Pour chercher la vérité, faut il s'affranchir de toute subjectivité ?
Publié le 18/03/2009
Extrait du document
- Thèse : la subjectivité est la vérité.
- Antithèse : l'objectivité est la vérité.
- Synthèse : la subjectivité nous fait découvrir l'Absolu, objectif ultime et vérité universelle.
- Comment démarrer votre dissertation et trouver le plan.
1. Ce sujet est classique et fait appel aux notions développées dans votre cours, qui contient la totalité des matériaux nécessaires à son élaboration. 2. L'analyse du terme « subjectivité « (caractère de ce qui appartient au sujet, de ce qui est relatif au moi singulier et individuel) et du terme vérité (qui contient un élément universel) rend la question a priori absurde. Le problème posé est donc de déterminer s'il existe un sens particulier de ces termes qui permette d'y répondre. 3. La nature du problème (découverte d'un sens) permet d'organiser la discussion autour de la signification des termes et de lui donner de surcroît un mouvement naturel en allant du singulier à l'universel d'une part, et d'autre part de la vérité absolue à la vérité relative. 4. On peut, grâce à ce mouvement, choisir un plan dialectique : — Thèse : la subjectivité est la vérité. — Antithèse : l'objectivité est la vérité. — Synthèse : la subjectivité nous fait découvrir l'Absolu, objectif ultime et vérité universelle. Bibliographie. • Platon, Théélète (Garnier-Flammarion). • Kierkegaard. Textes choisis (PUF). Consulter p. 11 à 83. • G. Gusdorf, Kierkegaard (Seghers).
«
de vue ! S'il n'existe plus de critère absolu et une vérité, mais de changeantes vérités, si l'opinion contradictoirerègne en maîtresse, si tout point de vue est également vrai, alors la vérité, fragmentée, en poussière, semblemourir.
Car la vérité est une ou elle n'est pas.
Si elle ne manifeste cohérence et unité, si elle n'apporte aux existantsnulle forme synthétique qui les rassemble et leur donne sens, n'est-ce point son essence de vérité qu'elleabandonne finalement? Alors, nous aboutissons à la négation de la vérité.
Comme le montrait Socrate dans leThéétète, si l'homme est mesure de toutes choses, si la subjectivité est la vérité, pourquoi ne pas faire du porc oudu singe les mesures? La mesure de toutes choses, remarque Socrate, ce serait « le porc ou le cynocéphale ouquelque bête plus étrange parmi celles qui sont capables de sensations ».Ainsi, si la subjectivité est la vérité, il n'y a plus de critère du vrai, plus de vérité, et l'existant vit alors sous le règnede l'aveuglement et de l'erreur.
Si toute sensation est vraie, nulle ne l'est.
Dès lors le flux des impressions sensiblesne nous apporte nul germe de vérité, seulement Y aveuglement universel.
Mais le point d'aboutissement de la thèsede la subjectivité-vérité, c'est, non seulement le « tout est faux », mais aussi le « tout est permis ».
A la limite,toutes les valeurs morales s'équivalent, en cette sphère de l'universelle illusion.
Ainsi les sophistes pouvaient-ilsparfois présenter une face cynique devant le problème des valeurs morales.Dès lors, se dessine pour nous un passage nécessaire vers l'objectivité et l'universel.
Si la sphère de la sensation estillusoire, si la subjectivité conduit au néant de la vérité, alors il s'agit de construire une objectivité.
La vérité, dansces conditions, devient l'accord avec l'objet.
Vers quoi nous conduit essentiellement cette voie de la réflexionobjective ? Vers la pensée abstraite et conceptuelle, vers les mathématiques, etc.
Grosso modo, ce à quoi nousparvenons ici, c'est à la construction d'une objectivité scientifique.
Tel est bien le point de vue de la science : ellese fait contre les sensations (subjectives) et nous invite à élaborer une théorie et un ensemble objectifs, nousarrachant aux données sensibles et immédiates.
