de la vie, et l'on a comme de juste à payer cher pour n'avoir su opposer aux hommes et aux choses qu'un oui et un non.
Publié le 01/10/2012
Extrait du document
«
l'écoute de la jeunesse ...
Faute de quoi on se retrouve out, ringard, dépassé.
Sans
nécessairement aller jusqu'à vénérer leurs descendants, nombreux sont ceux qui
regrettent leur propre jeunesse, à laquelle ils attribuent rétrospectivement une «insouciance,.
dont ils ont la nostalgie.
C'est un tout autre portrait de la jeunesse
que trace Nietzsche.
1.
La jeunesse, l'absolu et le mensonge
Nietzsche caractérise la jeunesse
par son goût de l'absolu:
• il s'agit uniquement de vénérer (d'une humeur respectueuse) ou de mépriser (d'une humeur coll"roucée), de choisir une fois pour toutes et massivement
entre le oui et le non.
Mais la réalité du
monde (hommes et choses) n'est pas propice à de tels choix: • elle exige au contraire un art de la nuance.
- La jeunesse est donc encline à falsifier et à tromper: l'adolescence fabrique un
monde qui correspond à ses désirs au lieu de le considérer tel qu'il se présente (elle
est donc amenée à exagérer défauts ou qualités pour les juger plus brutalement).
Conséquences:
• elle est nécessairement déçue et doit payer cher son intransigeance;
• on aurait tort de la prendre pour modèle.
II.
De la spontanéité
à l'artifice
- Nietzsche, qui se vante souvent de son excellence comme psychologue, est ici
confirmé par Piaget: l'adolescence est bien la période de développement
intellectuel et affectif où abondent les grands projets de réformes (morale,
politique, sociale) qui se heurtent à l'incompréhension, sinon aux sarcasmes
ironiques des adultes, et sont finalement inefficaces.
-
Par rapport aux philosophes antérieurs, il opère une présentation dramatisée
des défauts de la jeunesse:
• Descartes déplore bien que la jeunesse soit le temps de l'erreur 2
, mais la
responsabilité de cette dernière est davantage à chercher dans le monde
extérieur (éducation) que dans les caractères propres de la jeunesse.
• Rousseau (puis Kant) affirme bien la nécessité d'une éducation (à visée
moralisatrice) de l'enfant et de l'adolescent, mais sans faire de ces deux
périodes des moments
d'erreur systématique.
Ce que les philosophes des Lumières interprétaient comme accès progressif à
la raison adulte
(tant théorique que pratique) est présenté par Nietzsche comme
une nécessité provenant de la nature même
du Monde et de la Vie, que la maturité
abordera, non par une exigence manichéenne (le oui ou le non) mais par l'artificiel.
Faut-il ne voir dans cette notion qu'une version supportable (ou
hypocrite)
du compromis? S'agit-il simplement de «mettre de l'eau dans son
vin»?
III.
L'accès à la vérité passe par l'artifice
- Ambiguïté de la formule:
Mettre un peu d'art dans ses sentiments.
Est-ce de
2.
Cf texte du n" 28..
»
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