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Peut on échapper a son destin ?

Publié le 06/12/2005

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Chaque être présent dans le monde de l'existence constitue une possibilité qui a été réalisée, précisément parce qu'il était bon qu'elle soit réalisée ; et ce "bon" est déterminé non absolument, mais selon le meilleur possible : ainsi, chaque être est réalisé selon le maximum de la réalisation des compossibles qui, ensemble, composent l'harmonie d'un monde qui est le meilleur possible. -Le destin individuel, dans cette perspective, constitue l'entrée de l'individu dans cette logique générale du monde de l'harmonie préétablie. La liberté n'est que l'ignorance de la logique qui prédétermine nos choix. Ainsi, le destin d'un individu se trouve dans l'essence même de son être, dans sa "notion" : c'est la théorie leibnizienne de l'in-esse. C'est ainsi qu'il était inscrit dans la nature de César de franchir le Rubicon, et son destin s'est réalisé selon la logique de cette nature.     III. Le destin, c'est un destin choisi : le destin constitue la possibilité inconditionnée même de ce choix (Sartre).   -L'homme choisit ce qu'il veut être selon un éventail indéfini de possibilités qui lui sont essentiellement offertes. Il n'y a donc pas de forces transcendantes qui déterminent son choix, donc pas de prédestination : l'homme est à lui-même, en tant qu'être fondamentalement libre, son propre destin. -Or, l'homme ne choisit précisément pas d'être libre : il est contraint d'être libre, au sens où sa liberté seule n'échoit pas à son choix ; c'est pourquoi la liberté constitue, non une essence prédéterminée, mais la condition propre d'un homme qui ne choisit pas la nécessité même de sa liberté.

- Le destin, c'est la prédestination d'une histoire individuelle par des forces transcendantes qui la déterminent. - Le caractère essentiel de cette prédestination, et ce qui fait l'un des ressorts essentiels du tragique, c'est son caractère inéluctable. Cette prédétermination fait fi de tous les efforts que l'on pourrait produire pour en prévenir les effets ; et c'est précisément cette vanité de l'action humaine qui rend le destin tragique, car le sens de l'action humaine, c'est sa liberté intrinsèque. - Ainsi, le destin constitue-t-il une prédétermination absolument nécessaire, sans possibilité de la conjurer ? Ou bien, à l'inverse, ne pourrait-on pas dire que c'est précisément la condition absolue de la liberté humaine qui constitue le véritable destin de l'homme ? Le destin est-il prédéterminé, ou bien est-il ce que l'on détermine nous mêmes par-delà une décision libre ? Ne serait-ce pas, alors, cette liberté même qui consituerait comme l'essence destinale propre à l'homme ?

« Ce qui varie de la formule voltairienne à la formule vraie de Leibniz est l'idée de pluralité.

Dieu conçoit une infinité demondes possibles, et il choisit suivant le principe du meilleur.

Cela ne veut pas dire que Leibniz nie le mal et quenous vivons «dans le meilleur des mondes », mais que tous les autres mondes possibles, que Dieu a conçus, sanschoisir de les faire exister, seraient pires.

Ce qui, avouons-le, n'est guère réjouissant, Leibniz va jusqu'à écrire :« En outre, si Dieu n'avait pas choisi la meilleure suite universelle (suite dans laquelle le péché intervient), il auraitadmis quelque chose de pire que tout péché des créatures.

»Le Dieu de Leibniz n'est pas un despote, ni, comme chez Descartes, un « libre créateur des vérités éternel-les ».Dieu est en quelque sorte « assujetti » à la logique.

Si son esprit comprend et conçoit tout ce qui peut ou pourraitexister, il ne crée pas les vérités : il les comprend.

La création consiste alors à élire, parmi toutes les possibilitésconcevables et calculables, celle qui offre le plus de perfection, compte tenu de la limitation des créatures, de leurimperfection.

Le Dieu de Leibniz est avant tout calculateur, logicien.

Guidé par leprincipe du meilleur, il porte à l'existence la totalité la plus harmonieuse.Ce qui apparaît aux créatures comme une déficience, comme un mal, comme une imperfection, doit être en véritécompris comme l'élément d'un ensemble :«Ainsi il peut se faire que, dans une construction ou une décoration, on ne choisisse pas la pierre la plus belle, ou laplus précieuse, mais celle qui remplit le mieux la place vide.

