PHILOSOPHIE ET ANTHROPOLOGIE ?
Publié le 12/03/2009
Extrait du document
- La philosophie s'occupe de tout ce qui concerne l'homme. Kant ramène à la question «qu'est-ce que l'homme ?« les questions essentielles selon lui de la philosophie (Que puis-je savoir? Que dois-je faire ? Que m'est-il permis d'espérer?). Toutefois, l'idée que l'on puisse définir l'homme demande examen, compte tenu de la diversité des interprétations possibles d'une telle question. On remarquera que les trois questions kantiennes engagent la réflexion dans des directions bien déterminées (conditions de possibilité et définition des objets du savoir humain; critères de l'action; finalités et espoirs de l'existence). Comme si la définition de l'homme devait en passer nécessairement par une réflexion sur les fondements, les valeurs, et les fins.
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Pourquoi et comment se pose ce problème ?
Dans l'Essai sur l'origine des langues, Rousseau constate : « Quand on veut étudier les hommes, il faut regarder près desoi ; mais pour étudier l'homme, il faut apprendre à porter sa vue au loin ; il faut d'abord observer les différences, pourdécouvrir les propriétés.
» Rousseau, comme le XVIIIe, regarde du côté du bon sauvage, tel que son temps le décrit, etcela peut prendre les formes du citoyen en démocratie, ou celles du Patagon ou de l'Iroquois.
L'étude scientifique del'homme ne s'élargit qu'à travers cette double vision que la succession de l'histoire ne fait que rendre plus complexe.
Ainsiles politiques du XXe choisissent comme référence l'homme de la révolution française, ou l'homme russe de 1917.L'anthropologie essaie de glaner des matériaux simples et vérifiables.
Au XXe cependant, l'essor des sciences socialespermet un raffinement de cette démarche.
On estime que deux systèmes ont retenu la méthodologie des chercheurs : lapsychanalyse et la linguistique.
Car ces deux modèles ont en plus l'avantage d'être vérité l'un pour l'autre.
Lacan illustrecette symbiose: «l'inconscient est structuré comme un langage».Il a fallu organiser un nouveau vocabulaire.
Jakobson a privilégié la théorie de l'information.
L'être humain compare àtravers des relations de similitude, de contiguïté et d'institution.
Une science des sciences est donc proposée commeadaptée à toutes les sciences humaines.
Lévi-Strauss fonde son analyse en deux temps.
Nous étudions les phénomèneslinguistiques conscients, puis nous décryptons leur infrastructure inconsciente.
L'important n'est plus d'isoler les éléments,mais plutôt de repérer les mécanismes des relations.
Grâce aux traitements informatiques, et à l'intérieur des systèmes delangage, il est possible de quantifier la multiplicité des combinaisons de phonèmes et les calculs mathématiques s'opèrentsur des bases de longues séries.
Ainsi, la connaissance de l'homme s'édifie de façon solide, et avec Chomsky et lagrammaire générative, l'homme commence à acquérir le sens de la sémiologie, ou science des signes.
Et malgré lesquerelles entre certaines écoles, les chercheurs apprécient les mêmes signes fondamentaux.
La psychanalyse et les signes
Par la connaissance approfondie de l'enfance, Freud est complété, sinon dépassé.
M.
Klein par la méthode de jeu,découvre comment l'enfant fabrique son inconscient, comment il ressent la bonté ou la malignité des objets, comment ilassocie les personnes les unes aux autres et comment il arrive à se créer des états d'angoisse.
La psychanalyse del'enfant révèle que le rapport parents-enfants, même s'il est essentiel, n'est pas le plus important.
Deleuze observe les «machines désirantes » de l'enfant ; elles trahissent mille impulsions, mille désirs et le complexe 6'Œdipe, seul, reste unenotion trop élémentaire.L'anthropologie devient autre.
Quand Deleuze explique sa découverte : «Familial ou analytique, Œdipe estfondamentalement un appareil de répression sur les machines désirantes et nullement une formation de l'inconscient lui-même », il souligne assez le changement brutal de cap.
Les philosophes commencent à mesurer un peu mieux les limitesde leur projet.
On a voulu décrire l'homme, et on aboutit à un discours sur l'être humain.
On a préparé des dissertationssur le bon sauvage ou sur le citoyen.
Aujourd'hui, l'impression générale se manifeste de façon un peu tragique.
Les étatsmorbides et la folie délimitent les ultimes frontières de l'homme.
Voilà aussi que le discours change et que la disparition del'homme monte à la surface de l'enquête.
L'anthropologie a démonté les mécanismes tant et si bien qu'il y a mortd'homme.
Réduit à une poussière de réactions, un « Çà » innommable et privé de sens ne vit que sous l'action de stimulus!
L'époque contemporaine
Pendant les années soixante, les combats successifs des philosophes ont abouti à la victoire des théories dustructuralisme.
Peu à peu, ce genre de discipline a envahi tous les domaines.
Mais la connaissance tardive de l'école deFrancfort, avec Marcuse, Adorno, Horkheimer, et certains textes proposés par des écrivains différents (Clavel, Girard ouDomenach) modifient l'horizon actuel.
Trop longtemps le seul droit de parler de l'homme semblait accordé à certainspenseurs et à eux seuls.
Du haut de certains bastions jugés imprenables, le discours philosophiques de l'homme glissaitvers le dogmatisme le plus outrancier.
On aurait pu parler d'une systématisation.Aussi bien un reflux se manifeste et dans la vague qui s'éloigne, bien des certitudes de la psychanalyse ou de lalinguistique se sont effondrées pour rester vestiges d'une démarche toujours possible, et toujours aussi délicate.Actuellement une autre problématique se constitue.
Elle associe la recherche sociale et l'être de l'homme, elle se fonde surles analogies toutes puissantes du modèle biologique et elle s'évertue à comprendre sereinement les mécanismes de«l'homme neuronal».La conscience de l'homme, sa singularité, sa structure inimitable : toutes les sciences l'affirment, ne serait-ce que parl'effort ininterrompu de venir à bout de cette créature compliquée et déroutante.
L'homme est toujours le but que chaqueanthropologie croit cerner, mais qui n'est jamais épuisé par le discours..
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