Phénoménologie de la perception, © Gallimard, 1945, pp. 75-76. Merleau-Ponty
Publié le 22/03/2015
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Textes commentés 39
Ce texte, qui conclut l'important chapitre introductif de la
Phénoménologie de la perception, définit le statut de la réflexion qui se
dégage de la critique de l'empirisme, de l'intellectualisme ainsi que de la
discussion avec Husserl.
C'est, en somme, la version mcrleau-pontienne
de la réduction phénoménologique et, partant, du
cogito, qui se trouve
explicitée ici.
Même si la philosophie réflexive met en avant la vérité du
cogito, qui est « inattaquable » au moins en ceci que mon expérience ne
saurait être conçue comme un effet de l'action du monde extérieur, elle
ne peut être acceptée telle quelle.
En effet, elle interprète cette rupture
avec l'immédiat, en quoi consiste l'acte de penser, comme l'œuvre d'un
subjectivité autonome et close sur elle-même, la négation du monde
comme l'envers d'une existence positive.
Parce que, pour voir le monde,
il est nécessaire de rompre notre relation familière avec lui, de s'étonner
et d'ouvrir par conséquent l'horizon du sens, la philosophie réflexive veut
résorber l'être du monde dans celui de la signification et l'existence du
sujet dans la transparence de la pensée.
Cette approche, qui repose sur un
passage à la limite, c'est-à-dire une idéalisation, débouche sur la position
d'une subjectivité transcendantale insituable, coupée des vies
individuelles.
Or une telle conclusion trahit l'expérience même du cogito,
l'effectivité de la vie réflexive.
En effet, celle-ci s'éprouve comme un
acte et donc comme succédant à une vie irréfléchie qui en constitue le
sol.
La réflexion ne peut faire son propre total : en tant qu'acte, elle est
nécessairement plus que ce qu'elle peut penser d'elle-même, son
existence excède son essence.
Le propre de la pensée est de ne pouvoir
être conscience d'elle-même qu'en l'étant du monde.
Ainsi, en tant qu'elle
est
« un changement de structure de notre existence », la réflexion
demeure inscrite dans le monde où elle est née et le saisit lui-même dans
l'acte par lequel elle s'en détache : le retour au sujet et l'ouverture au
monde,
l'« entrer en soi » et le « sortir de soi » ne font pas alternative.
La
tâche de la phénoménologie est de réduire cette idéalisation, c'est-à-dire
de saisir la réflexion à l'état naissant au sein du monde, de se situer à la
charnière de l'irréfléchi et de la réflexion..
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