Philosophie et réflexion
Publié le 04/07/2012
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Il est donc légitime de dire avec MAINE DE BIRAN :Philosopher c'est réfléchir pourvu qu'avec lui on entende ce dernier mot dans son sens plein, comme désignant, dans· la pensée, un système réflexif qui vient s'ajouter au système sensitif et au système perceptif.
...

«
Position de la question.
A première vue, la formule proposée semble banale :
n'a-t-on pas toujours représenté le philosophe comme un homme qui réfléchit,
comme un méditatif? Mais, en creusant le sens du mot « réfléchir », peut-être
découvrirons-nous à cette pensée une portée plus profonde.
1.
Réflexion et vie sensitive.
MAINE DE BIRAN lui-même nous indique déjà un sens moins banal lorsque,
dans le même Journal d'où cette pensée est extraite, il distingue (23 juillet 1816) par opposition à la « réflexion » un « état où 1 'homme se confond avec ses
intuitions ou ses sensations et ne voit de lui que son corps propre où il rapporte
toute son existence».
Nous reconnaissons là cet état à demi conscient (cf.
Pré cis, Ph.
1, § 41) où l'homme «se laisse vivre'' et demeure esclave de l'être
organique (Ibid., § 29-31) qui est en lui.
Dans cet état, « les sensations, les
mouvements, les images vagues et décousues '' remplissent tout l'esprit, et l'âme est déterminée par l'état du corps :«Toujours remuée au gré des impres
sions du dehors, elle est affaissée ou élevée, triste ou joyeuse, calme ou agitée
selon la température de l'air, selon une bonne ou mauvaise digestion ...
'' - A ces impressions de la vie organique, s'ajoutent les influences de la vie sociale : «Les passions 1 sociales, écrit ailleurs BIRAN, se joignent toujours dans l'homme
aux passions naturelles et les compliquent.
Dans l'état le plus ordinaire des
hommes en société, toute passion naturelle ou appétit organique, partant
de l'organisme, monte pour ainsi dire de la vie animale à celle de l'homme''· (Développer à l'aide du Précis, Ph.
1, § 34-35).
Mais BIRAN voit fort bien que,
tant qu'il se borne à subir cette influence du groupe social, l'homme n'est
guère plus actif que lorsqu'il est l'esclave de son corps.
C'est là justement que la réflexion vient nous libérer.
Réfléchir, c'est, « par rapport à soi-même ou dans la vie intérieure, être toujours au-dessus de ses
affections, les juger et ne jamais s'en laisser dominer; par rapport à nos sem blables ou dans la vie extérieure, être toujours au-dessus de toutes les influences,
de toutes les opinions, les apprécier à leur juste valeur et ne jamais les prendre
pour guides de nos actions, ni pour mesure de notre
bonheur»; c'est donc « faire usage de sa raison, en tout et partout, dans quelque position qu'on
se trouve, au milieu des fous comme parmi les sages '' (BIRAN).
C'est alors
que l'homme entre vraiment en possession de lui-même, qu'il devient, comme
dit
BIRAN, compos sui.
Nous reconnaissons là le phénomène ou plutôt l'acte
de la « prise de conscience '' (Précis, Ph.
1, § 36 et 43-45).
Et c'est déjà là philosopher : car on va voir que la Philosophie n'est pas autre chose que cette
prise de conscience amplifiée et développée.
ll.
La Philosophie comme attitude réflexive.
«Philosophie» peut s'entendre, en effet, en deux sens.
Il y a d'abord une
philosophie vulgaire, spontanée, et, en ce sens, « chacun, au cours de sa vie,
l.
Le terme passion est pris ici au sens 2 de notre Vocabulaire..
»
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