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Pourquoi seul un être pourvu de raison peut-il avoir des passions et des désirs ? (Pistes de réflexion seulement)

Publié le 24/03/2004

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- Rationnel : « Qui appartient à la raison, ou qui lui est conforme, en particulier aux sens B et D. »plan indicatif1. La passion comme forme délirante de la raison. Cf. Frédéric Rauh dans son livre De la méthode dans lapsychologie des sentiments.Il y a dans la passion humaine une tendance incoercible àvouloir « s'apologétiser ».Certes, la passion raisonne souvent mal, mais elle veut être raisonnable, elle veut avoir des raisons (avoir raison ?) et elle cherche à donner à ses entraînements une couleur de raison, pour qu'elle ne se résigne pas à en être la simple victime.2. La raison comme condition première de la passion.

« IntroductionLes termes de raison et de passion sont souvent présentés opposés, antinomiques et nous jugeons qu'ils s'excluent l'un l'autre.

Mais l'expérience montre que « l'esclavage » des passions peut s'arrêter et que la raison a une formede pouvoir sur cet état dangereux.

En revanche, la passion, à son paroxysme, interdit tout contrôle, tout salut.1 - Le conflit raison-passionNotre culture privilégie un débat illustré par le théâtre.

Nous y voyons des héros déchirés par leurs passions et ne pouvant surmonter leur faiblesse que par la raison.

Cependant, Corneillepenche pour une théorie volontaire et déjà cartésienne.

En effet, Descartes proposait une idée généreuse : « Il n'y a pas d'âme si faible qui ne puisse avec une bonne direction acquérir unpouvoir absolu sur ses passions ».

Et nous percevons le héros cornélien se battre et triompher.

Nous retrouvons l'orgueil : « Je suis maître de moi comme de l'univers ».Et l'Empereur Auguste nous indique comment, en lui, la raison gagne.

Mais nous rappelons à notre mémoire Racine et l'autre Empereur Néron, esclave de ses passions, comme cetteamante passionnée : « Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ».Ainsi les deux formes psychologiques de la passion manifestent le pouvoir heureux et nocif de cet état.2 - La grandeur de la passionAu lieu de s'évertuer à comprendre les mécanismes, comme s'y exerçaient les rationalistes, le romantisme constate la nécessité de la passion.

Ainsi Rousseau, pour l'éducation et pourl'acquisition des langues, souligne la place essentielle d'un climat passionnel.

En soi, cette passion n'est ni bonne ni mauvaise, mais la société développant les instincts peut modifier lesrichesses de cette vie psychologique.En revanche, Hegel constitue à la passion un statut original, qui se fonde sur la théorie générale de l'histoire.

L'esprit humain se manifeste et s'extériorise, et la raison n'est pas encoreréalisée.

Ce mode transitoire, incomplet et dangereux, s'appelle la « ruse de la raison ».

La passion n'est qu'un moment, qu'une marque de l'aliénation.

Mais la raison l'emportera.

Lorsque nous considérons ce spectacle des passions et les conséquences de leur déchaînement, lorsque nous voyons la déraison s'associer non seulement aux passions,mais aussi et surtout aux bonnes intentions et aux fins légitimes, lorsque l'histoire nous met devant les yeux le mal, l'iniquité, la ruine des empires les plus florissants qu'aitproduits le génie humain, lorsque nous entendons avec pitié les lamentations sans nom des individus, nous ne pouvons qu'être remplis de tristesse à la pensée de la caducité engénéral.

Et étant donné que ces ruines ne sont pas seulement l'oeuvre de la nature, mais encore de la volonté humaine, le spectacle de l'histoire risque à la fin de provoquer uneaffliction morale et une révolte de l'esprit du bien, si tant est qu'un tel esprit existe en nous.

On peut transformer ce bilan en un tableau des plus terrifiants, sans aucuneexagération oratoire, rien qu'en relatant avec exactitude les malheurs infligés à la vertu, l'innocence, aux peuples et aux Etats et à leurs plus beaux échantillons.

On en arrive àune douleur profonde, inconsolable que rien ne saurait apaiser.