»Il faut donc comprendre non pas que le mal n'existe pas, que l'imperfection n'existe pas, mais qu'ils permettent labeauté de l'ensemble.

La créature, l'homme prend la partie pour le tout.

Il est nécessaire d'admettre au contrairequ'« il faut qu'il y ait une raison pour que Dieu permette le mal plutôt que ne le permette pas; or la raison de lavolonté divine ne peut être prise que du bien ».« Tout est pour le mieux » ne doit donc pas être compris comme «tout est bien », et la pensée de Leibniz n'a riend'un optimisme béat.

Il ne pouvait rien avoir de meilleur qu'un monde où le péché originel existe.

«Dieu permetquelques maux, pour que beaucoup de biens ne soient pas empêchés.

»Le mal et le péché ne sont donc que des éléments servant la beauté et l'harmonie de l'ensemble.

Mais leur causeessentielle est l'imperfection, la limitation des créatures.

Leibniz emploie pour l'expliquer l'image du fleuve.

Quand unfleuve emporte avec soi des embarcations, la différence de leur vitesse vient de ['inertie des bateaux.

« Ici donc, larapidité vient du fleuve, et la lenteur du fardeau; le positif de la vertu du moteur, le privatif de l'inertie du mobile.

»Les perfections accordées par Dieu sont comparables à ce fleuve, et les maux à la limitation des êtres créés et finis.Resterait à expliquer en quoi la liberté de l'homme, c'est-à-dire sa capacité de choix, est compatible avecl'omniscience divine.

La solution de Leibniz est d'une subtilité logique telle qu'il est difficile de la résumer.

On pourraitdire que nos actions sont prévues, puisqu'elles concourent elles aussi à la perfection de l'ensemble, sans êtrenécessaires.

En toute logique, le contraire de telle action est possible.« Dieu a vu les choses dans la suite idéale des possibles, telles qu'elles allaient être, et parmi elles, l'homme péchantlibrement; et en décrétant l'existence de cette suite, il n'a pas changé la nature de la chose, ni n'a rendunécessaire ce qui était contingent.

»Notre action est libre, elle n'est en aucun cas nécessaire, c'est-à-dire telle qu'il serait logiquement impossible defaire autrement.

Mais que nos actes soient contingents n'empêche pas Dieu de les prévoir, et donc d'élire, parmi lasuite des possibles, celle qui inclut l'acte qui concourra à la plus grande perfection possible de l'ensemble. « Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles » ne signifie donc pas que «tout est pour le mieuxdans le meilleur des mondes ».

Voltaire a certainement eu raison de s'insurger contre ce qui demeure unejustification du mal, mais Leibniz est plus difficile à réfuter qu'à parodier.

Ce qui est remarquable dans ce dialogueposthume du logicien, de l'inventeur de l'infinitésimale et du défenseur des Calas, c'est que toute théologie doit seconfronter au problème du mal, et qu'aucune solution jamais ne satisfera pleinement : en quoi le mal est-iljustifiable? III.

Le destin, c'est un destin choisi : le destin constitue la possibilitéinconditionnée même de ce choix (Sartre).

-L'homme choisit ce qu'il veut être selon un éventail indéfini de possibilités quilui sont essentiellement offertes.

Il n'y a donc pas de forces transcendantesqui déterminent son choix, donc pas de prédestination : l'homme est à lui-même, en tant qu'être fondamentalement libre, son propre destin.-Or, l'homme ne choisit précisément pas d'être libre : il est contraint d'êtrelibre, au sens où sa liberté seule n'échoit pas à son choix ; c'est pourquoi laliberté constitue, non une essence prédéterminée, mais la condition propre d'un homme qui ne choisit pas la nécessité même de sa liberté.

Le vraitragique, en ce sens, ne réside pas dans la prédétermination, mais dans laliberté absolue, tellement absolue qu'elle échappe à cette liberté même.

Eneffet, on peut choisir de fuir sa liberté, mais on restera toujours responsablede tout devant tous, quoiqu'on fasse : et c'est dans ce constat existentielque se situe toute la tragédie du destin humain. «On ne fait pas ce que l'on veut et cependant on est responsable de ce qu'onest».Cette affirmation paradoxale est au centre de la philosophie sartrienne quis'efforce de concilier deux approches partielles de la réalité humaine quel'opinion commune juxtapose sans en dégager la portée véritable : conscience. »

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