Platon et la critique de la démocratie
Publié le 01/05/2005
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POUR DÉMARRER Voici l'idée directrice de ce texte : la démocratie est minée par le principe même qui l'a créée, la recherche de la liberté ; lorsque cette dernière devient sans frein, elle conduit à un régime sans loi et, par conséquent, à la tyrannie. Vous noterez les résonances tout à fait modernes et contemporaines de ce texte, qui conduisent à en souligner son intérêt philosophique. CONSEILS PRATIQUES Vous devez ici vous livrer à un travail très soigneux de définition des termes, en n'oubliant pas de les replacer dans le contexte de l'Antiquité grecque et de la pensée de Platon. Les termes ou expressions de démocratie, liberté, désir insatiable, tyrannie, magistrat, anarchie, loi écrite et non écrite doivent être particulièrement bien définis, pour permettre une véritable compréhension de ce texte.
«
des panégyriques et éloges de la liberté dont on jouissait dans la cité athénienne.Or, dès la fin de cette première partie, Platon pose la question : l'élan sans fin pour ce qui semble posséder lasuprême excellence, cette liberté faite pour tout permettre, tout vouloir, tout désirer conduit nécessairement (« lemet dans l'obligation ») ce gouvernement à recourir à la tyrannie, c'est-à-dire à demander une aide à un autrerégime politique, la tyrannie, ce régime où un maître absolu gouverne et devient maître d'un peuple d'esclaves : latyrannie ou la domination d'un seul, qui accapare la totalité des organes du gouvernement.
La démocratie fait appelet s'adresse finalement à la tyrannie.Il nous faut donc comprendre comment le manque d'intérêt pour tout ce qui n'est pas la liberté et la passion uniquepour cette dernière vont perdre la démocratie.
C'est ce que la deuxième partie va maintenant nous faire saisir.
B) Seconde grande partie : « Lorsque une cité [...1 animaux »Comment les choses se passent-elles donc ? Comment la démocratie va-t-elle se transmuter en tyrannie, à traversune passion folle de la liberté ? C'est ce que nous allons maintenant saisir à travers une série d'exemples mettant enjeu des mécanismes destructeurs de la vie politique.L'image des échansons, servant un vin trop pur et trop fort, donne sans doute à voir des chefs et un systèmepolitiques enivrant leurs administrés.
La cité démocratique représente un État caractérisé par son désir sans frein deliberté.
Ainsi devient-elle folle de cette dernière, qu'elle boit en quantité illimitée, au-delà de toute décence, de toutrespect des convenances.
Que va-t-il, dès lors, se passer ? Plusieurs exemples nous le font comprendre.
Dans unrégime où l'organisation des pouvoirs permet à chacun de s'enivrer de liberté, comment les choses se présentent-elles ?La cité démocratique, celle de démos, le peuple, voué au désir de tout faire et de tout vouloir, va punir ceux quiexercent le pouvoir politique (« ceux qui la gouvernent ») et n'octroient pas la possibilité de toutaccomplir : ils sont mis en accusation et punis comme s'ils étaient des criminels.Quant aux citoyens soumis aux magistrats, c'est-à-dire à ceux qui requièrent l'application de la loi ou exercent desfonctions publiques, ils sont traités avec un mépris outrageant et tournés en dérision (« bafoués »).
En somme,l'obéissance au principe juridique suprême (la loi) et à l'Assemblée d'où elle émane est vilipendée.Quels sont ceux qui sont loués et vantés ? Ceux qui exercent le pouvoir politique (« les gouvernants ») en selaissant dominer par la foule et les catégories diverses nées de la foule.
Ce qui signifie que les détenteurs du pouvoirdoivent obéir aux passions du peuple, sous peine d'être méprisés.
Quant aux « gouvernés », aux citoyens, ilsdoivent, pour être honorés, prendre le pouvoir, ainsi abandonné à n'importe qui.
Plus de maître ! Plus de chef ! Sil'on exige le respect des lois, on sera traîné en justice.
Si l'on méprise la loi, on aura tous les honneurs et tous lesprestiges.D'où la conclusion de cette seconde partie : dans un pareil État, l'esprit de liberté s'étend à tout et tous ; enfants,familles et même bêtes, tous suivent leur seul caprice.
C'est l'anarchie, le désordre universel, le refus de touteautorité qui l'emportent et dominent partout.Ainsi la passion de la liberté se transmute en désordre universel, en absence de chef, en anarchie.
Mais quel est lerésultat de ce règne du caprice sans frein ? C'est ce que va nous faire comprendre la troisième partie.
C) Troisième grande partie : « Or [...] tyrannie »
La liberté s'est transformée en licence, le pouvoir de faire en pouvoir de faire n'importe quoi selon ses désirs.
Dèslors, tout est prêt pour la tyrannie, comme Platon va nous le démontrer à l'aide d'une argumentation rigoureuse.D'abord, toute idée de contrainte est écartée.
Or qu'est-ce que la contrainte ? Elle désigne la cœrcition ou lapression exercée sur quelqu'un, la discipline qui conduit à obéir.
La contrainte, nous le savons, est formatrice : elleest le moyen de nous faire obéir à la loi et de ne pas la mépriser.
Par exemple, si un voleur s'empare de notre bien,comment ne pas user de la contrainte pour qu'il ne lèse pas la société ? Or la plus petite apparence de contrainte,sa forme la plus réduite, semble intolérable au principe spirituel des citoyens qui disent non à toute cœrcition.Comment en serait-il autrement, puisque le seul caprice domine ?En second lieu, la loi écrite ou non, la règle impérative prescrivant à tous ce qui doit être fait, à savoir ce que l'onappelle en grec « nomos », se trouve tout à fait écartée.
Or, à partir de la fin du VIe siècle, la cité athénienne s'estédifiée grâce, en particulier, à la loi écrite (Dracon, Solon).
Le « nomos » est donc le bâtisseur de la cité.
Quand onméprise la loi juridique, on détruit la cité.
C'est bien ce que font les citoyens quand ils écartent la loi et refusentainsi tout maître, tout gouvernant exprimant la force de la loi.Plus de lois qui comptent, écrites ou non ! Plus de maître : c'est le désordre universel.
Le tyran peut s'installer et lepeuple va exulter.
Le gouvernement de la multitude et la liberté absolue aboutissent à la tyrannie, aucommandement d'un homme seul imposant la servitude.
La liberté sans frein engendre la servitude.
Le tyran faitpasser le peuple de l'anarchie à l'esclavage.
Il accède généralement au pouvoir par un coup de force (parfois par unvote massif des concitoyens) et confisque la liberté.
Intérêt philosophique du texte
L'intérêt philosophique du texte est (au moins) triple : tout d'abord, il éclaire remarquablement les périls civiques,quand la cité ou l'État sont privés de la loi (A).
Il nous rappelle que tout ce qui naît est sujet à corruption et que ladémocratie se dégrade (B).
Toutefois, nous ne pouvons accepter l'aristocratisme de Platon.
La démocratie est,malgré ses défauts, le meilleur régime (C).
A) Périls civiques de la cité privée de loisD'abord, ce texte nous rappelle les périls qui menacent la démocratie privée de la puissance de la loi, où l'autorités'éparpille entre mille mains.
Quand la multitude gouverne, quand n'importe quelle catégorie impose son.
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