Peut-on vouloir le mal?
Publié le 13/11/2012
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«
[II- La volonté faible peut céde r au mal ]
Il faut nuancer l'analyse proposée auparavant.
Tel que le montre Kant dans les Fondements de la métaphysique des
mœurs , nous pouvons tous conna ître la l oi morale rationnelle qui nous dicte de façon absolue (impératif catégorique)
ce à quoi notre volonté doit se conformer: ainsi nous pouvons tous savoir que mentir, voler ou tuer est contraire à cette
loi.
Par conséquent, celui qui dédaigne son devoir sait véritablement où est le bien .
Simplement, la conn aissance
de ce qui lui est profitable est commandée par la raison pruden te (imp.
hypothétique) alors que la connaissance de ce
qui est moral est commandée par la conscience du devoir (imp.
catégorique).
Or , la volonté humaine n'est pas sainte ,
dit Kant , elle est faible: elle peut conduire le sujet à commettre une faute, c'est -à-dire à vouloir cette faute, préférant
l'utilité à la moralité .
Cependant , cette volonté faible n'est pas non plus une volonté qui c hoisirait toujours ce qui est diamétraleme nt
opposé à ce qu'il faut faire ; Kant appelle cette dernière "volonté diabolique" .
Celle -ci n'est pas humaine, elle
échappe à l'emprise des penchants qui nous dirigent vers l'utile et l'agréable.
L'homme peut com mettre le mal moral
lorsqu'il est contraire à son bien être (confronté par exemple à un dilemme moral) , mais qu'il le fasse contre son
intérêt seulement pour être immoral peut paraître absurde (l’hétéronomie de la volonté n’est pas anomie ).
D'autre part, même si l'ignorance du bien ne semble pas pou voir être alléguée comme justifica tion de la faute, l'analyse
proposée précédemment reste, pour l'essentiel, vraie.
Celui qui commet une faute, càd qui enfreint la loi morale, sait
bel et bien qu' il commet une f aute.
Néanmoins, il ne veut pas le mal : il ne pose pas que sa conduite, par ex.
mentir,
devrait être voulue par tous.
En réalité, en enfreign ant la loi morale il considère qu'il fait une exception à cette loi dans
certaines circonstances .
Donc, alors même qu'il commet une faute, il veut que la loi morale soit préservée .
S’il cède
à l’instinct ou à l’agréable il ne veut pas pour autant le mal .
[Transition:] Pourtant une telle limitation de la volonté n'ignore -t-elle pas l'ampleur de notre liberté?
[III - La volonté n’est métaphysiquement libre que si elle peut vouloir le mal]
Il peut sembler que notre respect de la loi morale n'est pleinement assuré que par notre capacité fondamentale à
vouloir le mal , càd à nier entièrement le commandement de la loi morale , et non simpl ement à faire une exception à
son égard tout en reconnaissant s a validité. Alors que nous sommes libres parce que nous connaissons la loi
morale, cette liberté n'est complète que parce que nous pouvons vouloir pleinement ce qu'interdit la loi
morale .
Aristote pose que la perversité est volontaire , ce qui découle logiquement de l’affirmation que nous
sommes cause de nos actes.
C’est d’ailleurs ce qui justifie la louange ou la sanction.
N'est -il pas contradictoire de définir la volonté comme c apacité à agir librement, et de lui refuser en même temps la
capacité à vouloir le mal? Descartes , en qualifiant la volonté humaine d'infinie , ne peut que conférer à la liberté une
double dimension paradoxale: elle est à la fois, liberté absolue de choix e t liberté éclairée par l'entendement.
Il n'est
pas exclu, dans ce contexte, que l'homme puisse, s'il le veut, s'écarter du bien, qu'il choisisse le mal sciemment en
détournant volontairement son esprit de ce que l'entendement lui montre comme étant le bien .
Les camps de la mort sont la réalisation historique d’une destructivité radicale et d’une volonté de génocide .
Le devoir
de mémoire , en contestant le caractère exceptionnel du mal absolu, ouvre la voie à la compréhension éthique et
politique d’événement s qui continuent de ravager l’histoire.
[Conclusion]
Donc, même s'il peut sembler scandaleux que l'homme puisse vouloir le mal en lui -même , il paraît artificiel de ne lui
accorder que la liberté sous surveillance des moralistes.
Bien sûr , on peut toujour s essayer de jouer sur les mots en
prétendant qu'une volonté aussi arbitraire et irrationnelle n'en est plus une; il reste que si l'homme est défini comme
absolument libre pour se dégager de ses inclinations pour accomplir le bien, s’il est responsable de ses actes, la
possibilité qu'il se tourne vers le mal ne peut être exclue. On peut donc vouloir le mal..
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