Pour la rendre supportable ou pour nous arracher à son emprise, nous nous disons: Il en a été ainsi; c'est le destin; on n'y peut rien changer ; et fuyant la tristesse de cette douloureuse réflexion, nous nous retirons dans nos affaires, nos buts et nos intérêts présents, bref, dans l'égoïsme qui, sur la rive tranquille, jouit en sûreté du spectacle lointain de la masse confuse des ruines.

» HEGEL « Les inclinations et les passions ont pour contenu les mêmes déterminations que les sentiments pratiques et, d'un côté, elles ont également pour base la nature rationnelle de l'esprit, mais, d'un autre côté, en tantqu'elles relèvent de la volonté encore subjective, singulière, elles sont affectées de contingence et il apparaît que, en tant qu'elles sont particulières, elles se comportent, par rapport à l'individu comme entre elles, de façonextérieure et, par conséquent, selon une nécessité non-libre.La passion contient dans sa détermination d'être limitée à une particularité de la détermination-volitive, particularité dans laquelle se noie l'entière subjectivité de l'individu, quelle que puisse être d'ailleurs la teneur de ladétermination qu'on vient d'évoquer.

Mais, en raison de ce caractère formel, la passion n'est ni bonne ni méchante ; cette forme exprime simplement le fait qu'un sujet a situé tout l'intérêt vivant de son esprit, de sontalent, de son caractère, de sa jouissance, dans un certain contenu.

Rien de grand ne s'est accompli sans passion ni ne peut s'accomplir sans elle.

C'est seulement une moralité inerte, voire trop souvent hypocrite, qui sedéchaîne contre la forme de la passion comme telle.[…] La question de savoir qu'elles sont les inclinations bonnes, rationnelles, et quelle est leur subordination, se transforme en l'exposé des rapports que produit l'esprit en se développant lui-même comme esprit objectif.Développement où le contenu de l'ipso-détermination [Cette expression spécifie que l'esprit se réalise et se détermine lui-même selon des lois rationnelles] perd sa contingence ou son arbitraire.

Le traité des tendances, des inclinations et des passions selon leur véritable teneur est donc essentiellement la doctrine des devoirs dans l'ordre du droit, de la morale et des bonnes mœurs.

»HEGEL.

Hegel met ici en évidence la contradiction apparemment inhérente aux passions : elles semblent à la fois provenir de l'individu lui-même qui vise ses intérêts particuliers, et obéir à un ordre rationnel et général, extérieur à l'individu et même contraire à ses intérêts.

Un tel paradoxe soulève la question de la liberté ou de la détermination de nos comportements.

Ce problème, ici posé, est également examiné sous l'angle du sens del'Histoire.

Auparavant, Hegel écarte toute approche purement moralisante des passions (en termes de bien ou de mal), mais en dégage la fonction éminemment positive.

Il reprend à cet effet la formule d' Helvétius : « Rien de grand… ».

Indépendamment de toute considération éthique, l'auteur établit la nécessité des passions en tant que moteur de l'action. « Dans l'histoire universelle nous avons affaire à l'Idée telle qu'elle se manifeste dans l'élément de la volonté et de la liberté humaines.

Ici la volonté est la base abstraite de la liberté, mais le produit qui en résulte formel'existence éthique du peuple.

Le premier principe est constitué par les passions humaines.

Les deux ensemble forment la trame et le fil de l'histoire universelle.

L'Idée en tant que telle est la réalité ; les passions sont lebras avec lequel elle gouverne […]Ici ou là, les hommes défendent leurs buts particuliers contre le droit général ; ils agissent librement.

Mais ce qui constitue le fondement général, l'élément substantiel, le droit n'en est pas troublé.

Il en va de même pourl'ordre du monde.

Ses éléments sont d'une part les passions, de l'autre la Raison.

Les passions constituent l'élément actif.

Elles ne sont pas toujours opposées à l'ordre éthique ; bien au contraire, elles réalisentl'Universel.

En ce qui concerne la morale des passions il est évident qu'elles n'aspirent qu'à leur propre intérêt.

De ce côté-ci, elles apparaissent comme égoïstes et mauvaises.

Or ce qui est actif est toujours individuel :dans l'action je suis moi-même, c'est mon propre but que je cherche à accomplir.

Mais ce but peut être bon, et même universel.

L'intérêt peut être tout à fait particulier mais il ne s'ensuit pas qu'il soit opposé àl'Universel.