Ce qui est atteint à ce niveau, c'est un tout conceptuel, c'est-à-dire où les notions abstraites et les concepts opératoires enserrent de toutes parts l'immédiateté.
Il n'est pasd'autre définition possible de l'objectivité.
Nous savons que, dans les sciences, l'objectivité est constituée par unedémarche de rationalisation de l'expérience au moyen de procédés et de notions excluant les pensées et lesinterventions individuelles.Dès lors, l'objectivité définirait ainsi un type de vérité échappant aux incertitudes et apories précédentes.
3.
Synthèse
Malheureusement, la voie de la réflexion objective se révèle fort décevante.
Elle a pour avantage manifeste de nousfaire échapper aux apories et aux contradictions de la vérité subjective.
Mais elle nous déçoit parce qu'elle nouséloigne de nous-mêmes et de notre destin, de notre existence « d'êtres-dans-Ie-monde ».
Certes, le niveau del'objectivité représente un stade dans le chemin de la vie, mais non point le stade unique.
L'ordre de l'objectivitérationnelle définit bien un type de vérité, mais cet ordre, qui nous éloigne du sujet, ne peut être le seul envisagé.Ainsi, dans la mesure même où la subjectivité « sophistique » se révèle décevante et où l'objectivité ne nous parlepoint de notre destin dans le monde, c'est une autre vérité qu'il faut envisager.Le mérite de Kierkegaard est précisément, à l'opposé des penseurs et des savants qui ne considèrent que l'ordre del'objectivité rationnelle, d'avoir proclamé que la subjectivité est la vérité.
Mais de quelle subjectivité s'agit-ilexactement?La question « la subjectivité est-elle la vérité ? » est ici susceptible d'acquérir une nouvelle signification.
Car lasubjectivité ne désigne pas seulement ce qui concerne leLa véritésujet empirique.
La subjectivité peut signifier aussi le fait d'être un sujet fondateur et actif de l'existence.
Dès lors,la subjectivité renvoie à l'intériorité dynamique, à l'activité de l'esprit, à ce qui est vécu par un existant.
Ce n'estplus une donnée, mais une conquête.
Il s'agit de se faire subjectif.Ainsi voulait dire Kierkegaard : la subjectivité désigne chez lui la responsabilité absolue de notre existence, le réveilde la spiritualité, le choix le plus authentique de soi-même, le chemin progressif vers la pointe la plus fine de nous-mêmes.
Il s'agit de devenir subjectif, et cette tâche est éthique et religieuse.
Or la subjectivité ainsi comprise nouspermet de répondre à notre problème initial, elle est source d'une vérité qui ne s'effrite pas totalement en unepoussière d'énoncés et de points de vue.En effet, la subjectivité, conçue comme Intériorité et conquête morale, devient alors participation à l'Absolu, à Dieuet, du même coup, redécouverte de l'objectivité.
Le retour sur soi subjectif dessine, en cet itinéraire, non seulementle « comment » de la vérité, mais aussi le « ce que », qui en est inséparable.
La subjectivité, en nous ancrant auplus profond de nous-mêmes, nous fait découvrir Y Absolu, l'Objectif ultime, l'Esprit commun universel.
Dire que lasubjectivité est la vérité, c'est dire qu'un « milieu de lumière » s'offre au sujet responsable et fondateur.
Conclusion
En quel sens, demandions-nous, faut-il saisir la subjectivité pour que la vérité correspondante ne s'évanouisse pasen une poussière d'énoncés? Si la subjectivité est la quête de l'individu et sa conquête, alors elle dessine, en sonpoint ultime, l'objectif et même l'Absolu.
Telle est la foi de Kierkegaard, synthèse de la subjectivité et de['objectivité.
Si avec la subjectivité prise au sens sophistique du terme, nous n'avons plus que des perspectivesindividuelles, avec la subjectivité au sens éthique et religieux du terme, la question de la vérité devient de nouveaunon-contradictoire..
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