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POUR ETRE LIBRE, FAUT-IL REFUSER TOUTE AUTORITE ?

Publié le 11/05/2012

Extrait du document

 

 

Lorsque Sophocle écrit Antigone, sa tragédie la plus célèbre, il dresse le portrait d'une jeune fille faisant valoir sa liberté face à l'autorité de son oncle, le roi Créon. Le motif de ce conflit est bien simple: Antigone veut donner à son frère Polynice, mort lui-même dans un combat avec son autre frère, une sépulture décente  - ce que Créon condamne de mort -. Cette histoire nous montre combien il est difficile d'y répondre. Le problème « Pour être libre, faut-il refuser toute autorité ? « parait d'abord rapidement résolu. En effet, dans l'opinion global, être libre c'est pouvoir agir à la fois par notre corps et notre pensée sans qu'aucune force extérieure ne pèse sur notre volonté ; nous ne pouvons être ni influencé, ni contraint, ni obligé. Pourtant, le sujet suppose également que l'autorité agisse parfois positivement sur la liberté. 

Il nous impose donc de dépasser l'idée « première « de liberté. Celle-ci est certes un droit pour chaque homme, mais il faut envisager qu'elle ne peut pas être qu'individuelle. Elle doit être présente dans une société entière, pour tout le monde. Elle est donc en situation et ...

« obligé.

Pourtant, tr ès peu de personnes suivent ce comportement libre, celui d'une satisfaction sans obstacles de ses d ésirs.

En effet, certains d ésirs ne sont pa s forcément bienveillants, ils peuvent ne pas plaire à autrui.

Je suis donc g êné par cette pr ésence, qui fait autorit é sur moi et qui m'emp êche d' être libre comme je le voudrais.

Et puis si en choisissant le choix B, je me rends compte plus tard que le cho ix A était plus inté ressant ? Bien souvent, l ’homme ne pr éfè re pas porter la responsabilit é de son acte gratuit et pr éfè re donc qu’ une autorité le d éculpabilise.

C ’est ce que Sartre appelle la « mauvaise foi ».

D ’apr ès lui, l ’homme est au milieu du monde e t il doit faire valoir sa liberté , en être responsable et ne pas accepter qu ’une autorit é lui permette de faire des choix plus faciles.

« Si l ’existence pr éc ède l ’essence, l ’Homme est responsable de ce qu ’il est.

La premi ère d émarche de l ’existentialisme est de mettre tout l ’Homme en possession de ce qu’ il est et de faire reposer sur lui la responsabilit é totale de son existence.

» Lorsque Cr éon doit punir du châ timent de mort sa nièce, il tente d ’étouffer l ’affaire car il ne veut pas être responsable.

Pourtant, pour être libre, lui dit- Antigone, il n’aurait pas du accepter la fonction de roi.

Elle lui jette, alors qu’ elle prend la propre responsabilité de sa mort : « Moi je peux dire « non » encore à tout ce que je n ’aime pas et je suis seul juge.

Et vous, avec votre couronne, vos gardes, avec votre attirail, vous pouvez seulement me faire mourir parce que vous avez dit « oui ».

» Seul Antigone est libre, parce qu ’elle ne se laisse pas d éculpabiliser par une autorit é pesant sur elle.

Mais cette libert é n' est elle pas quelque peu illusoire ? N'est -elle l'impression que se donne l'homme ignorant la plupart du temps, par sa faible perception, certaines forces pesant sur son libre arbitre ? En effet, on ne peut nier l'existence de cette autorit é qui nous dé termine et nous conditionne à tel choix plut ôt qu'un autre.

Car il y a bien une diff érence entre les deux verbes "se sentir libre" et " être libre", il ne faut pas la n égliger.

Spinoza assure que le premier n'entraine pas forc ément le deuxi ème.

En effet, sel on lui, notre comportement est dé terminé par des causes ant érieures dont nous n'avons pas toujours la perception car ces causes peuvent être parfois tr ès subtiles.

"Les hommes se croient libres parce qu'ils sont conscients de leur actes mais ils ignorent l es causes qui les ont dé termin é à agir." Un homme peut croire son comportement tout à fait libre, tout comme ses actions, un soir où il serait ivre, mais il se rendra compte le lendemain que l'alcool qu'il avait absorbé l'a clairement influencé .

L'alcool est donc une force ayant pesé sur ses d écisions, bien qu'il n'en ait pas eu conscience au moment pr ésent.

Il en est de m ême pour l'Homme en g éné ral ; l'Homme peut toujours se sentir libre, le moindre de ses choix sera d étermin é par une cause.

C'est la th èse du d éterminisme.

Celui ci peut se traduire par une origine particuli ère, comme c'est le cas pour Antigone qui semble perp étu é in évitablement le destin tragique de ses anc êtres : " Je suis la fille d ’Œdipe, je suis Antigone.

Je ne me sauverai pas.

" Ain si Pierre -Simon Laplace explique que si un Homme connaissait l'ensemble des causes gouvernant l'univers, il pourrait pr édire à l'avance tel ou tel év énement.

En ce sens, le libre -arbitre n'existe pas, ce n'est que l'impression que nous avons à défaut de po uvoir sentir les causes qui influencent notre jugement.

Nous ne sommes pas libres nous nous sentons libre.

Le libre arbitre doit -alors, une nouvelle fois, être remis en cause.

Tel que le poussin se recroquevillant à la vue d ‘un faucon, certaines de nos a ctions ne sont pas du pur hasard.

On observe tout d'abord un ph énom ène de causalit é.

Le faucon est synonyme de danger, alors le poussin se cache.

A chaque fois que le faucon passera, il se cachera, mais si ce n ’est que sa m ère alors il ne se cachera pas.

C ar sa mère n ’est pas synonyme de danger.

Les m êmes causes entrainent toujours le m ême effet.

On pourra toujours pr étendre avoir choisit tel choix ou tel autre, on aura choisit à cause de quelque chose, et non pas au hasard.

C'est ce que r ésume Schopenhauer par : "Le pr étendu libre arbitre n'existe probablement pas, mais les actions des hommes, comme tout les phé nomènes de la nature, r ésultent dans chaque cas particulier des circonstances pr écé dentes, comme un effet qui se produit n écessairement à la suite d e la cause." D'autre part, l'Homme qui r épondrait au moindre de ses dé sirs est-il vraiment libre ? N'est -il pas plutôt l'esclave de ceux -ci ? En effet, il montre sa faiblesse par rapport à son pouvoir dé cisionnel.

C ’est comme ç a que Créon essaye de prouver une nouvelle fois qu’ il est. »

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