Peut-on réduire le devoir à une obligation morale ?
Publié le 27/02/2008
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Qu’est-ce que le devoir ? Est-ce agir conformément aux lois ? Est-ce agir par pure bonne volonté ? Il semble que l’obligation morale se distingue de la contrainte. En effet, l’obligation est plus faible : elle laisse en dernier ressort le choix à l’homme agissant. Ainsi, si le devoir n’est qu’une obligation morale, il dépend uniquement de la bonne volonté du sujet. Mais dans le même temps, que peut-il être de plus ? Le devoir est ce qui nous incombe ; toute la question est de savoir de quelle manière cela nous incombe. Pour bien comprendre la différence entre l’obligation et la contrainte utilisons l’exemple de l’automobiliste. Le code de la route veut que l’automobiliste s’arrête au stop, mais rien ne le contraint à le faire : le stop n’est qu’un mur virtuel matérialisé par une ligne blanche. Il a l’obligation morale de le faire puisque quand il a passé son permis il s’est indirectement engagé à suivre le code de la route, mais rien ne le contraint à le faire physiquement. Est-ce de même pour le devoir ? Ne compte-t-il uniquement que sur la bonne fois de l’homme, ou bien nécessite-t-il une autorité contraignante ? En effet, si l’automobiliste s’arrête, c’est parce qu’il y a a posteriori l’autorité judiciaire qui le verbalisera s’il ne s’arrête pas au stop.
«
SUPPLEMENT: Devoir et obligation morale.
Le devoir n'est pas, en son essence, contrainte [1] ou nécessité [2] , mais bel et bien obligation [3] .
Dirai-je qu'il doit neiger ? Il y a loin de cette probabilité (physique) au rapport libre à la loi morale [4] .
Le devoir ne saurait se confondre ni avec cette probabilité statistique ni avec la nécessité naturelle, ni avec la relation juridique : jedois, dit-on, avoir une conforme au droit.
Si cette affirmation est exacte, toutefois le devoir n'existe que par rapportà des principes moraux.
« Le devoir n'existe que dans la mesure où il doit être considéré à partir deprincipes moraux.Eclaircissement.
On use fréquemment du terme « devoir » pour désigner desrelations de type juridique.
Les devoirs juridiques ont été définis commeparfaits, et les devoirs moraux comme imparfaits, parce qu'il faut absolumentque les premiers soient accomplis en vertu d'une nécessité externe, tandisque les seconds reposent sur un vouloir subjectif.
Mais on pourrait tout aussibien inverser la définition, car le devoir juridique comme tel implique qu'unenécessité externe, à laquelle peut manquer la disposition d'esprit, ce quisignifie que, tout en accomplissant ce devoir, je puis même avoir uneintention méchante.
Au contraire, une disposition d'esprit n'est morale que sielle implique tout ensemble, pour le contenu, une conduite conforme au droit,et, quant à la forme, l'élément subjectif de la disposition d'esprit.
[…]Le droit laisse, absolument parlant, toute latitude à la disposition d'esprit.
Lamoralité, en revanche, concerne essentiellement la disposition d'esprit etexige qu'on se conduise par respect du devoir.
» HEGEL , « Propédeutique philosophique ». Quelle origine est digne du devoir et où trouve-t-on la racine de sa nobletige ? L'origine du devoir ne se trouverait-elle pas dans l' autonomie [5] ? L'homme n'appartient-il pas en même temps au monde sensible [6] et au monde intelligible [7] ? « Devoir ! nom grand et sublime, toi qui n'as rien d'agréable ni de flatteur,mais qui réclames la soumission, sans pourtant employer, pour ébranler lavolonté, des menaces propres à exciter naturellement l'aversion et la terreur,mais en te bornant à proposer une loi, qui d'elle-même s'introduit dans l'âmeet la force au respect (sinon toujours à l'obéissance), et devant laquelle setaisent tous les penchants, quoiqu'ils travaillent en secret contre elle ; quelleorigine est digne de toi ? Où trouver la racine de ta noble tige, qui repoussefièrement toute alliance avec les penchants, cette racine où il faut placer,comme de son origine, la condition indispensable de la seule que les hommespeuvent se donner à eux-mêmes ? […]Elle ne peut être que la personnalité, c'est-à-dire la liberté et l'indépendanceà l'égard de tout le mécanisme de la nature, considérée comme la faculté d'unêtre qui appartient au monde sensible, mais qui en même temps est soumis àdes lois pures pratiques qui lui sont propres, ou qui lui sont dictées par sapropre raison, de telle sorte que la personne, comme faisant partie du mondesensible, est soumise à sa propre personnalité, en tant qu'elle appartient, enmême temps, au monde intelligible.
» KANT , « Critique de la raison pratique ».
[1] Contrainte : coercition ou violence exercée contre quelqu'un. [2] Nécessité : ici, caractère de ce qui découle de lois et relations invariables. [3] Obligation : caractère impératif constituant la forme de la loi morale (l'obligation suppose la liberté et s'oppose à la contrainte).[4] Loi morale : principe universel valable pour la volonté de tout être raisonnable. [5] Autonomie (de la volonté) : propriété qu'a la volonté d'être à elle-même sa loi. [6] Monde sensible : univers empirique, celui des phénomènes. [7] Monde intelligible : celui qui ne serait pas soumis aux conditions de la sensibilité..
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