L'Universel doit se réaliser par le particulier.La passion est tenue pour une chose qui n'est pas bonne, qui est plus ou moins mauvaise : l'homme ne doit pas avoir des passions.

Mais passion n'est pas tout à fait le mot qui convient pour ce que je veux désigner ici.

Pourmoi, l'activité humaine en général dérive d'intérêts particuliers, de fins spéciales ou, si l'on veut, d'intentions égoïstes, en ce sens que l'homme met toute l'énergie de son vouloir et de son caractère au service de ces butsen leur sacrifiant tout le reste.

Ce contenu particulier coïncide avec la volonté de l'homme au point qu'il en constitue toute la détermination et en est inséparable : c'est là qu'il est ce qu'il est.

Car l'individu est un« existant » ; ce n'est pas l' « homme général », celui-ci n'existant pas, mais, un homme déterminé.

Le mot « caractère » exprime aussi cette détermination concrète de la volonté et de l'intelligence.

Mais le caractèrecomprend en général toutes les particularités de l'individu, sa manière de se comporter dans la vie privée, etc.

; et n'indique ps la mise en action et en mouvement de cette détermination.

Je dirai donc passion entendantpar là la détermination du vouloir n'ont pas un contenu purement privé, mais constituent l'élément actif qui met en branle des actions universelles.

L'intention, dans la mesure où elle est cette intériorité impuissante quecourtisent les caractères faibles pour accoucher d'une souris, n'entre évidemment pas dans nos considérations.Nous disons donc que rien ne s'est fait sans être soutenu par l'intérêt de ceux qui y ont collaboré.

Cet intérêt, nous l'appelons passion lorsque, refoulant tous les autres intérêts ou buts, l'individualité tout entière se projettesur un objectif avec toutes les fibres intérieures de son vouloir et concentre dans ce but ses forces et tous ses besoins.

En ce sens, nous devons dire que rien de grand ne s'est accompli dans le monde sans passion.La passion, c'est tout d'abord l'aspect subjectif, formel de l'énergie de la volonté et de l'action.

Le contenu ou le but en restent encore indéterminés – aussi indéterminés que dans le cas de la conviction, de l'opinion et de lamoralité personnelles.

Il s'agit alors de savoir quel est le contenu de ma conviction, le but de ma passion, - de savoir aussi si l'un ou l'autre est vrai.

S'il est vrai, il faut qu'il passe dans la réalité, dans l'existence : c'estalors qu'intervient l'élément de la volonté subjective, lequel comprend tous les besoins, les désirs, les désirs, les passions aussi bien que les opinions, les idées et les convictions de l'individu.

»HEGEL, « La raison dans l'histoire ». Hegel développe dans ce texte la problématique esquissée dans le texte précédent (la passion est-elle au service du général ou du particulier ? L'apparence contradiction entre l'origine individuelle (et donc libre) des passions, et leur portée générale (relevant d'une nécessité), trouve sa résolution dans la prise en compte du sens de l'Histoire : une rationalité estsous-jacente aux passions aveugles, sans que les acteurs de l'Histoire qui s'y abandonnent n'en aient conscience.

Et cette rationalité n'apparaît clairement qu'a posteriori : c'est la ruse de la raison.

Cad, les hommes fontl'Histoire (générale et rationnelle) en poursuivant leurs passions (particulières et chaotiques).

Ainsi, par exemple, l'ambition démesurée de Napoléon, quoique répondant à une « impulsion subjective » et à des intérêts particuliers, contribua à l'avancée d'une Histoire universelle, qui, elle, est rationnelle et objective.

De même l'émergence de l'Etat moderne est le fruit de la concentration de volontés individuelles, ans doute égoïstes etcontradictoires.Les passions perdent ainsi toute connotation éthique, puisque la morale se trouve résolument dépassée par l'Histoire.

au lieu de s'interroger sur leur contribution au bonheur des hommes, Hegel ne retiendra des passions que leur rôle dans l'accomplissement historique.

Les passions constituent donc le moyen de la réalisation de l'Histoire, qui assure le passage du particulier à l'universel.

Elles nourrissent la Raison dans l'Histoire, et par làmême réalisent l'humanité.

Conclusion : La raison n'exclut rien.. »

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