Peut-on être à la fois libre et heureux ?
Publié le 04/07/2015
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Si le bonheur m'échoit plus qu'il ne vient sanctionner mes efforts pour l'atteindre, il est tentant d'en déduire qu'il est indépendant de ma liberté. 11 semble ne pas répondre à un projet : on imagine mal qu'un homme puisse organiser toutes les circonstances le concernant de telle Façon qu'elles semblent favorables à l'apparition d'un bonheur qu'il n'aurait plus qu'a attendre ; et même s'il y parvenait, ce qui en serait la conséquence ne le rendrait certainement pas heureux, puisqu'il y manquerait précisément la part de débordement inattendu qui est le signe du bonheur.
Ainsi la liberté qui m'est accordée, er qu'il me faux rendre efficace pour en éprouver la réalité (Faute de quoi elle reste vide et abstraite), n'est pas en mesure d'organiser mon bonheur en lui-même. Elle peur en préparer les conditions, mais l'existence de ces dernières ne garantir en rien que le bonheur sera là.
C'est encore à un autre niveau que la liberté semble peu compatible avec le bonheur ressenti : de ce dernier, j'aimerais prolonger la présence (c'est la
tentation du tt Ô temps, suspens ton vol ! et en jouir dans l'éternité. Le bonheur, parce qu'il n'est jamais assez intense, devrait gagner en intensité par sa durée.
Or, il y a dans la liberté un mouvement vers l'au-delà du présent être libre, c'est affirmer en soi une capacité d'échappement à tout donné, c'est pouvoir nier aussi bien l'extérieur que la vie intime en cours. Sans doute peut-on, en apparence, choisir librement de savourer le présent, mais ce présent choisi n'est déjà plus le présent donné, non seulement parce que, au sens strict, il en constituait d'abord le futur, mais aussi parce que sa qualité a changé. Exercer sa liberté en choisissant de faire durer le bonheur, c'est souligner l'existence de la durée dans le bonheur, et dès lors le transformer, au prix de son éventuelle éclipse. La liberté réelle est toujours en acte, qu'il s'agisse d'un acte de pensée ou d'une action empirique, alors que vivre un bonheur invite à le savourer, sinon dans la passivité, du moins au repos. Ainsi le bonheur qui m'échoit détermine mon attitude : comment concilier cette détermination avec le principe même de ma liberté ?
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